Le chatbot Harvey remplacera-t-il les avocats ?
La révolution ChatGPT est en marche dans de nombreux secteurs professionnels. Le cabinet réputé d’avocats Allen & Overy (A&O) vient d’adopter un nouvel outil sur le modèle du robot conversationnel. Il a pour but d’assister les avocats dans divers aspects de leur travail juridique.
Allen & Overy (A&O), grand cabinet d’avocats international, innove en intégrant Harvey, un outil d’intelligence artificielle construit sur une version des derniers modèles d’Open AI (ChatGPT) améliorés pour le travail juridique.
Harvey est une plateforme intuitive qui utilise les techniques de traitement du langage naturel, de machine learning et d’analyse de données pour automatiser et améliorer différents aspects du travail juridique tels que l’analyse de contrats, les due diligence, le contentieux et la conformité réglementaire, explique le cabinet dans son communiqué.
Son fonctionnement est similaire à celui d’autres chatbots, tel que le plus célèbre, ChatGPT : les avocats tapent une demande et reçoivent une réponse qui tient compte des aspects réglementaires existants extraits de diverses bases de données, détaille le média luxembourgeois Paperjam. Les procédures législatives en cours qui ne sont pas achevées sont également prises en compte par l’IA en tant qu’éléments à intégrer potentiellement à l’avenir.
Des solutions plus rapides et plus adaptées
Harvey peut de cette manière aider à fournir des éclairages, des recommandations et des prévisions basées sur de grands volumes de données. L’objectif est de permettre aux avocats de proposer des solutions plus rapides et plus adaptées à leurs clients.
A&O souligne toutefois que tous les résultats donnés par le robot sont soigneusement examinés et vérifiés par leurs avocats et que Harvey ne remplacera aucune de ses forces de travail et ne réduira pas les heures facturables.
Le programme a été lancé à titre d’essai en novembre 2022. 2.000 avocats du réseau A&O l’ont testé et ont donné des retours positifs. Actuellement, Harvey est utilisé par environ 3.500 avocats répartis dans une quarantaine de bureaux dans le monde opérant dans plusieurs langues.
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“Harvey change la donne”
David Wakeling, chef du groupe d’innovation des marchés au sein d’Allen & Overy commente cette petite révolution dans le secteur: “Je suis à l’avant-garde de la technologie juridique depuis 15 ans, mais je n’ai jamais rien vu de tel que Harvey. Il change la donne et peut libérer la puissance de l’IA générative pour transformer le secteur juridique. Harvey peut travailler dans plusieurs langues et dans divers domaines de pratique, offrant une efficacité et une intelligence sans précédent. Dans nos tests , nous avons vu des résultats étonnants.” Pour Wim Dejonghe, associé principal chez A&O, l’utilisation de Harvey marque une nouvelle ère pour le cabinet d’avocats et le secteur juridique.
Car, le robot Harvey va fondamentalement changer la façon dont les avocats exploitent leur temps. Baptiste Aubry, responsable de la réglementation des services financiers du cabinet luxembourgeois, explique dans une interview donnée au média Paperjam : «Au-delà de la création d’un contenu qui imite un type d’intelligence, elle démontre une véritable logique juridique et constitue un outil de travail immédiatement utile pour le juriste.» Il ajoute : «Cela nous fait gagner énormément de temps. C’est comme si nos avocats avaient un sparring-partner pour commencer toute analyse juridique», quel que soit le domaine du droit.
Premier cas d’utilisation dans le « Magic Circle »
Les cabinets d’avocats de la City s’intéressent depuis des années aux technologies basées sur l’IA, mais il s’agit du premier cas d’utilisation de ces technologies dans le Magic Circle, soit les cabinets d’avocats considérés comme les cinq plus prestigieux de Londres et d’Europe dont Allen & Overy fait partie.
A&O a la réputation d’être un cabinet à la pointe de la technologie. Il a été l’un des premiers cabinets à lancer un centre de technologie et d’innovation en interne en 2017, commente le site spécialisé Legal Cheek. Un hub dédié héberge ainsi à titre gracieux de nouvelles start-up technologiques dans une zone spécialement conçue de son siège londonien.
La start-up à l’origine de l’outil, qui s’appelle également Harvey, a bénéficié d’un financement de démarrage de 5 millions de livres de la part d’OpenAI Startup Fund, une initiative gérée par les créateurs mêmes de l’outil star ChatGTP.
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“Les textes qui en sortent sont utilisables à 70% »
A&O n’est pas le seul cabinet d’avocats à avoir recours à l’IA. Le cabinet belge De Man, qui compte 30 avocats opérant dans quatre sièges, a également fait de ChatGPT un outil informatique à part entière, rapporte L’Echo.
Les avocats y recourent notamment pour écrire des articles de blog sur des sujets juridiques, rédiger des parties de contrats ou établir des offres. En somme, le travail juridique routinier est sous-traité à l’IA. “Les textes qui en sortent sont utilisables à 70%. Ensuite, il suffit de corriger ici et là certains éléments. Cela nous épargne facilement plusieurs heures de travail”, souligne De Man. “Au début, le système avait ses partisans et ses opposants. Depuis lors, les partisans ont convaincu tout le monde.”
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