Le Belge Pascal Van Hentenryck dirige un prestigieux centre de recherche américain sur l’IA: “C’est un moment magique”

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Depuis la percée des agents conversationnels (chatbot) utilisant l’intelligence artificielle (IA) tel que ChatGPT, les développements basés sur l’IA ont pris de l’ampleur. En tant qu’entreprise, que pouvez-vous en faire ? Comment l’implémenter? Pascal Van Hentenryck est un spécialiste en la matière. Ce Belge, professeur d’IA, dirige à Atlanta l’un des 11 instituts de recherche sur l’intelligence artificielle, qui devraient transformer l’économie américaine. Nos collègues de Trends se sont entretenus avec lui à Atlanta.

“Je suis un vrai zinneke”, déclare Pascal Van Hentenryck, alors qu’il était l’invité, à Atlanta, de la mission commerciale Future of Digital de la fédération sectorielle Agoria, en décembre dernier. Ce Belgo-Américain est né à Bruxelles d’une mère wallonne et d’un père louvaniste. Après avoir obtenu un diplôme d’ingénieur en informatique à l’université de Namur et un doctorat en Allemagne, il s’est installé aux États-Unis à la fin des années 1980. C’est là qu’il a entamé une carrière universitaire internationale.

Fiabilité

“Nous vivons une période passionnante”, s’enthousiasme Pascal Van Hentenryck. “Je travaille dans le domaine de l’IA depuis longtemps et de temps en temps, il y a des moments où quelque chose de magique se produit. Lorsque j’ai commencé, cela avait été le cas parce que l’apprentissage automatique (partie de l’IA, ndlr) était en train d’émerger. Aujourd’hui, ce moment magique se produit d’une manière très différente. Les possibilités, qu’offre la puissance de calcul des ordinateurs, d’internet et de la technologie de l’IA, se conjuguent. La convergence de ces trois éléments fait que nous vivons un moment unique”.

Le professeur est évidemment conscient des dangers et des possibles dérives de l’IA, mais il en voit surtout les opportunités : “La plupart des clients et des partenaires de l’institut ne veulent pas créer une IA autonome, ils veulent surtout que l’IA améliore les compétences des gens. Bien sûr, il faut se protéger contre les choses négatives qui peuvent arriver. Nous en tenons donc compte dès la phase de conception. Nous savons à l’avance ce que nous voulons faire et quelle fiabilité nous voulons. Cela devrait déjà être pris en compte dès la conception du logiciel. Chaque projet d’IA devrait être abordé de cette manière, mais ce n’est pas le cas pour tout le monde.”

Onze instituts de recherche

Pour préparer l’industrie et la société américaines à l’évolution rapide de la technologie de l’IA, la National Science Foundation (NSF) a investi 220 millions de dollars dans 11 instituts de recherche à travers les États-Unis. Outre les instituts gouvernementaux et les universités, Google, Amazon, Intel et Accenture sont également partenaires du programme.

Les États-Unis ont ainsi deux ans d’avance sur l’Union européenne. Cette dernière a annoncé en juin qu’elle investissait un montant similaire – 220 millions d’euros – dans la recherche sur l’IA. Comme aux États-Unis, le programme rassemble des universités, des organismes gouvernementaux et des entreprises dans des projets de recherche autour de thèmes définis.

En 2012, après 20 ans passés à l’université Brown de Rhode Island, Pascal Van Hentenryck s’est installé quelques années à Brisbane, en Australie, avant de revenir aux États-Unis pour un poste à l’université du Michigan. En 2019, il est passé de l’État du Michigan, au nord, à l’État de Géorgie, au sud. C’est là que se trouve l’université de recherche (de renommée mondiale !) : le Georgia Institute of Technology – “Georgia Tech”. Trois des onze centres américains pour la recherche sur l’intelligence artificielle sont affiliés à cette université.

Chacun de ces instituts a un contenu différent. Pascal Van Hentenryck est directeur de l’institut à vocation d’ingénierie, le NSF (Electrical and Computer Engineering). Le professeur dirige une équipe, qui ne cesse de s’agrandir, de 30 chercheurs et 50 étudiants.

Approche

Comment prévoir et gérer les risques encourus par les réseaux électriques, basés sur les énergies renouvelables, lorsque le vent tombe soudainement? Si les clients d’un fabricant de semi-conducteurs modifient légèrement leur commande, comment la chaîne de production gère-t-elle cette modification? Si nous nous lançons dans le commerce électronique, comment organiser la livraison ? Les recherches menées par l’institut d’IA de Van Hentenryck partent de questions pratiques, posées par les entreprises. Les étudiants de l’institut peuvent ainsi passer la moitié de leur temps sur le terrain.

Supposons qu’une PME, proposant un produit, veuille savoir comment elle peut utiliser l’IA. Comment l’implémenter? “Vous pouvez alors construire un pipeline”, explique Pascal Van Hentenryck. “Si vous avez du matériel, vous avez aussi une couche de données. Il s’agit de comprendre ces données. Vous pouvez le faire en les analysant. Détectez-vous des choses ? Reconnaissez-vous certains modèles ? Voyez-vous des anomalies ? Une fois que vous les avez trouvées, vous pouvez faire des prédictions”.

L’important, ce sont ces prédictions, car elles permettent de prendre de meilleures décisions. “L’IA donne aux gens un tableau de bord, pour ainsi dire, sur lequel ils peuvent très rapidement voir l’impact de leurs décisions”, conclut Pascal Van Hentenryck. “Vous pouvez donc créer des logiciels et transformer les données en produits pour vos clients basés sur l’IA. Je pense qu’il y a une opportunité incroyable en ce moment. Ce domaine va s’épanouir dans les années à venir.”

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