Danny Reweghs
Le malheur des uns…
La politique de désengagement européenne a probablement contribué aux velléités guerrières de Vladimir Poutine. Le changement radical qui s’annonce entraînera une nette appréciation des actions du secteur de la défense.
Le malheur des uns fait le bonheur des autres: ce triste adage s’applique aujourd’hui au secteur de la défense (européen), pour lequel l’invasion de l’Ukraine constitue un réel game changer.
Quelques jours plus tard à peine, le chancelier Olaf Scholz annonçait au Parlement allemand l’injection, cette année encore, de 100 milliards d’euros dans un fonds destiné à moderniser l’armée de son pays, dont le budget de la défense représentera désormais structurellement 2% du produit intérieur brut (PIB). Cette volonté, au sein de l’OTAN, n’est pas neuve, mais peu de membres l’ont concrétisée jusqu’ici – l’Allemagne n’en était l’année dernière qu’à 1,5% environ et la Belgique, à 1,1%, de cet objectif. Depuis la chute du Rideau de fer, en 1989, consacrer le moins d’argent possible à l’armée était presque devenu un sport européen, à tel point que la défense était quasi systématiquement le premier secteur sacrifié lors de négociations budgétaires. D’après le magazine d’investigation Der Spiegel, les 5.000 chars d’assaut et 700 avions de guerre dont l’Allemagne disposait encore en 1989 ne sont plus qu’au nombre de 300 et 230 respectivement.
On ne s’étonnera pas que les actions liées à la défense soient orientées à la hausse depuis le début de l’année.
Hausse des cours
Cette politique a probablement contribué aux velléités guerrières de Vladimir Poutine, dont l’invasion de l’Ukraine est le point culminant. Si tous les pays européens portent leur budget défense à 2% de leur PIB ces prochaines années, l’enveloppe augmentera de 25% en moyenne, pour passer à plus de 5.000 milliards d’euros, estime l’analyste spécialisé au sein de la société boursière américaine Jefferies.
On ne s’étonnera pas que les actions liées à la défense soient orientées à la hausse depuis le début de l’année et plus encore, depuis l’invasion de l’Ukraine. Les cours du groupe allemand RheinMetall, de la société britannique BAE Systems, de l’entreprise italienne Leonardo ou encore des français Dassault Aviations et Thales ont bondi de 30% à 60% au moins ces deux derniers mois. Nous proposerons prochainement une analyse de ce secteur, auquel les investisseurs recommencent soudain à s’intéresser. Il faut dire que pour l’industrie européenne de la défense, le contexte marque un tournant pour le reste de la décennie au moins: alors que ses actions ont généralement enregistré des performances bien inférieures à celles des indices boursiers européens durant ces 5 à 10 dernières années, leur situation est en train de radicalement changer.
Pas de “trackers”
L’investisseur tend souvent à surestimer les retombées immédiates de certaines évolutions, mais à les sous-estimer sérieusement sur le long terme (5 à 10 ans). Les détenteurs d’actions du secteur de la défense pourraient dès lors bien être déçus par les rendements à 6 à 12 mois, mais se féliciter de leur clairvoyance dans 5 ou 10 ans. Mieux vaut toutefois attendre un recul pour se positionner. Aucun tracker sur les valeurs de défense (européennes), accessible à l’investisseur privé, n’existe malheureusement à ce jour.
Stratégie
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici