À qui appartient la Belgique? Le résidentiel, chasse gardée des Belges
Les promoteurs immobiliers étrangers sont peu enclins à s’aventurer sur le terrain belge. La faute à la complexité du système en place. Les investisseurs étrangers, qui ont les poches pleines pour le moment, sont par contre bien plus enthousiastes à l’idée de mettre la main sur nos immeubles de bureaux ou nos centres commerciaux.
Et si, pour sortir leur projet de terre, le meilleur allié des promoteurs belges était, in fine, la complexité juridique, politique et des procédures de notre pays ? La situation qu’ils vilipendent à longueur de conférences, cocktails ou réunions leur permet, pour le moment, d’éviter que des étrangers viennent grappiller l’une ou l’autre part du gâteau. La plupart n’ayant ni l’envie, ni le temps, ni les compétences de mettre les pieds dans le bourbier actuel.
Le raisonnement n’est pas si dénué de sens quand on analyse le paysage immobilier d’un peu plus près. La majorité des immeubles de bureaux, d’appartements et des centres commerciaux sont développés par des entreprises belges. L’étape suivante – la gestion du bien – est, quant à elle, plus fluctuante. Certains gardent l’actif en portefeuille, d’autres le vendent au plus offrant comme produit d’investissement. Une situation qui varie d’un segment à l’autre.
Si on prend le volet commercial, celui des grands centres commerciaux, la donne est claire : tous ont été construits par des développeurs belges et pratiquement tous ont été revendus dans la foulée à des investisseurs étrangers. Que ce soit Docks Bruxsel à des Canadiens (AIMCo), le Woluwe Shopping à des Néerlandais (Eurocommercial Properties), Médiacité à des Américains (CBRE Global Investors), L’Esplanade de Louvain-la-Neuve à des Français (Klépierre), les Grands Prés (Mons) à des Allemands (Union Invest Real Estate GmbH) ou encore le Wijnegem et le Waasland Shopping, tous les deux situés près d’Anvers, à des Chinois (Chinese Investment Corporation et AEW). Sans oublier que le prochain grand centre commercial qui devrait être construit en Belgique, Europea, sur le plateau du Heysel, sera géré par des Français (Unibail-Rodamco-Westfield). ” AG Real Estate (City 2 et Westland) est l’un des derniers groupes belges à garder en portefeuille des centres commerciaux, explique Pierre-Paul Verelst, head of research chez le courtier immobilier JLL. Cette mainmise étrangère s’explique avant tout par le fait qu’il s’agit d’un produit d’investissement très intéressant pour des étrangers, d’autant que ceux-ci disposent d’importants capitaux ces derniers temps. ”
La plupart des centres commerciaux ont été développés par des Belges, puis revendus dans la foulée.
Sur le plan des immeubles de bureaux, la situation est plus contrastée. Si Befimmo et Cofinimmo restent deux acteurs belges d’envergure, les investisseurs étrangers prennent de plus en plus de place. Le plus grand immeuble de bureaux du pays (la tour des Finances, 200.000 m2) est, par exemple, entre des mains allemandes. Alors que les Coréens multiplient ces derniers temps les transactions. ” Les prix sont très élevés, ce qui fait que peu de Belges arrivent encore à suivre “, tranche Pierre-Paul Verelst.
Les Belges vont voir ailleurs
Le volet résidentiel est, quant à lui, celui qui résiste le plus aux sirènes étrangères. Tous les grands promoteurs qui construisent aujourd’hui des appartements (la construction de maisons étant en chute libre) disposent d’un actionnariat essentiellement belge. Une situation similaire en Flandre, à Bruxelles et en Wallonie, que ce soit Thomas & Piron, Atenor, Matexi, BPI, AGRE, Versluys, Immobel, Besix Red, Equilis, Eaglestone, Extensa ou encore Ghelamco. Sur la scène francophone, seuls quelques acteurs tels que les Français d’Eiffage Development ou de Bouygues Immobilier ont franchi la frontière. ” Il est évident que les difficultés pour obtenir des permis, de même que la longueur des procédures, n’encouragent pas les acteurs étrangers à être présents en Belgique, précise ce promoteur bruxellois de haut vol. D’autant que les Belges sont plus disposés à prendre des risques et sont ceux qui connaissent le mieux le marché. Une situation différente de la France et des Pays-Bas, où le marché est beaucoup plus ouvert. ”
Cette complexité est d’ailleurs une des raisons qui poussent de plus en plus de promoteurs belges à aller voir ailleurs, histoire de maintenir le rythme de croissance de leur chiffre d’affaires. Que ce soit en Europe centrale (le must), en France ou au Portugal, la dernière tendance.
À qui appartient la Belgique ?
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici