Carte blanche

Pensions: au pied du mur, agir enfin

A force d’attendre, on risque de devoir faire payer toutes les catégories de la population.

Le coût du vieillissement de la population est une bombe à retardement. Cet été, le Comité d’étude chargé d’en évaluer l’ampleur soulignait encore l’immensité de la tâche: les dépenses sociales liées au vieillissement (pensions et soins de santé) pourraient grimper de 24,5% du produit intérieur brut (PIB) en 2019 à 29,7% en 2049. En chiffres absolus, on parle d’un surcoût de 27 milliards d’euros.

La “douloureuse” n’estpas pour demain: les dépenses se chiffrent déjà en milliards ces prochaines années. Le mur annoncé depuis des décennies est là, devant nous. Pourtant, une véritable réforme des pensions se fait toujours attendre, par-delà l’annonce symboliquement forte mais insuffisante d’un relèvement de l’âge de départ à 67 ans sous le gouvernement Michel. Le monde politique est atteint depuis 30 ans d’une procrastination coupable en raison de l’impopularité des mesures à prendre et de la complexité d’un système élaboré au fil du temps, accordant bien des privilèges, singulièrement dans la fonction publique. La réponse décisive est pourtant connue: il faut augmenter drastiquement le taux d’emploi des 55-65 ans.

Pensions: au pied du mur, agir enfin

Cette fois, la Belgique est au pied du mur. La Commission européenne impose à notre pays de finaliser une épure qui tienne la route d’ici la mi-janvier. Faute de quoi, les moyens octroyés dans le cadre du plan de relance pourraient être suspendus. La ministre des Pensions, Karine Lalieux (PS), avait bien amorcé une réforme avec, notamment, la création d’un “bonus pension” pour encourager le maintien à l’emploi, mais sans compenser cette nouvelle dépense. Résultat: un coût supplémentaire estimé par le Bureau du plan à 0,3% du PIB à terme. Or, la Belgique fait déjà figure de mauvais élève budgétaire européen. Tout cela est intenable.

Voilà pourquoi le Premier ministre, Alexander De Croo (Open Vld), a déposé une note pour proposer des pistes visant à forcer la main d’un PS décidément bien frileux sur la question. Une intervention bienvenue, après que le président socialiste Paul Magnette a dénoncé “le chantage de l’Europe”. Il ne peut y avoir de tabou sur la question, certainement pas en ce qui concerne les différents régimes spéciaux des fonctionnaires, qui s’apparentent trop souvent à un effet d’aubaine démesuré, à un acquis ne tenant pas compte d’une société qui évolue, ô combien.

Il ne peut y avoir de tabou sur la question, certainement pas en ce qui concerne les différents régimes spéciaux des fonctionnaires.

Le maître mot de cette réforme doit rester la préservation d’un système viable pour les générations futures. A force d’attendre, on risque de devoir faire payer toutes les catégories de la population. La condition sine qua non, c’est de veiller, en simplifiant le système, à ne pas pénaliser les rouages qui encouragent l’initiative privée, notamment au niveau du second pilier. C’est aussi ce qui doit constituer, par ailleurs, le moteur de la réforme fiscale en gestation: encourager ceux qui travaillent et financent la sécurité sociale. C’est, de façon plus large, ce qui doit constituer les fondations d’un nouveau pacte économique et social, vital pour l’avenir.

“On ne peut pas avoir une génération qui confisque le système de sécurité sociale comme on l’a fait jusqu’ici ici, confiait fin 2021 à Trends-Tendances Jean Hindriks (UCLouvain), un des plus fins connaisseurs de notre système de pensions. Le système de sécurité sociale a absorbé 15 milliards pendant cette crise du covid. Et l’on s’attend à ce que les dépenses de pensions augmentent encore de 10 milliards sur les cinq prochaines années. On est là devant des montants considérables!”

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