Le succès grandissant du vélo de société

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Robert Van Apeldoorn
Robert Van Apeldoorn Journaliste Trends-Tendances

Les plans cafétéria propulsent les leasings de vélos. En particulier de vélos électriques, dont le “speed pedelec” qui peut atteindre 45 km/h.

Il y avait la voiture de société, voici maintenant le vélo de société. Plusieurs entreprises de leasing, comme ADL, Alphabet et KBC Autolease, ont ajouté les vélos, surtout électriques, à leur offre de leasing. Non sans succès. “Nous avons démarré il y a quatre ans et le parc compte désormais 18.000 vélos”, annonce Stefan Delaet, CEO de KBC Autolease et président de Renta, l’association des loueurs de voitures. KBC Autolease loue 9.000 vélos par an, contre 12.000 à 13.000 voitures.

Avec son service KBC Velolease, la filiale du groupe KBC, que soutient un cadre fiscal favorable (lire l’encadré “Fiscalement avantageux”), est devenue un acteur de poids sur ce marché. Elle s’est d’abord développée dans le nord du pays mais Bruxelles et la Wallonie sont demandeuses, elles aussi, notamment via les

filiales bancaires KBC Brussels et CBC. L’infrastructure de ces deux Régions est pourtant moins adaptée: alors que la Flandre compte des autoroutes pour vélos, la Wallonie n’en a pas (encore), hormis les Ravel, inaccessibles aux speed pedelec. “Nous recevons beaucoup de demandes de Wallonie ces derniers temps”, confirme Stefan Delaet.

Quelque 50.000 vélos en leasing

La crise sanitaire dope le marché du vélo d’entreprise mais la demande existait bien avant. Il est difficile de se faire une idée du marché global: contrairement à ce qui se passe dans le segment automobile, il n’existe pas encore de comptage précis car tous les vélos ne sont pas immatriculés. Seuls les speed pedelec, dont la vitesse peut atteindre 45 km/h, le sont. Sur les neuf premiers mois de 2020, 9.636 machines de ce type ont été immatriculées. Elles permettent de parcourir des distances plus longues que le vélo traditionnel sans trop de fatigue. Le parc total des vélos en leasing est évalué à 50.000 unités.

Nos offres intègrent une sorte d’apprentissage.”

Stefan Delaet (KBC Autolease)

“Je connais même des Anversois qui vont travailler tous les jours à Bruxelles en speed pedelec, témoigne Guy Crab, secrétaire général du secteur vélo au sein de la fédération Traxio. Ça ne fait que 30 ou 35 km. Il est possible de parcourir la distance en moins d’une heure. En voiture, on met parfois plus de temps à cause des embouteillages.”

La clientèle est très variée. Elle compte des PME, des administrations, des grandes entreprises qui, à l’instar du groupe KBC, considèrent parfois le leasing vélo comme une composante à part entière de leur stratégie de développement durable. Loueurs et secrétariats sociaux font la promotion du vélo d’entreprise, arguments extra-fiscaux à l’appui. “Le pourcentage d’absentéisme chez les usagers de deux-roues est inférieur à celui observé chez les automobilistes”, constate Jean-Luc Vannieuwenhuyse, juriste chez SD Worx.

Le succès grandissant du vélo de société
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“Ils en sont fans”

Initialement, les loueurs misaient sur un aménagement des budgets du leasing automobile qui consistait, pour le salarié, à pouvoir bénéficier d’un vélo en échange du choix d’une voiture plus petite, pour ne pas dépasser le plafond des mensualités. “Nous avions créé un programme appelé ‘6 roues, auto + vélo’ mais il n’a pas du tout pris”, admet Stefan Delaet. D’autres canaux ont permis de développer le leasing, qui reste une approche attractive pour l’utilisateur puisqu’il inclut la maintenance et l’assurance, y compris contre le vol, tout en demeurant déductible pour l’entreprise. Mais c’est davantage à travers des plans de rémunération flexible que le sujet est revenu sur le tapis. Le vélo est souvent choisi en plus de la voiture. “Ceci dit, quand les salariés optent pour le vélo, ils en deviennent fans”, se réjouit le CEO de KBC Autolease. Les budgets sont de 3.000 euros, voire plus, en moyenne. Le principe est globalement identique à celui du leasing voiture ; il inclut la maintenance, l’assurance, une assistance. Les contrats portent généralement sur trois ans.

Bien qu’elle ait fait le lit du télétravail, la crise sanitaire a plutôt dopé les contrats. ” Sans doute les gens se disent-ils qu’il est bon de bouger un peu, poursuit Stefan Delaet. Il y a probablement aussi un aspect sanitaire, qui incite à préférer le vélo aux transports en commun. Le résultat, c’est que les stocks sont épuisés, il faut des mois pour obtenir des speed pedelecs.”

Des loueurs 100% vélo

Le marché a attiré des entreprises de leasing exclusivement dédiées au vélo, comme B2Bike. “La croissance du vélo en Belgique attire des acteurs étrangers”, note Guy Crab. Comme le néerlandais Lease A Bike (groupe Pon) ou encore Swapfiets. Elle suscite l’émergence de start-up comme Kameo, ce spécialiste basé à Liège qui fournit notamment la Ville de Bruxelles, AGC ou la chocolaterie Galler. Sa flotte ne dépasse pas pour l’heure la centaine de machines mais Julien Jamar, le cofondateur de Kameoil, espère qu’elle croîtra rapidement: “Le marché est très concurrentiel mais la demande est intense, tout le monde peut donc s’y faire une place”, constate-t-il.

Les entreprises de leasing automobile s’y intéressent d’ailleurs beaucoup. Elles sous-traitent souvent l’activité à un acteur pure player, comme B2Bike, qui collabore avec Alphabet ou VW D’Ieteren Finance, par exemple, pour gérer le matériel. “Pour garantir une expérience de qualité, nous avons choisi de gérer intégralement ce full-service bike leasing“, précise Stefan Delaet. KBC Autolease sélectionne les marques qu’elle propose: elles doivent être belges si possible, toutes catégories confondues, et de préférence aptes aux trajets domicile-travail. Elle identifie les détaillants chez qui les utilisateurs pourront aller choisir et faire entretenir leur vélo, partout en Belgique. Pour l’assistance sur la route, elle s’adresse à VAB.

Avec une valeur comptable d’au moins 16% en fin de contrat, la valeur de revente d’un vélo joue un rôle important dans la rentabilité du leasing.

Valeur résiduelle

La question qui reste à résoudre est celle du sort des vélos en fin de contrat. “Il n’y a pas de marché très organisé pour la seconde main, constate Guy Crab. La valeur résiduelle diminue plus vite que dans le cas d’une voiture car un vélo peut s’user plus rapidement.” Le marché étant très récent, la question est encore toute théorique. Les contrats qui arrivent à expiration sont encore rares. “Pour le moment, les vélos sont souvent rachetés par leurs utilisateurs”, ajoute Stefan Delaet pour qui, à terme, un marché de seconde main devrait pouvoir se structurer. “A moyen terme, les utilisateurs ne rachèteront plus les vélos en fin de contrat. Je pense en revanche que les acteurs qui rachètent les voitures pourraient s’y intéresser également.”

Le succès grandissant du vélo de société
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Les loueurs revendent en général les voitures dont le contrat est arrivé à expiration à des marchands, belges et étrangers, qui participent à des enchères électroniques. “En attendant que le marché se structure, KBC cherche des solutions de revente pure et simple. Nous avons quelques projets en cours dans l’économie sociale, par exemple pour fournir un moyen de déplacement à des personnes sans emploi qui ne sont pas motorisées et qui doivent se rendre à des entretiens d’embauche ou suivre un stage.” La valeur de revente joue un rôle important dans la rentabilité du contrat. “Un vélo en bon état a en principe une valeur comptable d’au moins 16% en fin de contrat, soit 300 à 500 euros ; ce n’est pas négligeable”, observe Julien Jamar.

Moins de vols mais plus d’accidents

Le bilan des premières années est assez positif. “Nous avions craint un certain volume de vols mais le risque n’est pas aussi élevé que nous le pensions, résume Stefan Delaet. En revanche, les accidents de speed pedelec sont nombreux”. Le spécialiste voit là une problématique identique à celle que posent les voitures électriques, dont l’accélération est brutale. “Il faut améliorer la maîtrise des véhicules lors de la prise en main. Nos offres intègrent une sorte d’apprentissage”, conclut-il.

La vague du leasing vélo change un peu les choses pour Renta, qui représente le secteur du leasing auto. “Nous sommes en train de nous organiser pour établir une statistique du nombre de vélos loués”, annonce Frank Van Gool, son secrétaire général. L’association aimerait pouvoir compter parmi ses membres des loueurs de vélos pure players. La tendance pourrait aussi changer l’image des loueurs. Ainsi, l’appellation KBC “Autolease” pourrait-elle perdre de sa pertinence…

Fiscalement avantageux

Le cadre fiscal est de plus en plus favorable au vélo de société. Si elle est utilisée pour les déplacements domicile-travail, la machine est intégralement déductible pour l’entreprise. Il en va de même des frais d’entretien, du leasing et des accessoires (casque, cadenas, veste de sécurité). La somme est exonérée de cotisations de sécurité sociale et d’impôts depuis 2017.

Les sociétés disposent de plusieurs manières d’organiser leur plan vélo. Elles peuvent aider à financer l’achat des machines en attribuant aux utilisateurs une indemnité de 0,24 euro par kilomètre, déductible pour elle, exonérée pour les salariés (impôts et cotisations sociales). Elles peuvent éventuellement proposer de capitaliser ces indemnités pour financer, en totalité ou en partie, l’acquisition des vélos.

L’intégration du vélo dans les plans cafétéria des entreprises remporte un vif succès. Le plan cafétéria est une forme de rémunération flexible qui consiste à convertir une partie du salaire brut en services (vélo, voiture, jours de congé, etc.), d’une manière financièrement avantageuse pour le salarié. Le secrétariat social SD Worx propose ce type de plan. D’après les résultats de l’enquête qu’il réalise chaque année auprès de 2.500 salariés, le vélo a figuré, pour la première fois en 2019, dans le top 10 des avantages souhaités à travers un plan de rémunération flexible.

Avec ou sans plaque?

Les vélos à assistance électrique se répartissent en trois catégories:

  • Les vélos électriques. Leur motorisation ne dépasse pas 25 km/h et leur puissance, 250 W. Ils sont assimilés à des vélos “musculaires”. Sans permis.
  • Les vélos motorisés. Plafonnés à 25 km/h eux aussi. Plus puissant (1.000 W au maximum), leur moteur peut les entraîner sans pédalage. Le code de la route considère qu’il s’agit de vélos. Sans permis.
  • Les speed pedelecs. Leur moteur, qui peut aller jusqu’à 4.000 W, leur permet d’atteindre 45 km/h. Casque et immatriculation obligatoires. Ils sont considérés comme des vélomoteurs (permis de conduire AM ou B).

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