Les vraies raisons de l’opposition entre Elon Musk et Sam Altman

Elon Musk Sam Altman
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Christophe Charlot
Christophe Charlot Journaliste

Autrefois associés, le patron de Tesla, SpaceX et X s’en prend désormais à OpenAI et son dirigeant, Sam Altman. Elon Musk leur reproche de ne pas respecter leur engagement initial: développer une IA au profit de l’Humanité. Sam Altman répond en tentant de démontrer que les intentions de Musk ne sont pas si louables…

Le torchon brûle entre le big boss d’OpenAi, Sam Altman, et le sulfureux entrepreneur milliardaire Elon Musk depuis la plainte déposée par ce dernier contre OpenAi et ses fondateurs Sam Altman et Greg Brockman.

Voici une semaine, en effet, que les avocats d’Elon Musk ont déposé une plainte devant un juge de San Francisco. Le reproche du boss de Tesla, X et SpaceX ? La société OpenAI dont il est, à l’origine en 2015, co-fondateur n’aurait pas respecté sa philosophie de départ. Car, à la base, il s’agit d’une association à but lucratif limité. Les initiateurs du projet avaient acté l’ambition de créer une intelligence artificielle « bénéfique pour l’humanité » et « open source ». C’est-à-dire qu’elle prévoyait notamment de rendre son code public et de partager ses méthodes de recherche. La plainte de Musk souligne donc qu’aujourd’hui, OpenAI a violé ce contrat puisque depuis lors, OpenAi agit comme n’importe quelle entreprise lucrative et ne partage pas ses « secrets de fabrication ». Elle s’est par ailleurs adossée à Microsoft pour des milliards de dollars. Musk entend donc contraindre Sam Altman et OpenAI à redéfinir un nouveau cap. Un souhait qui placerait Musk en chevalier blanc de l’éthique digitale.

Seulement voilà, la réponse d’Altman ne s’est pas fait attendre. Et l’ancien associé de Musk dans OpenAi dévoile une série d’informations qui permettent d’imaginer les intentions de Musk. Celles-ci ne seraient pas aussi altruistes qu’il y paraît.

Musk aurait voulu diriger OpenAI

Dès le départ, Musk n’aurait pas été contre le fait que le projet rapporte de l’argent. Il aurait d’ailleurs lourdement poussé pour doper les investissements initiaux. Un engagement à la base prévu à hauteur de 100 millions, dont 45 de sa poche. Mais il aurait évoqué dans un e-mail que « pour éviter de paraître désespérés par rapport à ce que Google ou Facebook dépensent, nous devrions dire que nous démarrons avec un engagement de financement d’un milliard de dollars. »

Mais les intentions moins avouées de Musk se déduiraient, d’après les dirigeants d’OpenAi, de son comportement en 2017. À cette époque, OpenAI décide de changer ses statuts : ne plus se cantonner à un projet sans but lucratif mais devenir une véritable société, pour se permettre de grandir (et d’avoir de l’impact). Musk ne s’y serait pas du tout opposé. Il aurait même voulu en devenir le principal actionnaire et… le dirigeant. Il aurait par la même occasion envisagé de l’intégrer à Tesla, sa société de voitures électriques. « Tesla est la seule voie permettant de tenir la dragée haute face à Google, bien que l’espoir d’un contrepoids à Google soit faible», écrivait-il en 2018.

Altman, nouveau gourou

Depuis, OpenAi a fait son bonhomme de chemin en s’alliant à Microsoft qui a lourdement investi dans la star actuelle de l’IA. Sam Altman est devenu LA figure emblématique de cette technologie d’avenir et se positionne comme un ambitieux patron mondial capable d’imaginer mobiliser des milliers de milliards pour transformer le marché des semi-conducteurs et le préparer pour les années à venir. Au point que, comme le souligne Laurent Alexandre, observateur avisé du monde de l’IA, ce puisse être le point de départ d’une révolution totale de l’économie mondiale.

Or, Musk qui aime se positionner comme un homme qui changera l’Humanité, est totalement étranger à cette évolution. Il peine d’ailleurs à s’imposer vraiment sur le créneau de l’IA et ses différentes tentatives n’ont pas vraiment eu d’impact. Sa demande de « moratoire » pour freiner les progrès de l’IA n’a mené à rien, l’an passé, alors qu’il était entouré de nombreux scientifiques. Et la start-up xAI qu’il a lancée, au premier trimestre de 2023, n’a pas non plus réussi à s’imposer sur ce créneau. Grok, son robot conversationnel, est visiblement doté d’humour mais ne rivalise pas (encore?) avec ChatGPT.

Bref, la passe d’armes entre Musk et Altman ces derniers jours ressemble, pour beaucoup, à une guerre d’égos entre des associés qui n’ont pu s’entendre et entre lesquels le courant ne passe plus. Reste à voir si l’issue de cette plainte peut mener à des changements sur les activités de ChatGPT et, donc, sur les équilibres qui sont en train de se créer sur le marché à 200 milliards de dollars de l’IA… Car l’enjeu réel est là : qui pourra dominer ce créneau qui excite le monde de la tech actuellement et qui pourrait littéralement changer la face de l’Humanité. C’est en tout cas le pari d’Altman, Musk et consorts, lesquels sont persuadés que la technologie parviendra, à un horizon pas si lointain, à dépasser l’intelligence humaine…

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