Le plus gros problème de Tesla n’est pas (encore) Elon Musk

Projection d'Elon Musk sur la megafactory de Berlin - Photo by Instagram (Credit Image: © Ff/ROPI via ZUMA Press)
Baptiste Lambert

Le plus grand fabricant de véhicules électriques est en grande difficulté en Europe, en Chine, mais aussi en Californie, son marché historique. Tout le monde y voit la mauvaise influence de celui qui était autrefois un atout : Elon Musk. Mais c’est encore trop tôt pour le dire. De nombreux facteurs jouent en ce moment contre Tesla.

Il y a trois semaines, des activistes projetaient Heil Tesla” sur la megafactory de Berlin. Hier, c’est le siège de Tesla à Paris qui était recouvert de boue et flanqué d’une banderole : “Le Fascisme passe la seconde.” Aux États-Unis, et désormais en Europe, certains propriétaires de Tesla arborent l’autocollant : “J’ai acheté cette Tesla avant qu’Elon ne devienne fou.”

Les positions politiques du milliardaire se retournent-elles contre la marque américaine ? Pour beaucoup, c’est une évidence, si on regarde les chiffres du mois de janvier. -76% de ventes en Espagne, -63% en France, -60% en Allemagne, et autour de -40% dans les pays scandinaves, les marchés les plus favorables à l’électrique. En Chine, les ventes ont chuté de 11,5%. Même au sein du bastion historique de Tesla, des fissures apparaissent : -12% sur l’année 2024 en Californie. Cela fait cinq trimestres consécutifs que Tesla y est dans le rouge.

Selon les analystes de Stifel, la cote de popularité nette de Tesla est tombée à seulement 3 %, son plus bas niveau historique. En Europe, la popularité d’Elon Musk est également en chute libre et décroit avec le niveau de revenu.

L’Europe ralentit, Tesla vieillit

Attention au jugement précipité, toutefois. Il y a une multitude de raisons qui expliquent les difficultés du constructeur américain. À commencer par un marché de la voiture électrique à la peine en Europe. Après quatre années de forte croissance, 2024 a signé une première baisse de 3%, selon le cabinet Rho Motion.

Il y a ensuite des raisons propres à Tesla. La marque est freinée dans ses livraisons par le manque de batteries sur le marché. Mais plus encore, certains modèles deviennent vieillissants. Sur les 1,79 million de véhicules livrés en 2024, 1,77 million concernait les modèles 3 et Y. Le reste se partage entre la Model S, la Model X et l’anecdotique Cybertruck. Or, la Model S a déjà 13 ans et la Model X a 10 ans.

Si Tesla parvient à se renouveler, par exemple avec un modèle bon marché à moins de 30.000 dollars, ce qui est dans les cartons, la croissance pourrait bondir dans l’autre sens. Après tout, les deux modèles de voitures électriques les plus vendus en Europe en 2024 restent la Tesla Model Y et la Tesla Model 3.

La concurrence se réveille

Mais la concurrence semble enfin se réveiller. C’est vrai en Allemagne, où on mise à nouveau sur la “Deutsche Qualität“. Wolkswagen, BMW et Seat y reprennent des parts de marché sur Tesla.

En Chine, BYD triomphe : ses ventes y ont augmenté de 48% au mois de janvier. Le constructeur reste très attractif en termes de prix, mais rattrape aussi son retard technologique sur le segment de la conduite autonome. Conséquence : la percée tant attendue en Europe se dessine enfin. En janvier, BYD a dépassé Tesla sur les marchés du Royaume-Uni, de l’Espagne et du Portugal. C’est une grande première.

Année de transition

Dans la présentation des résultats décevants du 4e trimestre 2024, Elon Musk gardait son optimisme. L’année 2025 sera une année de transition, a-t-il admis, mais 2026 pourrait se montrer “épique”, avec l’aboutissement de la conduite autonome. Les premières voitures totalement autonomes (FSD) devraient rouler dès le mois de juin, à Austin, au Texas. Tous les autres États américains pourraient suivre d’ici 2026. Les propriétaires de Tesla pourront alors intégrer la flotte de robots-taxis.

En attendant, sur les marchés, l’action Tesla est dans le dur depuis le début de l’année, avec une chute de 25%, la plus mauvaise performance des “7 Magnifiques”. L’action avait toutefois atteint un sommet en décembre dernier, en gagnant 50% après l’élection de Donald Trump.

Tesla reste – de loin – l’action la plus chère de ce club très fermé, avec un cours qui se paye quatre fois les bénéfices. Compte tenu du ralentissement de la croissance, de l’année de transition et peut-être du début d’un boycott de la marque américaine, l’action pourrait s’avérer très risquée en 2025. “Wall Street reste divisée : environ la moitié des analystes évaluent Tesla comme un achat, tandis que l’autre moitié suggère de conserver ou de vendre”, écrit Bloomberg.

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