Frites, chocolat, bière… Un patrimoine belge très convoité

Jérémie Lempereur Journaliste Trends-Tendances - retail, distribution, luxe

Pour un touriste étranger, quitte à se payer une belle indigestion, la Belgique, c’est avant tout le pays de la bière, des frites, des moules et du chocolat. Mais devant tant de gourmandises, il est sans doute une question qu’il ne se posera jamais : qui sont les vrais propriétaires de nos pils, bintjes et autres pralines nationales ?

Certaines marques emblématiques de chocolat sont toujours 100% noir-jaune-rouge. Neuhaus et Corné Port-Royal, notamment, sont aux mains de la société de portefeuille bruxelloise Compagnie du Bois Sauvage. Belcolade, le spécialiste du chocolat de couverture et filiale du groupe Puratos, un des leaders européens des produits de boulangerie et pâtisserie, reste lui aussi entièrement belge. Enfin, les célèbres pralines Leonidas sont, quant à elles, propriété de la famille du fondateur, le Grec Leonidas Kestekides qui s’installa en Belgique un peu avant la Première Guerre mondiale.

Mais d’autres marques réputées ne sont plus belges du tout. Ainsi, Galler passait, fin de l’année dernière, à 100% entre les mains de son actionnaire qatari, entré au capital de la chocolaterie en 2006. Les pralines Godiva, pour leur part, sont turques depuis 2007 (groupe Yildiz) tandis que Côte d’Or appartient aujourd’hui au géant américain de la confiserie Mondelez International. Callebaut n’est plus belge non plus depuis son mariage avec le français Barry en 1996. Détenu par la famille suisse Jacobs et coté à la bourse de Zurich, le groupe Barry Callebaut est devenu le premier fabricant mondial de produits à base de cacao et chocolat et s’apprête à construire le plus grand centre de distribution de chocolat jamais bâti au monde à Lokeren.

Qui a la patate ?

Et nos frites ? Sont-elles vraiment belges ? Si l’on observe quelques grandes marques, rien n’est moins sûr. McCain, par exemple, est un groupe canadien. C’est lui qui a racheté en 2013 la marque belge Lutosa, alors aux mains de PinguinLutosa (aujourd’hui Greenyard). L’Europe avait approuvé la transaction à condition que la marque soit cédée. Elle a donc atterri dans l’escarcelle du groupe suédois Findus un an plus tard. Les activités de Findus en Europe continentale ayant été reprises en 2015 par le holding britannique Nomad Foods, propriétaire d’Igloo, Lutosa est passé dans le caddie d’Iglo Belgium. En annonçant aujourd’hui son changement de nom en Belviva, la marque britannique réussi un beau coup marketing en tentant de se belgiciser. Certes, les produits sont fabriqués en Belgique et les pommes de terre proviennent des champs voisins, mais les fruits de la récolte, sonnants et trébuchants, eux, ne restent pas chez nous…

En changeant le nom de Lutosa en Belviva, le proprétaire britannique de la marque réussit un beau coup marketing.

Tout n’est heureusement pas perdu. D’autres entreprises spécialisées dans les produits surgelés à base de pommes de terre sont encore bien belges. On peut notamment citer Mydibel, Agristo et surtout Clarebout Potatoes. Encore détenue à 100% par la famille Clarebout, cette marque distribue ses produits dans de très nombreux pays. Avec un chiffre d’affaires de 640 millions d’euros en 2017, elle se considère comme le n° 1 en Europe et le n° 4 dans le monde. Mais vous ne la verrez jamais dans les rayons de votre supermarché : l’entreprise, qui dispose de deux sites de production chez nous (Nieuwkerke et Warneton), travaille à façon pour d’autres labels : des distributeurs, des restaurants, des chaînes de fast-food ou des groupes de restauration collective.

De la Budweiser belge !

En ce qui concerne la bière, celle-ci est plus que jamais une spécialité belge. Si le premier brasseur mondial AB InBev (Leffe, Stella Artois, Hoegaarden, Jupiler, etc.) est incontestablement brésilien d’un point de vue managérial, son actionnariat reste bien belgo-brésilien avec la présence des familles belges de Spoelberch, de Mévius et Van Damme. Le géant mondial a encore son siège à Louvain, où il va – pour l’anecdote – produire de la Bud (connue sous l’appellation Budweiser aux Etats-Unis) pour la commercialiser sur le marché français.

Notre pays compte énormément de brasseries encore 100% belges. Citons notamment Duvel Moortgat (Duvel, Vedett, Maredsous, etc.), Haacht (Primus, Tongerlo, etc.), Saint-Feuillien… sans oublier les très nombreuses microbrasseries qui fleurissent un peu partout. Enfin, la Belgique brasse six bières trappistes (Chimay, Rochefort, Orval, Westvleteren, Westmalle et Achel). Définitivement, les Belges restent les champions de la bière !

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