Salaire du nouveau patron de bpost : quels sont les risques de dépasser le plafond des 650.000 euros ?

Chris Peeters © belga

Le salaire du nouveau CEO de bpost, Chris Peeters, qui dépasserait le cap des 650.000 euros par an fixé par le gouvernement pour les dirigeants des sociétés publiques, fait débat. Sa rémunération est conforme « aux accords passés avec les autorités en la matière », assure l’entreprise postale, sans préciser de montant. Des estimations révélées par Le Soir avancent un salaire de 585.000 euros qui pourrait grimper jusqu’à 1,2 million grâce aux bonus. Marek Hudon, professeur d’économie à l’ULB, nous éclaire sur les risques que représente le dépassement de ce plafond salarial.

Que peut-on considérer comme salaire juste pour un CEO d’une entreprise publique ?

Le salaire maximum d’un CEO d’une entreprise publique se justifie par les niveaux de risques et de responsabilités élevés qu’il endosse. Une balise salariale de maximum 650.000 euros pour les CEO des entreprises publiques cotées en Bourse avait été fixée à l’époque par le gouvernement Di Rupo. Et bpost est encore détenue à 51% par l’Etat belge. Dans le cadre du secteur public, cela peut avoir du sens à partir du moment où c’est l’argent du contribuable, et à partir du moment où d’autres personnes de qualité ont déjà été engagées au même salaire. La question qui se pose est de savoir si on reste sur ce montant-là maximum ou si on fait sauter la balise en fonction du candidat qui se propose ?

Quels sont les risques en cas de dépassement de ce plafond des 650.000 euros ?

Le danger de faire sauter cette balise sans discussion préalable au sein du gouvernement peut mener à un dangereux glissement. Dans une logique de comparaison par rapport au secteur privé ou d’autres entreprises en Europe, cela pourrait pousser d’autres dirigeants à prétendre à de telles rémunérations. Ils peuvent se demander pourquoi est-ce possible chez bpost et pas ailleurs? 

J’imagine que ce genre de discussions ne doit pas être évidentes à mener au sein du gouvernement fédéral en fin de législature. On a déjà pu voir leurs conceptions très différentes dans le cadre des débats sur les taux d’épargne. Certains acteurs économiques et politiques trouvaient logique de laisser les marchés fonctionner et que les taux devaient fluctuer alors que d’autres estimaient qu’il fallait davantage réguler, car les marges étaient trop importantes pour les banques.

Développer la partie variable de la rémunération du nouveau patron de bpost présente aussi quelques soucis, expliquez-nous

Cette partie variable permet de développer une perspective sur le long terme, ce qui est positif, mais elle devrait aussi respecter les balises fixées. Le souci c’est qu’il y a une ambiguïté sur le total vs. le salaire fixe. Est-ce que les 650.000 incluent la partie variable ou pas ? Ce glissement peut se répercuter sur d’autres sociétés publiques.

La transparence est une bonne chose et c’est normal d’avoir des informations sur les salaires des patrons surtout pour une entreprise cotée en Bourse, mais cela peut aussi créer des jalousies entre dirigeants d’un même secteur, si un maximum n’est pas respecté de manière ferme. Cela devrait être clarifié dans le futur.

Comment interpréter la prime unique à la signature de 250.000 euros octroyée à Chris Peeters ? Est-ce le prix à payer pour dénicher une « pointure » ?

C’est une façon de rattraper la rémunération de Chris Peeters qui était plus élevée chez Elia. On reste ici dans l’ordre du glissement. Comment déterminer qui est « une pointure » et qui ne l’est pas ? Est-ce simplement le salaire précédent du candidat, ses qualifications exceptionnelles, des éléments de son profil, son ancienneté ? On aurait besoin d’un dossier qui prouve que monsieur Peeters a été excellent chez Elia. Cette question de prime unique ouvre la porte à de nombreux débats. Elle va aussi demander une clarification des autorités à l’avenir.  

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