Nouvelle baisse du bénéfice de Colruyt

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Le distributeur ne peut, ni ne veut, répercuter entièrement l’augmentation des coûts sur ses clients: relever ne fût-ce que légèrement les prix et renoncer à la stratégie qui a fait sa réputation serait du suicide. Il n’a d’autre choix que d’attendre la fin de la tempête.

La situation se dégrade encore chez Colruyt. Lors de la publication des résultats annuels, en juin dernier, le groupe avait mis en garde contre une nouvelle baisse du bénéfice lors de l’exercice à venir; les investisseurs anticipaient un recul de 5 à 10 %, mais c’était une estimation trop optimiste. La semaine dernière, lors de l’assemblée générale des actionnaires, Jef Colruyt a prévenu que la baisse serait “significative”. L’an dernier, il avait utilisé le même terme, et le recul avait atteint 30%; l’ampleur, cette année, pourrait être identique, et le bénéfice par action, tomber à 1,7 euro environ, soit environ la moitié de celui de 2019. Dans ce contexte, et malgré l’effondrement du cours de l’action, le ratio cours/bénéfice (C/B) se maintient autour de 13.

A court terme, le groupe n’a guère d’autre choix que d’attendre la fin de la tempête. Il est en effet pris en étau: ses coûts augmentent considérablement mais il poursuit sa stratégie de prix bas, ce qui comprime fortement sa marge bénéficiaire. Cette dernière était déjà tombée à 3,7% lors de l’exercice précédent, et s’est encore réduite, à 3% seulement, cette année. La direction ne peut pas faire grand-chose contre la hausse des coûts, qui résulte du renchérissement de ceux de l’énergie et de la main-d’oeuvre. Elle estime qu’ils vont augmenter de 200 millions d’euros sur l’exercice, soit de plus de 10 % par rapport au précédent. La seule parade consiste à en améliorer encore la maîtrise, et à travailler plus efficacement.

Le distributeur ne peut, ni ne veut, répercuter entièrement l’augmentation des coûts sur ses clients: relever ne fût-ce que légèrement les prix et renoncer à la stratégie qui a fait sa réputation serait du suicide commercial. En outre, les prix des denrées alimentaires augmentent moins vite que les prix globaux, si bien que les prix de vente progressent moins rapidement que les coûts salariaux, liés à l’inflation générale. De surcroît, la concurrence s’est intensifiée ces dernières années, de sorte que Colruyt doit souvent s’aligner sur les promotions ou les baisses de prix des autres enseignes. La marge de manoeuvre est faible, car les volumes des magasins d’alimentation sont globalement en recul en Belgique. Si l’on ajoute à cela la baisse du pouvoir d’achat des consommateurs, le tableau s’assombrit complètement. Une lueur d’espoir pointe, toutefois: la part de marché de Colruyt s’est stabilisée au cours du dernier exercice.

Les investisseurs constateront par ailleurs que le bilan du groupe n’est plus ce qu’il était. La baisse de la rentabilité, associée à une politique d’investissement toujours soutenue, va tirer vers le haut la dette financière nette, qui atteignait déjà 566 millions d’euros au terme de l’exercice précédent. Le taux d’endettement, bien que limité, s’inscrit en rupture avec la tendance du passé. La vente partielle annoncée de Virya Energy, qui regroupe les participations du groupe dans le secteur de l’énergie, valorisées à 1 milliard d’euros environ, permettrait de renforcer à nouveau le bilan et de redorer quelque peu – il en faudra plus, pour rassurer les investisseurs – le blason du groupe.

Conclusion

Le dévissage de cette action défensive est inhabituel mais logique, puisque les bénéfices sont en chute. Compte tenu de cette dernière et du fait que le groupe ignore comment restaurer les marges à court terme, l’on ne peut dire qu’avec un ratio C/B de 13, le titre est bon marché. Par conséquent, nous maintenons notre conseil “conserver”.

Conseil: conserver

Risque: moyen

Rating: 2B

Cours: 22,6 euros

Ticker: COLR.BB

Code ISIN: BE0974256852

Marché: Euronext Bruxelles

Capit. boursière: 3,01 milliards EUR

C/B 2020/2021: 14

C/B attendu 2021/2022: 13

Perf. cours sur 12 mois: -46%

Perf. cours depuis le 01/01: -40%

Rendement du dividende: 4,8%

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