Conflit d’intérêts pour Proximus
Reporter les investissements, au risque de prendre du retard sur la concurrence, n’est pas envisageable. L’on pourrait réduire le dividende, mais ni les investisseurs, ni l’Etat, ne veulent en entendre parler.
L’agitation qui règne depuis l’annonce des licenciements illustre bien le conflit d’intérêts dont le groupe télécom est la proie. L’Etat détient 53,5% des titres, qui lui rapportent 270 millions d’euros environ chaque année; mais l’Etat est aussi régulateur d’un secteur où évoluent les concurrents de Proximus. Simultanément, le gouvernement a pour mission de préserver l’emploi, alors que les actionnaires privés et institutionnels ont d’autres objectifs en tête. Mais dans un marché concurrentiel, dividende généreux, faibles coûts et interdiction de restructurer sont incompatibles. Dominique Leroy avait mis le doigt sur le problème dès l’an dernier, en insistant sur la nécessité de réduire les dépenses.
Proximus entend devenir un fournisseur de services numériques offrant une expérience client supérieure. Mais l’ouverture du marché du câble comprime ses revenus, alors que l’arrivée d’un 4e opérateur mobile est désormais possible. Il va donc devoir investir des sommes considérables. Le déploiement de la fibre optique et le développement d’un réseau mobile de 5e génération (5G) vont, eux aussi, coûter cher. Reporter les investissements, au risque de prendre du retard sur la concurrence, n’est pas envisageable. La stratégie Fit for Growth du groupe vise à accroître l’efficacité et à limiter les coûts – une limitation bien nécessaire car si le bénéfice opérationnel sous-jacent hors éléments exceptionnels (Ebitda) par salarié est conforme à la moyenne européenne, il est inférieur à celui des concurrents belges. Tenter de combler ce retard au travers d’un programme de restructurations est pertinent… sauf pour les syndicats et le gouvernement. Le plan ayant été révélé avant sa communication officielle, les échanges ont dû être suspendus pendant une journée. La direction compte sabrer dans les effectifs (-1.900 postes). A la fin du 3e trimestre, le groupe comptait un peu plus de 12.500 salariés, dont un quart environ de statutaires; pour ces fonctionnaires, un programme de retraite anticipée court jusqu’au 1er janvier 2020.
Proximus compte par ailleurs embaucher 1.250 personnes, ce qui ramènerait la réduction nette à 650 unités, soit une économie brute de 240 millions d’euros d’ici à 2022. Déduction faite des dépenses de restructuration et autres, le gain s’établira à 50% de ce montant tout au plus. Pour préserver l’emploi, l’on pourrait aussi réduire le dividende, mais ni les investisseurs, ni l’Etat, ne veulent en entendre parler. Le dividende s’élève actuellement à 1,5 euro par action. Avec un peu plus de 338 millions de titres en circulation, il coûte plus de 500 millions d’euros. A lui seul, le cash-flow disponible ne suffit pas à couvrir la dépense, ce qui contraint Proximus à emprunter. A l’issue du 3e trimestre, la dette nette s’élevait à 2,09 milliards d’euros. Le premier remboursement important est prévu pour 2022. La direction mise pour l’exercice sur un chiffre d’affaires stable en Belgique, et un Ebitda en hausse de 2 à 3%. La progression de 2,9% enregistrée après neuf mois est parfaitement conforme aux prévisions.
Conclusion
La récente correction doit absolument être considérée dans son contexte car le titre avait progressé de près de 25% depuis l’été. Le conflit d’intérêts ne sera pas simple à résoudre. Le groupe conjugue toujours cash-flows stables et rendement attrayant mais le dividende est, dans une mesure croissante, un facteur d’incertitudes. Vu l’influence du politique, toute spéculation à ce sujet serait prématurée.
Conseil: conserver/attendre
Risque: moyen
Rating: 2B
Cours: 22,39 euros
Marché: Euronext Bruxelles
Ticker: PROX BB
Code ISIN: BE0003810273
Capit. boursière: 7,6 milliards EUR
C/B 2018: 14,5
C/B attendu 2019: 13,7
Perf. cours sur 12 mois: -13%
Perf. cours depuis le 01/01: -5%
Rendement du dividende: 6,7%
Actions belges
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