Achat dispendieux

60,54 EUR – 3B

Acheter au plus bas, vendre au plus haut : on pourrait attendre d’investisseurs professionnels qu’ils appliquent à la lettre cette règle de base des investissements. Dans le cas des managers du holding GBL, c’est même plutôt le contraire depuis quelques mois ! GBL se défait ainsi de sa participation dans GDF Suez au moment précis où le cours de Bourse de la société de services d’utilité publique française plonge. Et la semaine dernière, GBL a acheté une participation de 15% dans le groupe suisse SGS, qui atteint des sommets en Bourse. SGS est leader mondial dans le domaine de l’inspection, du contrôle, de l’analyse et de la certification. Fondée en 1878, la société compte aujourd’hui 75.000 collaborateurs et plus de 1500 antennes et laboratoires de par le monde. L’an dernier, elle a dégagé un chiffre d’affaires (CA) de 5,6 milliards de francs suisses (CHF). L’essor du commerce international, la réglementation de plus en plus stricte, la sécurisation de chaînes de livraison complexes et la gestion plus efficace des sources d’aide naturelles sont autant de tendances favorables à SGS. SGS représente désormais environ 15% des actifs nets de GBL. Les principales participations de cette dernière demeurent Total (26,6% de l’actif), Lafarge (24,5%) et Imerys (15,2%). GBL rachète la participation dans SGS à Exor, un holding de la famille Agnelli, propriétaire notamment de Fiat. L’achat de la participation dans SGS s’inscrit dans la stratégie de GBL visant à diversifier son portefeuille et ce, principalement par l’allègement de la branche énergétique et l’acquisition de groupes ayant davantage de perspectives de croissance. En outre, SGS offre un rendement de dividende de 2,7%, ce qui est légèrement supérieur au return sur les liquidités présentes en abondance au bilan de GBL. L’achat de SGS soutient donc le dividende de GBL, mais Albert Frère semble lui aussi contaminé par la soif de rendement qui domine les marchés. Enfin, SGS correspond au type d’entreprises que GBL recherche : leaders de leur marché, emmenées par un management solide. C’est peut-être là une des leçons que l’investisseur particulier peut retenir de Frère : concentrez-vous en priorité sur la qualité, souciez-vous seulement en deuxième instance du prix. En l’occurrence, GBL a dû débourser 2 milliards EUR pour cette participation, soit 23 fois son bénéfice attendu pour 2013 (30 fois celui de 2012) et 7,2 fois la valeur comptable de 2013 (8 fois celle de 2013). La valeur d’entreprise de SGS est estimée à 12,8 fois le cash-flow opérationnel attendu (EBITDA) de 2013 (15,6 fois celui de 2012). C’est très cher, donc. En revanche, SGS affiche une croissance stable et sensible de son bénéfice. L’an dernier par exemple, le bénéfice opérationnel de SGS s’est accru de 13%. GBL finance ce rachat par des liquidités rassemblées principalement après la vente de GDF Suez et en partie par une obligation convertible en actions GDF Suez. Après l’achat de SGS, GBL détient encore un milliard EUR de liquidités et une ligne de crédit inutilisée de 1,2 milliard EUR. GBL pourrait donc encore réaliser une importante opération. Cela dit, sa position d’endettement nette s’est à nouveau creusée à environ 900 millions EUR.

L’an dernier, GBL avait dégagé un bénéfice de 276 millions EUR malgré de lourdes dépréciations de valeur sur GDF Suez. Notons cependant ses encaissements (3,03 EUR par action), qui garantissent le dividende. En mai, GBL a confirmé qu’il percevrait suffisamment de revenus de dividendes sur ses participations pour financer son propre dividende (2,65 EUR par action, 2% de plus qu’en 2011). L’achat de SGS devrait soutenir encore le dividende des prochaines années. GBL affiche entre-temps une décote importante de 28% sur la valeur de ses actifs nets d’environ 85 EUR par action. Le titre offre un rendement de dividende de 4,5%. Mais ceux qui ont acheté GBL pour battre la Bourse grâce aux choix avisés du baron Frère auront plutôt été déçus ces dernières années. Le conseil “conserver” est maintenu (rating 3B).

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