Chute de Tesla: “BYD pourrait devenir le premier constructeur mondial d’ici quatre ans”

Des voitures électriques BYD et d'autres marques destinées à l'exportation sont empilées au port de Taicang, à Suzhou, dans la province du Jiangsu, à l'est de la Chine, le 7 avril 2025. (Photo par AFP) / Chine OUT (Photo par STR/AFP via Getty Images)
Sebastien Marien Stagiair Data News 

L’action de BYD est sous-évaluée. L’entreprise automobile chinoise a livré 4,27 millions de voitures l’année dernière, contre 1,79 million pour Tesla. Tesla voit ses ventes chuter au cours des premiers mois de 2025, tandis que BYD connaît une croissance plus rapide que prévu par les analystes. Selon Patrick Casselman, analyste spécialisé dans le secteur automobile, BYD pourrait devenir le plus grand producteur automobile mondial dans les quatre prochaines années.  

BYD a connu un début d’année sur les chapeaux de roue. Au cours du premier trimestre 2025, le constructeur automobile chinois a vendu 58 % de voitures en plus par rapport à la même période l’année dernière, a annoncé l’entreprise mardi. Au total, BYD a livré 986 098 voitures aux clients au cours des trois premiers mois de l’année. Parmi elles, 416 388 étaient entièrement électriques et le reste étaient des hybrides.

Avec ces chiffres de vente, BYD surperforme largement son concurrent américain Tesla. Ce dernier a vu ses livraisons de nouvelles voitures chuter de 13 % au cours du dernier trimestre, à 336 681 unités, selon les chiffres publiés par le constructeur automobile mercredi dernier. Les analystes interrogés par Bloomberg s’attendaient en moyenne à plus de 390 000 véhicules livrés au premier trimestre.

Croix gammées


En Chine et en Europe, les chiffres sont les pires. La semaine dernière, la fédération automobile Febiac a annoncé que le nombre d’immatriculations de voitures Tesla avait chuté de 69 % en Belgique. En mars 2025, seulement 958 nouvelles Tesla ont été immatriculées, contre 3 121 l’année précédente. Il s’agit du résultat d’une baisse des ventes qui dure depuis janvier.

Tesla s’enfonce de plus en plus dans une spirale négative à cause des excès politiques de son PDG, Elon Musk. La marque subit non seulement des dommages d’image aux États-Unis, mais ces derniers mois, des showrooms aux Pays-Bas ont été tagués de croix gammées et des Tesla ont brûlé dans les rues de Berlin.

De plus, Tesla souffre de la concurrence croissante des marques chinoises et européennes, qui lancent des modèles électriques de plus en plus performants. Par ailleurs, Tesla tarde depuis plusieurs années à sortir un nouveau modèle sur le marché européen, comme l’indique Patrick Casselman, analyste chez BNP Paribas Fortis.

Le potentiel de BYD


Il est convaincu que les faibles performances de Tesla en Europe et en Chine jouent clairement en faveur de BYD. « En Europe, BYD n’en est qu’au début de son potentiel de croissance, et de nombreux marchés restent encore à conquérir. En Chine, le plus grand marché automobile du monde, l’entreprise est déjà leader. Seuls les États-Unis constituent encore un obstacle. »

Toyota reste aujourd’hui le plus grand constructeur automobile mondial, avec 10,8 millions de véhicules vendus en 2024. Volkswagen occupe la deuxième place avec 9 millions de livraisons. « Mais au rythme où BYD progresse, il pourrait devenir le premier constructeur mondial d’ici quatre ans », estime Patrick Casselman. « Même si sa présence sur le marché américain reste limitée. En résumé, BYD est sous-évalué. »

« La croissance de BYD en Europe n’en est qu’à ses balbutiements, tandis que Tesla perd des parts de marché. »

Patrick Casselman

BNP Paribas Fortis

Casselman n’est pas le seul analyste à reconnaître le potentiel considérable de BYD. Selon les prévisions de Bloomberg, l’entreprise connaîtra une forte croissance dans les années à venir. Le bénéfice par action ajusté (EPS) devrait passer de 13,84 dollars hongkongais à 18,01 dollars en 2025, puis à 25,38 dollars en 2027.

Casselman souligne également que le ratio cours/bénéfice attendu de 19,78 pour 2025 reste relativement bas, compte tenu de la forte croissance du constructeur automobile chinois. Pas moins de 35 des 40 analystes de Bloomberg qui suivent l’action recommandent l’achat. « La valorisation actuelle reste faible au regard de sa croissance supérieure, qu’il est en mesure de maintenir sur le long terme. La croissance de BYD en Europe n’en est qu’à ses balbutiements, tandis que Tesla perd des parts de marché », observe Casselman.

Malgré ces perspectives prometteuses, BYD reste encore très loin derrière Tesla en termes de valorisation boursière. Même après la forte chute de l’action Tesla, l’entreprise d’Elon Musk affiche une capitalisation de 766 milliards de dollars, contre seulement 118 milliards pour BYD.

Même si sa présence sur le marché américain reste limitée. En résumé, BYD est sous-évalué.

Patrick Casselman

analyste chez BNP Paribas Fortis

D’un fabricant de batteries à géant de l’automobile

BYD (Build Your Dreams) a été fondé en 1995 par le chimiste et entrepreneur chinois Wang Chuanfu, à l’origine comme producteur de batteries. Le succès a été immédiat : ses batteries étaient jusqu’à six fois moins chères que celles des fabricants japonais grâce à un procédé de fabrication reposant davantage sur le travail manuel, à l’opposé des lignes hautement automatisées au Japon.

Après son introduction en bourse en 2002, BYD rachète le constructeur automobile chinois Qinchuan et se lance dans l’industrie automobile. Il débute avec des modèles thermiques, mais il faudra attendre 2009 pour voir arriver ses premières voitures électriques. Depuis, l’entreprise mise sur des atouts technologiques majeurs : autonomie élevée, recharge rapide et innovations continues.

Parmi les derniers modèles, la BYD Seagull, une citadine électrique à hayon vendue environ 9.000 euros en Chine, devrait débarquer cette année en Europe. Le groupe a également mis au point un tout nouveau système de batteries et de bornes permettant une recharge quasi instantanée — cinq minutes seulement, soit autant qu’un plein d’essence — pour une autonomie de 470 km. BYD développe aussi ses propres technologies de conduite autonome, concurrentes du célèbre Autopilot de Tesla.

Une “ville automobile” presque aussi grande que Bruges

BYD poursuit sans relâche son expansion à l’international. L’an dernier, le constructeur chinois a vu ses ventes à l’étranger bondir de 72 % par rapport à l’année précédente, porté par un excellent rapport qualité-prix et une offre plus large que celle de son grand rival Tesla, encore largement axé sur les segments premium.

L’entreprise de Shenzhen dispose aussi d’un atout de taille : sa capacité de production. Grâce à ses neuf usines en Chine, BYD peut fabriquer jusqu’à 5,8 millions de véhicules par an. Et ce n’est pas tout : à Zhengzhou, le groupe développe un projet titanesque — une véritable « ville automobile » sur 129 kilomètres carrés, soit presque la superficie de la ville de Bruges. Ce méga-complexe réunira à la fois la production de véhicules, de batteries, de semi-conducteurs et d’autres composants clés. Une manière pour BYD de renforcer encore son autonomie technologique… et sa domination industrielle.

Tesla a déjà dû réduire ses marges à plusieurs reprises. Je m’attends à ce que BYD affiche une marge bénéficiaire supérieure cette année.

Patrick Casselman

analyste chez BNP Paribas Fortis

BYD vise la production locale en Europe, avec une usine en Hongrie

Une voiture BYD dans un showroom de Varsovie. (Photo by Jakub Porzycki/NurPhoto via Getty Images)

La marque chinoise ambitionne de produire des véhicules pour le marché européen dans une nouvelle usine en Hongrie. Cette volonté d’implantation locale lui a permis d’obtenir, parmi les constructeurs chinois, le tarif douanier le plus bas auprès de l’Union européenne. Un avantage compétitif important, selon Patrick Casselman.

Vers plus de rentabilité ?

Tesla conserve toutefois un avantage notable sur son rival chinois : sa rentabilité nette reste plus élevée. En 2024, BYD a enregistré un bénéfice net de 5,55 milliards de dollars, en hausse d’un tiers et au-dessus des attentes des analystes. Tesla, de son côté, a engrangé un bénéfice net de plus de 7 milliards de dollars, en recul de 53 % par rapport à 2023.

Casselman estime néanmoins que BYD pourrait dépasser Tesla cette année en matière de rentabilité. « Tesla a dû revoir à la baisse sa marge bénéficiaire à plusieurs reprises. Elle est passée de 15 % il y a quelques années à moins de 10 % aujourd’hui. Elle se rapproche ainsi des 6 % de BYD. Je m’attends à ce que BYD affiche une meilleure marge que Tesla en 2025 », conclut l’analyste.

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