L’euro recule
Le marché obligataire est assailli par des investisseurs à la recherche de rendements positifs.
Deux événements domineront l’activité financière dans les prochaines semaines. Le premier concerne encore et toujours la Grèce, le second les élections parlementaires britanniques qui se dérouleront le 5 mai. De nouvelles calamités pourraient découler de ces deux événements. On pourra d’ailleurs mesurer le degré de nervosité qu’ils occasionneront lors de la réunion conjointe du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale ce mercredi à Washington.
Il ne fait aucun doute que la Grèce se fait titiller par les instances européennes. Les dirigeants européens ne semblent en effet pas tolérer qu’une forte tête leur fasse de l’ombre. Ils ne réussissent toutefois pas à faire plier le gouvernement grec. Que du contraire ! L’attention est fixée sur la problématique de la dette grecque. Il est clair que la raison principale n’a strictement rien à voir avec l’endettement du pays. Tout le monde sait que la Grèce est incapable de rembourser sa dette. On lui réclame des plans de restructurations qui sont ensuite critiqués. Quelles que soient les propositions du gouvernement grec, on les trouvera trop vagues et leur encadrement irréaliste. Comme si les plans produits par les autres membres de l’Union méritaient une meilleure considération. Il en va de même de la raison invoquée par la Banque centrale européenne (BCE). Elle refuse d’octroyer de l’argent frais au gouvernement grec ou à ses banques, au motif qu’il n’exécute pas les mesures convenues avec les gouvernements précédents. La BCE consacre près de 60 milliards d’euros (EUR) par mois à l’achat de titres divers mais ne veut pas débourser 2 milliards pour soutenir la Grèce; c’est à se demander quel jeu elle pratique. Lorsqu’un autre Etat n’est plus capable de rembourser ses dettes, la BCE accepte de prolonger le délai. Pourquoi ne l’autorise-t-elle pas à la Grèce ?
Une rencontre qui a déplu
La visite de Tsipras, le Premier ministre grec, au président russe Poutine a été particulièrement mal accueillie pas les dirigeants européens. Ils ont craint que la Grèce ne sollicite une aide financière à la Russie. Ce qui affecterait leurs prérogatives sur la péninsule. Officiellement, la Grèce n’a rien réclamé du tout. Elle s’est contentée de signer quelques accords commerciaux avec la Russie. Accords qui n’auront aucun effet immédiat. Personne ne sait cependant ce que les deux dirigeants ont convenu loin des regards indiscrets. Quoi qu’il en soit, l’influence de la Russie dans les affaires européennes augmentera. Le pays a déjà une mainmise sur Chypre. Il participera dorénavant indirectement aux décisions que prendra la Grèce. Pour l’Union, l’affaire est honteuse. L’Europe ne pourra plus intensifier ses sanctions contre la Russie, ce qui représente une victoire incontestable pour Poutine. Il va de soi qu’à partir de maintenant, tout dérapage en Grèce sera imputable à Poutine.
Marchés inquiets
Tant que les élections en Grande-Bretagne ne seront pas terminées, les marchés des changes et des capitaux seront fortement perturbés. Car tout comme un Grexit sonnerait le glas de la zone euro, une victoire des europhobes pourrait annoncer la fin de l’Union européenne. La livre (GBP) a fortement oscillé la semaine passée. L’incertitude sur l’issue des urnes complique en outre la politique monétaire tant en Grande-Bretagne que sur le continent européen. Les faibles taux d’intérêt dans les deux régions réduisent l’arsenal des moyens d’intervention des deux banques centrales. L’EUR et la GBP figureront parmi les deux devises les plus fragiles dans les semaines à venir.
Bond du rouble russe
L’EUR a faibli par rapport à toutes les autres devises. Le dollar (USD) s’est raffermi de 2,5% malgré les doutes qui entourent la hausse prochaine des taux d’intérêt aux Etats-Unis. La GBP a clôturé la semaine en hausse de 1%. Le yen nippon (JPY) s’est redressé de 1,8%. Mais le bond le plus spectaculaire a été fourni par le rouble russe (RUB) qui a gagné pas moins de 13,4% en une semaine ! Les devises du bloc de l’Est de l’Europe se sont également raffermies, mais dans une moindre mesure. Les devises liées aux matières premières ont aussi progressé, avec à leur tête le real brésilien (BRL) gagnant 5,1% et en queue de peloton la couronne norvégienne (NOK) avec un gain de 0,4%.
La faiblesse des taux d’intérêt commence à perturber les professionnels. Le comportement des obligations répond de moins en moins à celui de titres à revenu fixe et ressemble de plus en plus à celui des matières premières. Les lois financières en la matière ne sont plus significatives actuellement suite à l’apparition de rendements négatifs. Leur application perd tout son sens. Un placement obligataire ne rémunère plus le risque ni la durée du placement. Son potentiel ne réside plus que dans l’évolution de son cours. Celui-ci ne peut progresser que si le marché reste abreuvé de liquidités. Le jour où les banques centrales mettront un terme définitif à leur assouplissement monétaire, le pire sera à craindre.
Système parallèle
Aujourd’hui déjà, un manque de liquidités affecte certains pans du marché. Il devient évident que l’argent distribué n’aboutit pas toujours au bon endroit. Plusieurs études, dont le dernier rapport publié par le FMI, démontrent que la concentration de l’argent se fait en dehors du système bancaire. Il atterrit principalement dans le système non réglementé, connu sous l’appellation des banques de l’ombre. Système d’ailleurs alimenté directement par les banques elles-mêmes. Les banques centrales et le FMI sont d’ailleurs préoccupés par ce phénomène. Ils reprochent l’opacité de ce système parallèle. Nous pouvons déduire de leur inquiétude que la politique monétaire ne risque pas de changer de cap prochainement. Les taux d’intérêt très faibles se maintiendront encore un bon bout de temps. Le marché obligataire est, en voie de conséquence, assailli par des investisseurs à la recherche de rendements positifs. Les titres de pacotille en profitent le plus et ceci dans toutes les devises. Les progressions ne dépassaient que rarement les 4%. Les titres industriels de meilleure qualité en ont fait les frais, tout comme les souverains de longue durée. Les échelles des taux d’intérêt se sont légèrement raidies depuis. Elles évoluent néanmoins en dessous de leur niveau de début d’année.
Emissions toujours nombreuses
Les émetteurs continuent de se bousculer sur le marché primaire. Tout le monde y trouve son compte de nos jours. BNP Paribas Fortis Funding (A) lance un emprunt à 5 ans en dollar australien (AUD). Ses conditions sont chiches. Vous trouverez sans encombre mieux sur le marché secondaire. Les deux émissions en GBP sont techniquement correctes et ne conviennent qu’à ceux qui utilisent effectivement cette monnaie. Notez qu’il y a 48 jours d’intérêt révolus à régler pour la BEI. La VW Financial (A) en NOK conviendra pour le réinvestissement. La nouvelle tranche de la KfW (AAA, avec garantie de l’Allemagne) en lire turque (TRY) semble attrayante mais est beaucoup trop chère. Il y a 26 jours d’intérêt révolus à régler. Sur le marché gris, elle se négocie 1,5% meilleur marché. Préférez-lui la Landwirtschaftliche Rentenbank (AAA, avec garantie de l’Allemagne, alt.3) tant que frais et différence de prix ne dépassent pas 1,93% et pour autant que l’achat ait pour but de recouvrer partiellement une perte de change.
Obligations
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