Comment rester proche… sans contact? L’exemple des banques

"Se mettre au service des clients en répondant à leurs inquiétudes, de même que lutter contre l'incertitude en s'adaptant continuellement et en communiquant avec plus de transparence, s'est avéré payant", estime l'auteur de l'étude. © PHOTOS: PG

Comment les entreprises peuvent-elles continuer à communiquer avec leurs clients à l’heure où chacun limite ses contacts? En s’inspirant, par exemple et comme le suggère une récente étude du cabinet de conseil Sia Partners, de la stratégie de communication réussie des banques pendant le premier confinement.

Fin octobre, le gouvernement fédéral et les Régions ont annoncé un ensemble de mesures visant à endiguer à nouveau l’avancée du virus. Si le dispositif ne reprend pas le mot “confinement”, on retrouve la même urgence à ce que chacun limite ses interactions. Comment, dès lors, incarner la proximité quand on doit se distancier lorsqu’on est une entreprise?

Pour le savoir, le cabinet de conseil Sia Partners a analysé entre mars et mai les différentes publications sur les réseaux sociaux (LinkedIn et Facebook) de 12 entreprises de trois secteurs: les banques (Belfius, BNP Paribas Fortis, ING, KBC/CBC), les assurances (AG, Allianz, Axa, Ethias) et l’énergie (Eneco, Engie, Lampiris, Luminus). Au total, 1.400 posts ont ainsi été analysés sur deux périodes de référence de trois mois, soit entre mars et mai 2020 ainsi que celle s’étalant de mars à mai 2019. Et il ressort comme grande conclusion du travail effectué par Sia Partners que la reconnaissance et l’engagement sociétal sont deux axes pour alimenter sa proximité avec les clients.

Reconnaissance et responsabilité: deux axes pour alimenter sa proximité avec les clients.

L’humain à l’honneur

Pour arriver à cette conclusion, le consultant a d’abord regroupé les 1.400 publications en cinq grands thèmes: l’image de l’entreprise, l’aspect responsabilité sociétale des entreprises (RSE, en anglais corporate social responsibility, CSR), les produits et services, la relation avec le client et, enfin, tout ce qui touche à l’employeur en tant que tel. Pour chacune de ces publications, les interactions et réactions ont ensuite été comptabilisées afin de déterminer quelles étaient les thématiques qui suscitaient le plus d’engagement sur les réseaux sociaux. “L’idée est que la proximité d’une marque avec ses clients peut se mesurer notamment grâce à l’engagement que ses publications sur les réseaux sociaux déclenchent, c’est-à-dire les interactions (partages, commentaires) et les réactions (likes)”, indique Marie Pietruszka qui a piloté l’étude chez Sia Partners.

Comment rester proche... sans contact? L'exemple des banques
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Couplé à une analyse sur les thématiques de publication, il est ensuite possible de voir quels sujets obtiennent les faveurs du public, parce qu’ils répondent à des attentes ou des intérêts spécifiques. On voit ainsi que les internautes ont été particulièrement sensibles pendant le premier confinement aux thématiques qui témoignent d’une proximité authentique entre une entreprise et ses clients. On remarque en effet une forte hausse des réactions sur les publications liées à “la mise en avant des employés” et à la “mise en avant des clients”. Autrement dit, “la marque s’humanise et se rapproche en incarnant dans les moments difficiles les collaborateurs et les clients”, note Marie Pietruszka.

51% : part d’interactions supplémentaires que les quatre banques belges ont suscitées sur les réseaux sociaux durant le premier confinement, par rapport à la même période en 2019.

Rassurer s’avère payant

De la même manière, les publications qui s’inscrivent dans un contexte social et responsable ont obtenu plus de succès: les thématiques liées à l’impact sociétal (donations, fondations, environnement, etc.) ont gagné en moyenne plus de 50 réactions et interactions supplémentaires par publication entre 2019 et 2020. En fait, “les marques s’incarnent non seulement par les individus qui travaillent pour elles mais aussi par leur inscription dans un contexte social plus large”, souligne Marie Pietruszka qui ajoute que la compréhension de leurs enjeux et de leurs inquiétudes est un autre point qui trouve une forte résonance auprès des clients. “On remarque que les entreprises qui ont communiqué sur leurs prix et les actions visant à ajuster les manières d’opérer ont suscité l’approbation sur les réseaux sociaux. Se mettre au service des clients en répondant à leurs inquiétudes, de même que lutter contre l’incertitude en s’adaptant continuellement et en communiquant avec plus de transparence, s’est avéré payant.”

La dimension sociétale

Si l’on regarde d’un peu plus près les résultats obtenus par les quatre grandes banques du pays, Sia Partners constate qu’elles ont réussi à générer plus d’engagements (+ 51%) de la part de leurs followers durant cette période de confinement en 2020 que sur la même période un an plus tôt. Et cela, avec moins de publications (111 posts en 2020 contre 168 en 2019). Autrement dit, “les banques ont été très efficaces dans leur présence sur les médias sociaux pendant le premier lockdown, plus encore que les énergéticiens et les assurances: elles ont été capables de montrer qu’il était possible de combiner impact sociétal et digital, notamment avec le paiement sans contact”, explique Anthony Wolf, associé chez Sia Partners, en charge du secteur de la banque et de l’assurance, mentionnant à ce propos l’exemple de BNP Paribas Fortis dont la campagne Yes, on est ouvert en mai et en juin a été le point d’orgue de cette tendance visant à marquer son soutien aux commerçants et aux entrepreneurs.

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L’étude de Sia Partners confirme également que les attentes des clients des banques présentent une tendance de fond vers plus de responsabilité. “Le public attend de plus en plus de la communication en matière de RSE d’une marque et, globalement, de sa capacité à s’adapter en temps de crise et à sortir des sentiers battus, ajoute Anthony Wolf. Là où la dimension RSE était initialement le fait de petites entreprises et de start-up cherchant à se positionner différemment, les banques se sont rendu compte, déjà avant le Covid, de la responsabilité qu’elles avaient à jouer sur ces sujets. Pendant le confinement, elles se sont appuyées sur leur image de marque pour rassurer, tout en complétant cela par une dimension RSE.” A commencer ici aussi par BNP Paribas Fortis qui a lancé une nouvelle campagne de positionnement en juillet avec le mot-clé #PositiveBanking et un message “inspirationnel” à l’attention du public – Construire ensemble un avenir positif – pour souligner le rôle et la raison d’être de la banque au logo vert.

La recette de BNP Paribas Fortis

“Avec la crise sanitaire, nous avons adapté notre communication au travers de nos canaux digitaux afin de garder le lien avec nos clients en les informant aussi bien que possible sur différents sujets, explique Annemie Goegebuer, responsable de la communication chez BNP Paribas Fortis. Cette “proximité à distance” sur les réseaux sociaux s’est articulée autour de trois thèmes. Nous avons d’abord partagé des informations sur l’impact du Covid-19 sur nos produits (par exemple, sur les mesures liées aux crédits hypothécaires) et sur notre accessibilité, notamment digitale. Ensuite, lors de la réouverture des magasins au mois de mai, nous avons poursuivi par une communication inclusive de nos clients, commerçants ou entreprises, sous la bannière ‘Yes, on est ouvert’ pour ensuite enchaîner avec la campagne ‘Positive Banking’ sur le rôle et l’impact sociétal de notre banque (BNP Paribas Fortis a fait don de 350.000 euros aux Banques alimentaires et de 250.000 euros à des associations luttant contre la pauvreté à travers la Fondation Roi Baudouin, Ndlr). Par ailleurs, le fait que notre contenu en matière de RSE ait également trouvé un écho auprès de nos followers prouve qu’ils se soucient réellement de l’impact de leur banque sur la société. Au final, les chiffres extraits de l’étude (de Sia Partners, Ndlr) illustrent surtout le fait que nous avons correctement identifié les enjeux et les préoccupations de notre communauté tout en y apportant une réponse et une tonalité adaptée.”

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“Le principal enseignement que nous pouvons tirer de cette crise, c’est la capacité de nos employés à afficher une forte résilience, à être réactifs et proactifs et à faire preuve d’une grande flexibilité, ajoute Annemie Goegebuer. Cette crise fut aussi l’occasion de rappeler les valeurs fondamentales qui animent notre entreprise, notre rôle dans la société et dans l’économie belge et de satisfaire les besoins de nos clients à distance ou non. En tant que banque d’un monde qui change, nous gardons à l’esprit que la digitalisation et la durabilité sont au coeur de notre communication. En attendant que cette crise soit derrière nous, nous travaillons, avec nos clients, à façonner le monde de demain de manière positive et humaine.”

Quels enseignements pour la suite?

En conclusion, Sia Partners confirme qu’il est désormais important pour les marques, qu’elles soient bancaires ou pas, de continuer à témoigner de leur proximité avec les intérêts et inquiétudes de leurs clients en mettant en avant les actions menées qui contribuent positivement à la résilience de la société. “L’équilibre entre individu et organisation s’annonce, toujours plus, comme une clé de réponse pour entretenir la relation en des moments incertains, explique Marie Pietruszka. Ces intentions positives ne peuvent cependant être juste des affirmations et se doivent de s’appuyer sur une réalité concrète. Les réseaux sociaux font que cet écart entre la promesse faite et la réalité du terrain peut porter préjudice à l’entreprise.” Gare au bad buzz, en somme. Effectivement, résume Marie Pietruszka: “Hier, le client était surtout motivé par le prix et le service. Aujourd’hui, il y a une véritable identification à l’entreprise et à ses engagements. Ceux-ci doivent être alignés sur les valeurs du client. Ils doivent correspondre à ses critères, à ses choix, à ses aspirations. Certes, le prix et le service restent déterminant mais la raison d’être d’une entreprise et son impact sur la société et l’environnement deviennent des facteurs d’exclusion pour une partie grandissante des consommateurs.”

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