Le marché locatif sous haute tension en Belgique: jusqu’à 80 candidats-locataires par bien
Les candidats-locataires peinent de plus en plus à trouver un logement adapté sur le marché privé en Belgique. Les loyers ont également fortement augmenté ces cinq dernières années.
Si les ventes immobilières restent stables, le marché locatif est, lui, sous pression croissante. Il connait une pénurie sans précédent, selon le baromètre locatif de l’agence immobilière Dewaele qui se base sur environ 13.500 contrats de location conclus entre 2010 et 2022. Chaque bien disponible attire en moyenne 34 candidats-locataires. « Dans les centres urbains, nous voyons parfois jusqu’à 80 candidats locataires solvables pour un seul bien», explique Filip Dewaele, expert en location et président de la plus grande agence immobilière indépendante du pays. « De nombreux ménages à double revenu qui envisageaient encore d’acheter se tournent désormais vers la location. »
Une demande accrue, mais une offre locative en recul
L’augmentation du nombre de locataires n’est qu’une partie de l’explication. Selon le groupe immobilier Dewaele, le problème réside principalement dans la diminution de l’offre. Depuis la hausse des taux d’intérêt à la mi-2022, l’appétit des investisseurs pour l’immobilier a considérablement diminué.
« En 2023, nous avons commencé à remarquer qu’il y avait moins d’appartements sur le marché locatif », explique Filip Dewaele. « Cette tendance s’est poursuivie en 2024. » Chez Dewaele, 16 % de moins de nouveaux contrats de location ont été conclus en 2024 par rapport à 2023. Ce chiffre n’est pas lié à une perte de part de marché, selon Dewaele. « Les données de l’organisation sectorielle CIB montrent une baisse encore plus marquée du nombre de contrats de location signés », ajoute-t-il.
Des propriétaires moins enclins à passer par une agence ?
Est-il possible que, dans ces conditions favorables aux propriétaires, ces derniers choisissent plus souvent de louer eux-mêmes sans passer par une agence ? « Cela me semble peu probable », répond Dewaele. « Un investisseur ne fait pas appel à une agence parce qu’il ne trouve pas de locataire – cela, il sait très bien le faire lui-même depuis des années – mais parce qu’il ne veut tout simplement pas gérer cela. D’ailleurs, un plus grand nombre de candidats implique aussi plus de travail : il faut refuser davantage de personnes, et ce n’est jamais agréable. »
Des loyers en forte hausse sur cinq ans
La pénurie sur le marché locatif se traduit depuis plusieurs années par une hausse des loyers. Le loyer moyen d’une maison en Flandre s’élève désormais à 1.007 euros par mois, soit une augmentation de 3 % par rapport à l’année précédente. En cinq ans, les loyers des maisons ont grimpé de 25 %. Le loyer médian d’une maison mitoyenne à Bruxelles atteint 1.700 euros par mois selon le baromètre de la location de Federia. Le prix moyen des locations a augmenté à un rythme moins rapide. Après une augmentation de 4,3 % en 2023, la Région poursuit son ralentissement avec une hausse des loyers moyens tous types de biens confondus de 2,52 % au premier semestre 2024 à 814 euros.
En Wallonie, d’après l’IWEPS, en 2023, le loyer moyen des ménages locataires se situait entre 570 euros et 629 euros. Les biens de petite taille, très demandés, connaissent la plus forte hausse, en particulier les appartements avec une augmentation de 3,38 % à 764 euros. Par ailleurs, après deux années de stabilisation avec des hausses limitées à 0,8 % en 2020 et 2021, les loyers moyens en Wallonie ont augmenté de 3,9 % en 2022 et de 8,6 % en 2023. Cela représente une augmentation totale de 12,5 % sur cette période.
En Flandre, les loyers des appartements ont progressé de 5 % en 2024 selon le baromètre de Dewaele, atteignant une moyenne de 841 euros par mois. Louer un appartement coûte aujourd’hui 23 % de plus qu’il y a cinq ans.
Triplement des labels A
Un aspect positif du marché est l’amélioration des performances énergétiques des biens locatifs. En 2022, 62 % des logements locatifs proposés par Dewaele possédaient un certificat PEB de catégorie A ou B. Depuis 2018, le nombre de logements avec un label A a triplé, passant de 6,5 % à 23 %.
« Cette évolution est principalement due aux investissements dans les nouvelles constructions. Sans incitations, non seulement de nombreux candidats locataires ne trouveront pas de logement, mais l’offre ne sera pas non plus durable. Les propriétaires de biens économes en énergie permettent à leurs locataires de mieux gérer leurs charges mensuelles, ce qui a un impact social important », conclut Filip Dewaele.
Un nouveau gouvernement attendu
Filip Dewaele perçoit cependant un signe positif pour les candidats-locataires: les investisseurs reviennent progressivement sur le marché immobilier, bien que timidement. « Les taux d’intérêt ont légèrement baissé et devraient se stabiliser à ce niveau », explique Dewaele. « La hausse des loyers est également favorable au rendement, ce qui suscite un regain d’intérêt pour l’immobilier locatif. »
« Cependant, beaucoup d’investisseurs restent prudents. Ils attendent des clarifications, notamment du nouveau gouvernement. Et idéalement, un gouvernement qui soutiendrait les investisseurs dans l’immobilier locatif. Aujourd’hui, l’accent est principalement mis sur l’accès à la propriété, tandis que tout le reste est traité de la même manière », avance l’expert.
Conseils pour les candidats locataires
Face à la pénurie, les candidats locataires doivent se préparer. Filip Dewaele recommande de rassembler tous les documents nécessaires (justificatifs de revenus, pièces d’identité, etc.) à l’avance. La règle générale reste de ne pas dépasser un tiers de ses revenus pour le loyer. « Être transparent sur ses revenus évite des frustrations inutiles. Sur un marché tendu, chaque minute compte, car chaque bien ne peut être loué qu’à un seul locataire », rappelle-t-il.
Laurenz Verledens / Caroline Lallemand
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