Energie: abaisser la TVA à 6%, une fausse bonne idée ?

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Pour faire face à l’envolée des prix de l’énergie, le ministre des Finances Vincent Van Peteghem (CD&V) veut proposer une réduction temporaire de la TVA sur le gaz et l’électricité. Une idée qui n’a pas que des partisans.

Les prix de l’énergie n’en finissent plus de flamber, le prix du gaz a ainsi triplé en une année et celui de l’électricité a doublé ce qui réserve des factures d’acompte et de régularisation salées pour les consommateurs. De plus en plus de ménages n’arrivent plus à honorer leurs factures et doivent se tourner vers le CPAS de leur commune. Les coûts exorbitants de l’énergie deviennent aussi de plus en plus difficiles à supporter pour la classe moyenne.

Face à cette situation, le ministre des Finances Vincent Van Peteghem (CD&V) voudrait proposer au gouvernement fédéral, parmi d’autres pistes, une réduction temporaire de la TVA sur l’électricité et le gaz, en la faisant passer de 21 à 6%, a-t-il annoncé ce mercredi soir u micro de la VRT.

Un abaissement temporaire de 21 à 6% de la TVA, est la mesure “la plus rapide et avec un impact considérable sur la facture des citoyens”, selon lui. Vincent Van Peteghem avait pourtant écarté la piste d’une TVA rabaissée sur l’électricité en septembre dernier, alors que le PTB a indiqué qu’il déposerait un amendement en ce sens jeudi à la Chambre.

Une TVA rabaissée sur le gaz et l’électricité a déjà été décidée par le passé (pour l’électricité) sous le gouvernement Di Rupo (2011-2014). Cette mesure qui permet de soulager sur une période déterminée de nombreuses familles qui n’ont pas les moyens d’honorer leurs factures d’énergie, ne convainc cependant pas tous les partis de la Vivaldi.

Une des raisons est qu’elle n’est pas ciblée sur les ménages en difficulté. En étant généralisée à toute la population, elle profite aussi à ceux qui n’en ont pas réellement besoin. Une baisse de la TVA sur le gaz est aussi discriminatoire pour les ménages qui utilisent un autre mode de chauffage.

Un de ses effets secondaires fait aussi débat: l’impact d’une baisse pérenne de la facture sur l’indexation des salaires, qui en serait retardée, vu que le gaz et l’électricité sont repris dans l’indice santé. “Ce n’est donc pas une mesure pro-consommateurs, mais une mesure pro-employeurs“, déclarait dernièrement l’économiste Etienne de Callataÿ dans le journal économique L’Echo.

Chaque fois que la question d’une baisse de la TVA sur l’électricité refait surface, la question du coût d’une telle mesure est mise en avant. “Ça coûte cher, de l’ordre de 770 millions d’euros par an“, avait même affirmé à la mi-septembre le ministre Van Peteghem, alors encore contre cette solution.

200 euros par ménage

Le président du PS Paul Magnette s’est exprimé à ce sujet ce jeudi matin sur les ondes de RTL et y va aussi de sa proposition. Les prix de l’énergie “ne sont pas supportables” selon lui. On voit tomber les factures de régularisation et pour beaucoup de gens, ce sont des augmentations qu’ils ne peuvent pas payer. Le gouvernement ne peut pas être sourd face à cette situation.

“Aujourd’hui, on voit que ça n’est pas suffisant. Il faut aider aussi les travailleurs. Il faut aller plus loin et aider aussi les personnes qui ont des revenus moyens”, souligne Paul Magnette.

Le président du PS demande une intervention rapide de l’Etat. Cela peut être une baisse de la TVA de 21 à 6%. Je suis très heureux d’ailleurs d’entendre que le ministre des Finances, qui n’était pas pour, serait prêt à prendre cette mesure. L’avantage c’est que c’est simple et rapide. L’inconvénient, c’est que ce sont les plus riches qui en profitent le plus puisque c’est eux qui consomment le plus d’électricité.

“Le gouvernement ne peut pas être sourd face à cette situation”

Paul Magnette, président du PS

Selon lui, une des solutions serait de distribuer un chèque de 200 euros pour soutenir tous les revenus moyens (salaire médian de 3500 euros bruts par personne). “On le donnerait à à peu près tout le monde mais pas aux 10 ou 20% les plus riches de la population. Toutes les personnes qui ont des revenus moyens devraient pouvoir recevoir un chèque de 200 euros à l’ensemble des ménages. Car l’augmentation des prix de l’énergie est plus élevée que ce qu’on avait prévu au mois d’octobre dernier. Le plus simple est que ce chèque soit déduit directement sur la facture.

Les modalités de cette mesure doivent encore être discutées en kern (comité ministériel restreint).

Philippe Defeyt, économiste à l’Institut pour un développement durable (IDD), plaidait récemment dans La Libre plutôt en faveur de l’octroi de chèques énergie pour la moitié des ménages. Une mesure moins onéreuse pour l’État.

Des factures d’acompte quadruplées

En Belgique, la plupart des ménages bénéficient de contrats fixes. Ils sont protégés d’une hausse de leur facture d’énergie s’ils ont signé avant l’envolée des prix. Mais une fois ce contrat arrivé à échéance, ils devront, eux aussi, faire face aux prix fortement élévés. Mi-septembre, sur dix-huit mois, les fournisseurs d’énergie ont déjà traité près d’1 million de dossiers de reports de paiement ou de plans d’étalement. De quoi faire craindre une crise systémique, avertit L’Echo.

Par ailleurs, de plus en plus de fournisseurs d’énergie augmentent les factures d’acompte mensuelles. Certains acomptes ont parfois été quadruplé pour certains ménages. Les fournisseurs se justifient en avançant le fait que des acomptes plus élevés sont plus réalistes par rapport aux coûts actuels de l’énergie et permettent d’éviter une facture de régularisation très salée en fin d’année. Il est toujours possible pour le consommateur de faire des simulations en ligne et de renégocier ces acomptes à la baisse s’il le juge trop élevé par rapport à sa consommation, ou de demander des échelonnements de paiement en cas de difficulté à les payer.

Les mesures actuelles

En octobre dernier, le gouvernement fédéral s’était déjà mis d’accord sur une série de mesures pour faire face à la hausse des prix de l’énergie. Il a par exemple été décidé de prolonger l’attribution du tarif social gaz/électricité pour un public plus large (incluant exceptionnellement tous les bénéficiaires d’intervention majorée) au-delà de la fin 2021, jusque fin mars 2022, ce qui concerne environ un million de ménages.

Une prime de 80 euros est ajoutée pour les bénéficiaires du tarif social. Depuis ce mois de janvier, les prélèvements fédéraux sur les factures d’énergie sont par ailleurs transformés en accises, qui ont été gelées. L’avantage de ces accises est de permettre une intervention du fédéral plus flexible sur les factures, qui permettra aussi d’agir à plus long terme.

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