La start-up belge Citronics crée “le premier micro-ordinateur circulaire au monde” à partir de vieux Fairphones

Le micro ordinateur de Citronics intégré dans un dispositif de chauffage.

Dans un monde où l’obsolescence programmée engendre des montagnes de déchets électroniques, la startup belge Citronics se distingue par une innovation durable: ce qu’elle présente comme le “tout premier micro-ordinateur circulaire au monde”, conçu à partir de composants de smartphones en fin de vie.

Chaque année, environ 200 millions de téléphones portables terminent au rebut en Europe, alors que leurs composants, coûteux à produire et difficiles à recycler, restent la plupart du temps performants. Face à ce gaspillage, la start up low tech brabançonne Citronics a décidé de donner une seconde vie – parfois même une troisième – aux cartes-mères des vieux smartphones, principalement des Fairphone 2 (2015) fournis grâce à un partenariat avec la société néerlandaise. Ces modèles sont réputés pour leur conception modulable et réparable.

Un défi technique

« Cela peut paraître étonnant mais nous sommes les premiers au monde à récupérer et réutiliser des cartes-mères de smartphones en fin de vie dans des projets innovants. C’était un défi technique, mais le potentiel nous a paru évident», annonce à Trends Tendances Jean-Brieuc Feron, fondateur de Citronics. “Ce genre de démarche est en effet encore jugé économiquement non viable alors que réutiliser une carte-mère coûte en moyenne trois fois moins cher que d’en produire une neuve », précise l’ingénieur en électronique de 36 ans 

C’était un défi technique, mais le potentiel nous a paru évident

Une fois testées et reprogrammées, les cartes-mères sont intégrées à une nouvelle carte électronique dotée d’interfaces standard telles que l’USB. Avec comme résultat un micro-ordinateur embarqué puissant et flexible qui offre une connectivité avancée grâce à la 4G LTE, au WiFi et à l’Ethernet, le tout fonctionnant sous un système d’exploitation Linux open-source.

Une technologie au service de l’industrie

Les micro-ordinateurs de Citronics ne sont pas destinés aux particuliers. Ils trouvent leur utilité dans des applications industrielles ou énergétiques. « Ils peuvent être intégrés dans des batteries de vélos électriques pour collecter des données via GPS, ou dans des systèmes de gestion énergétique pour connecter des panneaux solaires, des pompes à chaleur et des compteurs intelligents », illustre Jean-Brieuc Feron.

Une collaboration notable avec la start up belge Destore permet d’optimiser la consommation énergétique des ménages. Grâce aux micro-ordinateurs de Citronics, les systèmes énergétiques des habitations sont surveillés et ajustés en temps réel, ce qui permet de maximiser l’autoconsommation solaire. Une collaboration est aussi en cours avec Deutsche Telekom pour développer des routeurs Internet circulaires. Pour encourager l’adoption de sa technologie, Citronics commercialise un kit de développement – baptisé « DevKit » – au prix compétitif de 250 euros. Il est destiné aux ingénieurs et startups souhaitant tester et intégrer ses micro-ordinateurs dans leurs propres projets.

Un kit de développement à 250 euros

L’impact de la start-up ne s’arrête pas là. La société collabore sur « la première chaîne d’extraction industrielle et locale de composants électroniques circulaires au monde », avec le Village n°1 Entreprises situé à Braine-Le-Château. Cet acteur socialement responsable emploie des personnes en situation de handicap ou exclues du circuit traditionnel du travail. Elle extrait déjà, quotidiennement, plus de 200 cartes mères de smartphones, tous fournis, à ce stade, par Fairphone, avant d’envisager de récupérer des appareils d’autres marques telle que Samsung. Pour l’heure, seule la carte mère des smartphones est réutilisée mais les autres pièces (module caméra, micro…) sont soigneusement conservées lors du démontage dans les ateliers du Village n°1. Jean-Brieuc Feron espère trouver un moyen de les valoriser à leur tour.

Le « DevKit » est destiné aux ingénieurs et startups souhaitant tester et intégrer ses micro-ordinateurs dans leurs propres projets.

Indépendance technologique

En s’approvisionnant localement en Europe et en limitant sa dépendance aux chaînes d’approvisionnement asiatiques, Citronic offre également une résilience technologique cruciale. “Depuis le covid, le blocage d’un bateau dans le canal de Suez ou encore les actes de piraterie en Mer Rouge, on s’est rendu compte qu’il était nécessaire, pour notre résilience économique, de pouvoir s’affranchir de notre dépendance en matière d’éléments aussi stratégiques que les composants électroniques”, expose son fondateur.

Citronic ne compte pas se limiter aux smartphones. À l’avenir, elle envisage d’élargir son activité à d’autres appareils électroniques, comme les montres connectées et les barres de son Bluetooth. La société s’est fixée des objectifs ambitieux pour 2025: tripler sa base de partenaires qui développent activement ses solutions intégrant ses dispositifs et multiplier par 10 le nombre de dispositifs installés chez des utilisateurs finaux. Citronics dont l’équipe se compose actuellement de 4 personnes a été financée en fonds propres depuis sa création en 2021. Une levée de fonds est prévue pour 2025.

La “première chaîne d’extraction industrielle et locale de composants électroniques circulaires”, en collaboration avec les travailleurs de Village n°1 Entreprises

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content