Proximus reconnaît un abus de position dominante et lâche 120 millions à ses concurrents

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Le bras de fer judiciaire engagé avec Base et Mobistar au début des années 2000 se conclut à l’amiable. L’opérateur historique s’en sort bien.

La procédure judiciaire n’ira pas jusqu’au bout. Les trois opérateurs mobiles Proximus, Mobistar et Base viennent de l’annoncer dans un communiqué commun. L’accord transactionnel ” met un terme à tous les litiges existants entre Proximus et respectivement BASE Company et Mobistar liés à l’application, dans le passé, de tarifs de services de télécommunications mobiles différents pour les communications vocales on-net1 et off-net2. ” Derrière ce charabia se cache une affaire de gros sous et de concurrence acharnée.

Pour comprendre le fond de l’histoire, il faut se replacer aux prémices du mobile, fin des années 1990, début des années 2000. Après la création de Proximus, marque mobile de Belgacom, en 1994, un deuxième opérateur (Mobistar) fait son apparition en 1996, suivi d’Orange (futur Base) en 1999. Proximus, qui s’est lancé plus tôt et qui profite de sa position monopolistique sur la téléphonie fixe pour attaquer le marché mobile, est un adversaire coriace pour ses challengers.

Des appels plus chers d’un réseau à un autre

Base et Mobistar ne tardent pas à se plaindre des pratiques de Proximus, qu’ils accusent d’abuser de sa position dominante sur le marché. A cette époque, tous les consommateurs le savent, appeler un GSM d’un réseau à un autre coûte plus cher que sur le même réseau. Pourquoi ? Tout simplement parce que, lors d’un appel passé d’un réseau à un autre, les opérateurs se facturent entre eux ce que l’on appelle des frais de terminaison. Ces frais sont ensuite répercutés sur la facture du client, ce qui fait grimper sa note GSM. Ils seront progressivement plafonnés puis supprimés par l’IBPT, le régulateur des télécoms. Mais entretemps, ils freinent la concurrence.

Alors qu’ils tentent de se déployer en Belgique, Base et Mobistar reprochent donc à Proximus de pratiquer des frais de terminaison beaucoup trop élevés, mais aussi de pratiquer des tarifs au rabais pour ses clients qui appellent au sein du réseau Proximus. Difficile de convaincre un client de changer d’opérateur dans ces conditions. Le consommateur fait son calcul : il sait qu’en allant chez un concurrent, il continuera à passer un nombre important d’appels (plus chers) vers Proximus, vu que son répertoire est composé majoritairement de clients de l’opérateur dominant.

De 1,8 milliard à 120 millions

Un recours est donc introduit par Base devant le tribunal de commerce de Bruxelles, concernant la période 1999-2004. Mobistar rejoint ensuite la procédure. Après plusieurs péripéties, le dossier atterrit devant la Cour d’appel, qui rend un arrêt en février 2015. La fixation des dommages est prévue pour 2016, mais les parties préfèrent régler le litige à l’amiable. C’est l’accord annoncé aujourd’hui.

Même si ce n’est pas écrit textuellement dans le communiqué commun des trois opérateurs, Proximus reconnaît un abus de position dominante sur le marché mobile au début des années 2000. L’opérateur verse 66 millions d’euros à Base et 54 millions à Mobistar.

Proximus s’en sort finalement bien. Au cours de la procédure, des experts avaient en effet évalué le montant du dommage à 1,8 milliard d’euros. En février dernier, lors de l’annonce de l’arrêt de la Cour d’appel qui semblait valider les expertises en question, le cours de Bourse de Proximus avait fortement chuté, provoquant une perte de 640 millions d’euros de valorisation boursière. Aujourd’hui, à l’annonce de la transaction, le cours était plutôt en légère hausse. Les avocats de Proximus ont semble-t-il bien travaillé.

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