Dix questions sur les finfluenceurs (contraction de finance et influenceur) : à qui peut-on vraiment faire confiance ?

Les finfluenceurs autoproclamés sont aujourd’hui omniprésents sur les réseaux sociaux. Mais comment évaluer la fiabilité de leurs contenus ou de leurs conseils ? Trends répond à dix questions essentielles sur ce phénomène en plein essor dans le monde de la finance.
1/ Qu’est-ce qu’un finfluenceur ?
Le terme finfluenceur est une contraction de finance et influenceur. Il désigne des personnes qui diffusent via les réseaux sociaux des contenus liés à la finance personnelle : conseils en épargne, en investissement, analyses boursières, vulgarisation des cryptomonnaies, ou encore témoignages sur des produits financiers.
Ils utilisent principalement Instagram, TikTok, YouTube ou LinkedIn pour informer, inspirer ou inciter leur communauté à passer à l’action.
Certains finfluenceurs populaires rassemblent entre 10.000 et plus de 200.000 abonnés, avec parfois, des pointes bien au-delà.
2/ Depuis quand les finfluenceurs sont-ils actifs ?
« Leur émergence coïncide avec la démocratisation de l’accès aux marchés financiers et l’explosion des réseaux sociaux, avec la pandémie comme puissant catalyseur», explique Bart Chiau, professeur à la faculté d’économie de l’université de Gand.
À partir de 2020, le nombre d’investisseurs particuliers a fortement augmenté. Les jeunes se sont massivement tournés vers les applications de trading, recherchant des sources d’information alternatives. Dans ce contexte, les finfluenceurs se sont imposés comme des voix non institutionnelles capables de vulgariser la complexité financière.
3/ Ont-ils une formation ou une expertise reconnue ?
Les profils sont très hétérogènes. La plupart sont des jeunes initiés aux nouvelles technologies et passionnés par la finance, les marchés ou la gestion budgétaire. Certains possèdent une formation économique ou une expérience dans le secteur financier, mais ce n’est pas toujours le cas.
Beaucoup sont autodidactes et partagent leur propre parcours d’apprentissage. Cela crée une certaine proximité avec le public, mais pose des questions sur leur légitimité et la fiabilité de leurs analyses.
4/ Quel est leur public cible ?
Les finfluenceurs ciblent principalement les jeunes adultes – souvent dans la vingtaine ou trentaine – qui font leurs premiers pas dans l’univers de l’investissement ou de la gestion patrimoniale. Leur force réside dans leur capacité à rendre la finance accessible, attrayante et décomplexée, en recourant à des formats visuels, de l’humour ou des anecdotes personnelles.
5/ Cette accessibilité est-elle une force ?
« Les finfluenceurs participent à l’amélioration de la littératie financière chez les jeunes, ce qui est une bonne chose », souligne Bart Chiau. « Ils traduisent un univers complexe dans un langage compréhensible. Mais il faut rester vigilant face aux risques de simplification excessive ou de généralisation qui peuvent occulter des nuances pourtant essentielles. »
Outre leur accessibilité accrue, les finfluenceurs peuvent contribuer à un monde plus transparent en matière de revenus, de dépenses, de dettes et d’investissements.
Certains adoptent également un rôle éducatif, sensibilisant leur public aux pièges à éviter ou aux enjeux sociétaux comme l’investissement durable ou les inégalités économiques.
6/ Sont-ils utilisés par les institutions financières ?
« Absolument », confirme Bart Chiau. Les banques et compagnies d’assurances ont identifié le potentiel marketing des finfluenceurs.
Plutôt que de développer des campagnes publicitaires coûteuses, elles misent sur des collaborations avec des profils populaires qui représentent leur marque. Cela va du contenu sponsorisé à des partenariats d’ambassadeurs à long terme. Pour les banques, c’est un moyen de rester pertinentes dans un paysage médiatique en mutation, où la publicité traditionnelle perd progressivement en efficacité.
La législation impose aux finfluenceurs de déclarer toute collaboration commerciale, mais cela n’est pas toujours respecté. Pour l’audience, il devient difficile de distinguer contenu authentique et message promotionnel, d’autant que certains finfluenceurs sont rémunérés au recrutement de clients.
7/ Quels sont les risques associés ?
« Beaucoup de finfluenceurs fournissent des conseils en investissement sans autorisation, contrairement aux intermédiaires agréés, formés et supervisés par la FSMA (l’Autorité des services et marchés financiers en Belgique) », avertit Bart Chiau.
Le principal danger est que des particuliers suivent des conseils généralistes, inadaptés à leur profil de risque ou à leur situation patrimoniale. Certains contenus sont mal documentés voire erronés, et dans les pires cas, les finfluenceurs promeuvent, de façon consciente ou non, des produits toxiques ou frauduleux.
Il est aussi fréquent qu’ils vendent des formations coûteuses, des livres ou des abonnements payants pour des alertes boursières. Bart Chiau plaide donc en faveur d’un code de conduite clair, voire de la mise en place d’un label de qualité.
8/ Quelle est la position de la FSMA ?
La FSMA (Autorité des services et marchés financiers) souligne que les finfluenceurs ne bénéficient d’aucun statut particulier et qu’ils sont soumis, comme tout un chacun, à la législation financière en vigueur. « Nous restons vigilants », précise-t-elle.
« Toute personne active dans le conseil en investissement ou la gestion de patrimoine doit disposer d’un agrément délivré par la FSMA.
Une autre licence est requise pour fournir des services bancaires ou d’investissement. Les finfluenceurs doivent également respecter l’interdiction de promotion que nous avons instaurée pour les produits à haut risque. »
Le conseil en investissement est une activité réglementée qui implique de formuler une recommandation personnalisée sur un placement. En revanche, parler d’investissement de manière générale ne constitue pas un conseil au sens juridique, et ne nécessite donc pas d’agrément.
« Les règles relatives aux abus de marché s’appliquent aussi aux finfluenceurs », précise encore la FSMA. « Tout le monde peut donner son avis sur une action, mais la transparence doit être totale. Cela signifie notamment qu’il faut indiquer clairement si l’on détient soi-même des titres dont on parle. Toute forme de manipulation de marché est en tout état de cause interdite. »
La FSMA peut infliger des sanctions administratives à toute personne ou entité ne respectant pas la législation financière. Si vous soupçonnez qu’un finfluenceur dépasse les limites légales, vous pouvez le signaler à la FSMA.
9/ Comment distinguer les finfluenceurs crédibles des autres ?
L’esprit critique est fondamental. Avant de suivre un finfluenceur, posez-vous les bonnes questions :
Possède-t-il une expertise vérifiable ?
Est-il transparent sur ses partenariats et sur les risques associés ?
Évite-t-il les promesses irréalistes de gains rapides ?
Comparez toujours leurs propos avec des sources fiables : médias spécialisés, régulateurs, ou conseillers agréés.
10/ Quelle alternative aux finfluenceurs pour un conseil sérieux ?
Un finfluenceur peut éveiller l’intérêt ou inspirer. Mais pour toute décision financière stratégique, il vaut mieux faire appel à un professionnel agréé.
Un conseiller financier dispose des compétences requises, est soumis à des règles strictes en matière de formation continue, de transparence et de déontologie, et a l’obligation légale d’agir dans l’intérêt du client.
Par ailleurs, de nombreuses sources d’information indépendantes sont disponibles : presse économique, plateformes de consommateurs, ou la FSMA elle-même.
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