La machine à café, plateforme originale de réseautage

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Issue du Café Numérique, une ASBL qui organisait des événements liés à l’innovation et aux nouvelles technologiques, la Machine à Café est un concept inédit de rencontres professionnelles virtuelles. Chaque inscrit est “matché” avec un contact inconnu que les organisateurs jugent pertinent. Lancée il y a deux mois, la plateforme est un vrai succès.

Dans la région liégeoise, les événements basés sur l’innovation et les nouvelles technologies organisés par le Café Numérique ont toujours connu un beau succès. Cette ASBL dispose d’antennes dans la plupart des grandes villes belges francophones mais aussi à l’étranger: Londres, Paris, Kinshasa, Abidjan, Bogota, etc. Liège était clairement l’antenne la plus dynamique du réseau avec des événements fréquents et gratuits qui rassemblaient entre 100 et 200 personnes dans des lieux divers (entreprise, incubateur, université, etc.). Sur base de trois piliers essentiels: apprentissage, réseautage et convivialité. Dans la foulée, l’antenne a aussi mis sur pied un autre type d’événement appelé Café sans Filtre. Soit des événements payants dans de plus petits endroits et réservés à une vingtaine d’invités, les autres personnes intéressées pouvaient suivre l’événement via podcast. Mais au printemps dernier, la pandémie est évidemment venue chambouler les plans du Café Numérique.

La pertinence de la relation obtient jusqu’ici une cote de 4,4 sur 5.”

Jeremy Corman (La Machine à Café)

“Clairement, le Covid a mis à mal l’aspect réseautage, confie Jeremy Corman, marketing strategist et fondateur de l’agence Marketing Makers. Les podcasts, les zooms, tout le monde a fini par faire cela. Sans compter qu’à la longue, les visioconférences, les gens en ont eu marre.”

“J’ajouterais l’aspect participatif, renchérit Sébastien Lewy, chief experience officer de Smart2Circle et cofondateur de Think Circular. Dans un Café sans Filtre passé en mode Zoom, beaucoup de gens n’osaient pas participer ou poser une question. Dans le suivi d’après-événement, d’autres ont émis le souhait de pouvoir parler en direct avec l’un ou l’autre participant. Clairement aussi, j’ai ressenti un besoin très important de partager des perspectives, de l’expérience et d’avoir de vrais contacts sociaux.”

90%

des participants se réinscrivent après une première expérience.

Projet ultra-qualitatif

Jeremy et Sébastien, depuis longtemps bénévoles du Café Numérique et responsables, à des degrés divers, de son évolution, ont alors choisi de prendre le contrepied de ce qui se faisait partout et de proposer en février dernier un événement ultra-qualitatif appelé la Machine à Café ( www.machine- a-cafe.org). Le principe est simple mais efficace. Il s’agit d’une espèce de blind date pro. La Machine à Café vous fait rencontrer une seule personne virtuellement en face- à-face. Le matching se fait sur base des profils, des disponibilités, des expériences et des objectifs recherchés. En clair, la plateforme vous fait rencontrer la personne qu’elle pense que vous devez absolument rencontrer. L’événement a lieu un jeudi tous les 15 jours, les inscriptions sont autorisées sur le site jusqu’au dimanche soir précédent. Le lundi, chacun reçoit un mail avec un rendez-vous virtuel et une explication sur la personne qu’elle va rencontrer le jeudi. Et ça marche du tonnerre!

“Nous avons organisé six événements, explique Jeremy Corman. 619 personnes ont déjà été mises en relation avec une moyenne de 88 par événement, et 90% se réinscrivent après une première expérience. La pertinence de la relation obtient jusqu’ici une cote de 4,4 sur 5. Il n’y a quasi aucun no-show. Et en cas de souci de dernière minute, les protagonistes ont de toute manière la possibilité de reprogrammer, entre eux, un autre rendez-vous. Nous envoyons systématiquement un e-mail de suivi après chaque événement pour améliorer le système.”

IA? Non, intelligence humaine!

Précisons que l’événement a lieu toute la journée et pas uniquement après les heures de bureau. Evidemment, il y a de la technologie derrière tout ça et l’arrivée dans l’équipe de Frédéric Feytons, un CTO-as-a-service comme il se définit lui-même, va autoriser de nouvelles fonctionnalités dont un compte utilisateur. Quant au matching, il n’est pas réalisé par une machine mais par Sébastien Lewy qui a visiblement ça dans le sang.

“Je suis un homme de réseaux depuis longtemps, sourit le chief matchmaker de la Machine à Café. Mon expérience internationale, celle auprès de l’Awex et, aujourd’hui, mes activités dans le cadre du développement durable et de l’économie circulaire, m’ont aidé à aiguiser cette compétence. Les gens me font confiance sur la qualité de la mise en relation. Je suis les inscriptions au fur et à mesure pour préparer les matchs. Parfois aussi, j’appelle des connaissances pour leur signaler que j’ai un participant qu’elle devrait absolument rencontrer. Evidemment, pour que le système marche bien, il faut avoir du brassage et c’est le cas. Ce ne sont pas les mêmes personnes qui s’inscrivent à chaque événement. La base augmente par le bouche à oreille et le fait qu’on demande à chacun de nous recommander une personne.”

Nous avons des contacts avancés avec des cercles d’affaires.”

Sébastien Lewy (La Machine à Café)

A l’évidence, à écouter les témoignages ou à lire les posts sur LinkedIn, on comprend aisément la cote élevée donnée à la pertinence de la mise en relation. C’est d’ailleurs l’avis de Françoise Gabriel, ancienne directrice commerciale de Nespresso et aujourd’hui maître assistante à la Haute Ecole Libre Mosane (Helmo) en marketing, techniques de vente et négociations.

“Je suis active dans des bacheliers professionnalisants. J’aime faire rentrer l’entreprise dans l’école et tout autant aider les entreprises avec mes étudiants. Je suis en manque de contacts sociaux et j’étais très curieuse, en tant que participante régulière aux événements du Café Numérique, de voir ce qu’ils avaient conçu ici. J’ai participé à une Machine à Café et j’ai adoré. Je n’avais aucune idée préconçue et cela s’est avéré très enrichissant. J’ai rencontré un fondateur de start-up actif dans les déchets et nous avons trouvé plusieurs bases de collaboration. Mes étudiants vont d’ailleurs l’aider à la prochaine rentrée.”

Un “business model” en devenir

La beauté du système est le développement de toiles d’araignée avec des rencontres en face-à-face qui débouchent sur l’ouverture des réseaux mutuels et d’autres mises en contact. La Machine à Café a, en deux mois, déjà débouché sur des partenariats concrets ou des promesses de recrutement. Pour d’autres, ce sont aussi des potentialités futures qui se sont dégagées. “Je participais aux événements numériques pour ma culture générale, pas pour le réseautage, explique Adeline Stals, docteur en architecture et urbanisme et architecte indépendante. Ici, c’est clairement pour du réseautage et pour préparer le futur quand j’aurai terminé mes deux années de stage dans des bureaux. J’ai rencontré un expert en domotique, un domaine que je ne connaissais pas bien. Ce fut très intéressant et très utile. Même chose pour le marketeer d’un bureau d’architecture d’inté- rieur. Il m’a donné plein de conseils pour développer mon image. Nous avons aussi beaucoup échangé sur les outils numériques que nous utilisons. Et notamment de la réalité augmentée qui fut l’objet de mes recherches dans le cadre des petits bureaux d’architectes.”

C’était couru d’avance: l’efficacité de la solution de Jeremy et Sébastien aiguise les convoitises. A ce jour, le duo avoue une dizaine de touches concrètes venant tant de cercles d’affaires que d’entreprises. Avec l’idée claire, désormais, de réfléchir à une commercialisation et à la mise sur pied d’un business model.

“Nous avons des contacts avancés avec des cercles d’affaires, conclut Sébastien Lewy. C’est une façon pour eux de se démarquer. Il y a deux aspects. D’une part, les gros qui le voient comme un moyen de redynamiser les contacts internes. D’autre part, les petits qui utiliseraient la Machine à Café avec des personnes extérieures pour attirer de nouveaux membres et toucher notre communauté. Il va de soi qu’aucune exclusivité ne sera accordée. Elle ne fait pas partie de notre vision stratégique. Des réseaux d’alumni se montrent aussi intéressés.”

“Quant aux entreprises, elles sont aussi désireuses d’avoir une formule personnalisée, conclut Jeremy Corman. Soit pour dynamiser les réseaux internes. Soit, si ce sont des PME, dans le but d’approcher des prospects.”

Signe du succès grandissant, la Machine à Café attire aussi désormais des étrangers venus de France, du Luxembourg et de l’Espagne.

“Des contacts très pertinents”

Après cinq années passées chez Deloitte au Luxembourg, Quentin Brasseur s’est lancé dans la consultance d’affaires avec Taiwan via la société Knolance. Il favorise l’entrée d’entreprises belges sur le marché taiwanais, par exemple pour de la distribution ou des partenariats liés à la production et à la R&D. A l’inverse, Quentin Brasseur agit comme facilitateur de projets d’entreprises du cru en direction de la Belgique et de l’Europe. En raison de la pandémie, il n’a plus quitté l’Asie depuis février 2020. “Ici, les autorités ont appris de leurs erreurs passées, notamment lors de l’épidémie de Sars. Ils avaient un plan en place et l’ont appliqué à la lettre et sans traîner. Rien n’a jamais été fermé ici. Ni les restaurants, ni les bars, ni les commerces. Il y a bien eu des fermetures de discothèques mais c’est tout. Très vite, le port du masque et les autres gestes barrières ont été imposés et cela a suffi. La population est disciplinée. Il faut dire que nous sommes aussi beaucoup suivis par les caméras. C’est effrayant pour certains mais c’est la manière dont cette démocratie fait les choses. Il y a ici une grande confiance en l’Etat. Les résidents légaux comme moi et les Taiwanais peuvent sortir du pays pour leur boulot mais, au retour, il y a une quarantaine très stricte de 15 jours puis une semaine de suivi tout aussi strict via une appli. Si la batterie du smartphone tombe en rade, la police de quartier est là dans l’heure. Les résultats sont là: à peine un millier de contaminations…”

QUENTIN BRASSEUR (KNOLANCE), installé à Taiwan.
QUENTIN BRASSEUR (KNOLANCE), installé à Taiwan.© PG

Dans ce contexte de vie quasi normale, on comprend que Quentin Brasseur ne soit pas encore rentré. Dès lors, du réseautage comme celui proposé par la Machine à Café s’avère très utile pour son business. “Je me suis inscrit dans l’idée de rencontrer des contacts potentiels sans rien espérer de précis. Je n’ai pas été déçu. J’ai participé à cinq événements et je n’ai eu que des contacts très pertinents et de haut niveau. Comme un ingénieur de chez John Cockerill actif dans un projet de récupération des batteries de voitures électriques dans l’optique du stockage ou un consultant spécialisé dans le software engineering qui a passé 10 ans dans la Silicon Valley. Clairement, rien que des contacts intéressants avec une solide expérience.”

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