La troisième guerre mondiale devra attendre le vote des pensionnés de l’Iowa

Amid Faljaoui Rédacteur en chef de Trends-Tendances

Il n’aura fallu que cinq jours, week-end inclus, à Wall Street pour établir de nouveaux records après le raid américain qui a permis d’éliminer le général iranien Qassem Soleimani. Le cours du baril de Brent a même rechuté sous son niveau d’avant le raid. Loin de décontenancer les marchés, ces derniers sont vite passés en mode serein. Paradoxe ?

A tort ou à raison, les investisseurs estiment que nous assistons davantage à des coups de menton entre Washington et Téhéran plutôt qu’aux prémices d’un véritable conflit armé. Est-ce pour autant qu’il n’y a aucun risque ? Certainement pas. Un dérapage est toujours à craindre, comme l’a malheureusement montré l’exemple de l’avion de ligne ukrainien abattu par erreur par l’Iran.

Les marchés se montrent-ils trop complaisants par rapport à la situation au Moyen-Orient ? A priori, oui, surtout si l’on considère les commentateurs qui ont comparé (trop rapidement ? ) l’assassinat de Soleimani à celui de l’archiduc François- Ferdinand d’Autriche, acte déclencheur de la Première Guerre mondiale. Instinctivement, le citoyen rivé à sa télévision s’attendait à une chute des marchés financiers. Historiquement, les prémices d’une guerre pèsent effectivement sur la tendance mais, fort heureusement, la tendance à la baisse ne dure pas. La preuve ? La société LPL Financial a déterminé que depuis l’attaque de Pearl Harbor, les marchés d’actions américains ont mis en moyenne à peine 25 jours (par rapport au point le plus bas) pour récupérer les pertes consécutives aux guerres, attentats et crises géopolitiques.

Donald Trump sait qu’il ne gagnera pas les présidentielles en se présentant devant les électeurs avec un krach à son actif.

Voilà pour la tendance lourde, mais comment expliquer aujourd’hui ce calme des Bourses alors que les commentateurs parlaient d’un début de troisième guerre mondiale ? Les explications ne manquent pas. Pour le calme pétrolier, il faut porter son regard du côté de la Chine. En effet, l’un des rares pays amis de l’Iran ne supporterait pas que le détroit d’Ormuz soit bloqué par les forces navales iraniennes, car 50% des importations chinoises de pétrole proviennent de cette région. Ensuite, si les investisseurs peuvent légitimement paniquer sur le coup de la surprise, ils ont aussi tendance depuis quelques années à se ressaisir assez vite. Motif ? Ils savent que les banques centrales sont là pour veiller au grain et qu’elles ne laisseront pas un effondrement boursier mondial se produire sans intervenir. Plus prosaïquement, les banquiers centraux jouent le rôle de saints protecteurs de la Bourse. Et puis, ce qui a aussi rassuré les investisseurs, c’est la riposte iranienne. On sait que les autorités iraniennes ont bien pris soin d’indiquer indirectement aux Américains les cibles de leur riposte pour éviter des morts et une spirale infernale.

Mais ce n’est pas tout, il y a aussi la réponse mesurée de Donald Trump à cette riposte. Le ton sobre du président des Etats-Unis a laissé croire aux investisseurs qu’il n’avait pas envie d’embrigader son pays dans une énième guerre au Moyen-Orient. Bref, chacun des protagonistes de cette mauvaise pièce de théâtre a pu sauver la face. Les élections présidentielles américaines auront lieu le 3 novembre prochain et Donald Trump sait qu’il ne les gagnera pas en se présentant devant les électeurs avec un krach à son actif. Ne l’oublions pas : la pension des Américains ne dépend pas de l’Etat mais est investie en Bourse. L’éventuelle guerre au Moyen-Orient attendra que le pensionné de l’Iowa vote d’abord républicain.

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