49% des entreprises wallonnes ne survivront pas à un reconfinement sans aides publiques massives

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Le second confinement s’annonce plus dramatique encore que le premier. Sans aides publiques massives, 49% des entreprises wallonnes n’y survivront pas.

Jamais, en 37 éditions, le point conjoncturel de l’Union wallonne des entreprises n’avait étalé des indicateurs aussi inquiétants. Sur les six derniers mois, l’activité des entreprises wallonnes a diminué en moyenne de 25%. Et plus l’entreprise est petite, plus la chute est spectaculaire : le chiffre d’affaires recule de 43% chez les indépendants et de 30% dans les sociétés de moins de dix personnes… Sachant que le tissu économique du sud du pays est composé à 97% d’entreprises de moins de 50 personnes, on comprend l’ampleur de la crise. “ La Wallonie présente un profil particulièrement vulnérable en raison de sa structure entrepreneuriale“, résume Pierre Elias, économiste à l’UWE. Un découpage sectoriel montre, comme on pouvait s’y attendre, un effondrement particulièrement prononcé dans l’horeca, l’événementiel ou la culture, mais aussi l’aéronautique.

La combinaison des crises sanitaire et économique handicape lourdement les entreprises. Elles doivent en effet de plus en plus régulièrement faire face à un manque de personnel, en raison du Covid-19. L’UWE dénonce à ce propos la suppression des tests pour les asymptomatiques, qui sont dès lors écartés plus longtemps (2,7 fois plus longtemps, selon les calculs de l’organisation patronale) que si un test négatif avait pu rassurer tout le monde. “Cela commence à poser des problèmes d’effectifs de plus en plus aigus, y compris dans des secteurs essentiels“, souligne Olivier de Wasseige, administrateur délégué de l’UWE. Il rappelle à ce propos la priorité à accorder au télétravail et le strict respect des règles sanitaires édictées dans divers protocoles. “S’il y a des situations anormales, elles doivent être sanctionnées”, ajoute-t-il.

Tout indique que les effets d’un second confinement seront pires que ceux du premier.

Les carnets de commandes sont vides

L’intention de l’UWE n’est évidemment pas de dénoncer les mesures sanitaires prises par les différents niveaux de pouvoir afin d’endiguer l’épidémie -“la priorité à court terme doit être la santé des gens, la protection de notre système de soins et le soutien inconditionnel au personnel soignant“, insiste Olivier de Wasseige- mais d’attirer l’attention sur les conséquences économiques de ces mesures. En l’occurrence, tout indique que les effets d’un second confinement seront pires que ceux du premier. En mars, les carnets de commandes étaient pleins, explique Olivier de Wasseige. Il y avait du boulot quand les entreprises ont repris après un mois ou deux d’arrêt. Certaines ont même étalé les congés pour apurer les retards. Cette fois, les carnets de commandes ne se remplissent plus. Confinement ou pas, il n’y a plus de travail pour tout le monde.

Le baromètre conjoncturel révèle que 13% des entreprises redoutent une faillite “probable voire très probable” et jusqu’à 49% des entreprises concèdent que, sans aide publique, elles ne résisteraient pas à un nouveau confinement. Ces aides devraient durer sans doute encore de longs mois puisqu’on table encore sur une baisse du chiffre d’affaires, de l’ordre de 11%, en 2021. Cela signifie la prolongation des primes régionales et des dispositions fédérales en faveur du chômage temporaire. Le cas échéant, jusqu’à la fin 2022, avec une évaluation trimestrielle, préconise l’UWE.

Jusqu’à 50.000 pertes d’emploi en 2021 ?

Les pouvoirs publics en ont-ils les moyens, surtout s’ils doivent en parallèle refinancer les soins de santé ? “La réponse est peut-être dans le dicton “un tien vaut mieux que deux tu l’auras “, suggère Olivier de Wasseige. Oui, il y a des risques pour les finances publiques. Mais les risques sont sans doute plus élevés encore si nous n’agissons pas pour préserver le tissu économique. Même si nous n’avons pas les moyens de proposer, comme le président français Emmanuel Macron, jusqu’à 10.000 euros par mois et par entreprise, nous pouvons agir.” L’UWE suggère notamment de réaffecter le budget des aides à l’emploi, largement sous-consommé en raison des faibles embauches ces derniers mois.

L’emploi, parlons-en. A ce stade, et grâce au chômage temporaire qui a touché jusqu’à 300.000 travailleurs wallons, les pertes sont un peu moins lourdes que ce que les entreprises craignaient au printemps dernier. 14.000 postes ont été détruits au premier semestre (essentiellement dans l’interim) mais l’UWE craint une accélération dans les mois à venir, surtout avec un second confinement. Elle cite le chiffre de 35 à 50.000 pertes d’emploi d’ici la fin 2021.

Dire que les exportations explosaient au 1er trimestre…

Le baromètre de l’UWE évoque également les investissements des entreprises et les exportations. Les premiers ont baissé d’un tiers au premier semestre et, au vu de l’incertitude actuelle, les perspectives restent très faibles. Les exportations ont plongé au premier semestre, plus lourdement même que ce que l’on craignait au printemps. L’année avant pourtant très bien commencé, grâce en particulier à l’industrie pharmaceutique et aux relations avec les USA (2e partenaire commercial de la Wallonie sur le premier trimestre). Le deuxième trimestre fut catastrophique avec un recul des exportations wallonnes de 2,4 milliards d’euros, par rapport à la même période en 2019. Les deux tiers des exportateurs sont touchés par ce mouvement à la baisse, qui devrait conduire à une baisse de 5 à 10 milliards d’euros sur l’ensemble de l’année.

Ce désarroi économique provient essentiellement d’une chute de la demande et de la confiance des acteurs. C’est pour les entreprises (investissements en berne) comme pour les consommateurs dont l’indice de confiance reste largement en-dessous de la moyenne des cinq dernières années. Sans attendre le plan Get Up Wallonia du gouvernement wallon, l’Union wallonne des entreprises a publié récemment son propre plan en huit axes afin de “solidifier le tissu économique wallon” (à consulter ici). “C’est le dernier joker de la Wallonie, conclut Olivier de Wasseige. Elle ne peut plus se permettre d’attendre, d’hésiter et de tergiverser. Il est urgent de sortir des sentiers battus.”

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