Ce que les résultats trimestriels des entreprises nous disent sur la santé de l’économie

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De plus en plus d’entreprises cotées ont publié leurs résultats trimestriels. Un mois après la fin du trimestre, quelles sont les observations, mais aussi les enseignements pour les trimestres à venir ? Éléments de réponse avec deux experts.

AB Inbev, Solvay, ING… De nombreuses entreprises publient leurs résultats trimestriels en ce moment. 15% des entreprises de l’indice Euro Stoxx 600 ont déjà annoncé leurs chiffres, contre environ la moitié pour le S&P 500. Un mois après la clôture du deuxième trimestre, des premières observations peuvent déjà être faites.

“Il y a un repli, par rapport à la même période il y a un an, pour les bénéfices par action et les chiffres d’affaires. C’est une dynamique plus faible”, nous explique Alexandre Baradez, analyste en chef pour la société de courtage IG France.

Il constate surtout une chute du côté des entreprises qui ont fait de belles performances l’année dernière, comme l’énergie (encore plus aux États-Unis qu’en Europe), la santé et les matériaux de constructions. Les chiffres et l’activité étaient alors en forte hausse, mais aujourd’hui la situation revient à la normale. Sinon, les secteurs de la consommation, des finances et l’industrie (mais pas toutes les industries), tiennent bon pour l’instant. “Il y a une résilience des résultats”, note-t-il encore, ajoutant que le panneau global est moins homogène que lors de la relance post-covid, par exemple.

Arne Maes, économiste pour la banque BNP Paribas Fortis, voit aussi une image “mixte” en observant les chiffres des résultats. Il sent qu’il y a un impact de la part des hausses des taux d’intérêt, qui sont maintenant à un niveau plus observé depuis longtemps (pour la Fed) ou jamais observé (pour la BCE). Un élément qui le surprend : “La tech américaine souffre moins que les autres entreprises ou le marché européen. Les résultats restent bons, en général. Cela pourrait être dû à la rationalisation du nombre d’employés, ou le premier signe d’un impact positif de l’IA.”

Piste pour les trimestres à venir ?

“Le ralentissement commence à se matérialiser dans ces résultats”, continue Arne Maes. “Nous le prévoyons depuis un bout de temps. L’Europe l’a échappé de peu, mais il pourrait finalement arriver dès le prochain trimestre.” Il s’attend ainsi à une légère chute du PIB de la zone euro lors du prochain trimestre ou du dernier de l’année. Il prévoit un redémarrage très lent par après. Pour les Etats-Unis, il s’attend à une récession (trois trimestres de contraction), mais pas très forte non plus. “Il n’y a pas de hausse du chômage et l’inflation baisse, c’est un bon signe qu’un atterrissage en douceur est possible”, en déduit-il.

Pour Alexandre Baradez, les secteurs cités qui tiennent encore bon aujourd’hui seront mis sous pression vers la fin de l’année. “La consommation va s’essouffler, et pour les financières, les crédits se tassent déjà. Le message lors du quatrième trimestre ne sera pas le même que lors du deuxième trimestre.”

Plus généralement, il s’attend à une période plutôt ennuyeuse, concernant la croissance du PIB lors des prochains trimestres. C’est-à-dire peut-être une récession, mais pas forte, ou peut-être de la croissance, mais pas forte non plus. La raison : en Chine, la relance botte en touche. Sans véritable plan de relance de la part de Pékin, l’économie devrait se stabiliser sur le reste de l’année, sans s’envoler. Ce qui pèse sur l’Europe, qui exporte vers la Chine. Mais ce qui n’est pas forcément négatif, au final : “Après un rallye qui a commencé à la fin de l’année dernière et qui a duré jusqu’à il y a peu, le marché européen est dans une phase de consolidation, plutôt saine”, souligne l’expert.

Il ajoute que l’effet du resserrement des politiques monétaires doit encore se faire sentir, en Europe comme aux États-Unis. L’économie de l’Oncle Sam résiste, pour l’instant, encore mieux que l’Europe ou la Chine, mais pour les mois à venir elle serait le “grand point d’interrogation” et il faudrait rester prudent – un ralentissement serait possible en fin d’année.

“Guidance”

Dans leurs résultats, les entreprises ajoutent aussi leurs perspectives pour les mois à venir, appelées “guidances” en anglais. Là, quels sont observations et les enseignements ?

Alexandre Baradez en a retenu plusieurs. Un “messge fort” de la part de Taiwan Semiconductor Manufacturing Company (TSMC), le numéro 1 des puces électroniques dans le monde : après deux années folles, d’explosion de la demande, de confinements et soucis de chaines d’approvisionnement dans le monde, le groupe revoit tout à la baisse, ou plutôt une “normalisation du secteur”. Autre guidance : celle de LVMH, qui n’a pas donné de chiffre. Plus par prudence que par inquiétude, selon l’expert, mais le cours de l’action a quand même fortement chuté. “Sinon, la pharma rabaisse aussi ses perspectives”, continue-t-il, notant également moins d’homogénéité dans les perspectives qu’auparavant.

Pour Arne Maes, les entreprises prennent en compte les scénarios de ralentissement ou de récession. “En général, on peut constater que les guidances sont peut-être plus négatives qu’il y a quelques mois.” Elles sont un peu tiraillées entre l’optimisme de l’IA et le pessimisme des tensions géopolitiques, ajoute-t-il.

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