“L’éthique politique, une notion à géométrie variable”

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Le directeur du Centre de recherche et d’information socio-politiques (Crisp), Jean Faniel, scrute le financement de la vie politique depuis des années. “C’est toujours le même scénario: le politique modifie les règles sous la pression des médias et de l’opinion et on repart jusqu’au coup suivant.”

Jean Faniel, directeur du Centre de recherche et d'information socio-politiques (Crisp).
Jean Faniel, directeur du Centre de recherche et d’information socio-politiques (Crisp).© PG

Les hommes et femmes politiques sont-ils trop bien payés en Belgique ?

Tout dépend du point de comparaison. Si vous prenez le salaire médian, tous les bourgmestres du pays, même dans les petites communes, sont au-dessus. Mais si vous comparez au joueur de football Axel Witsel (transféré en Chine pour un salaire annuel de 18 millions d’euros), les 15 à 16.000 euros mensuels du président de la Chambre (le mandat électif le mieux rémunéré du pays) restent faibles. Si vous voulez faire fortune, la voie politique n’est pas la plus lucrative. Et puis elle reste éphémère : il y a un mois, qui pensait que Paul Furlan risquait de perdre son poste de ministre ?

Les indemnités de sortie ne compensent-elles les aléas de ce côté éphémère de la vie politique ?

Elles ont été diminuées après que les indemnités de sortie de José Happart et de Stefaan De Clerck ont défrayé la chronique. C’est un peu toujours le même scénario : le politique modifie les règles sous la pression des médias et de l’opinion et on repart jusqu’au coup suivant. Dans la plupart des cas, nous ne sommes pas dans l’illégalité mais dans l’éthique politique, une notion à géométrie variable et évolutive dans le temps. Les révélations de ces dernières semaines sur les rémunérations au sein du groupe Nethys frappent particulièrement les citoyens, auxquels on demande dans le même temps des économies, des efforts, de la modération salariale.

La question de la rémunération des élus est-elle plus sensible aujourd’hui ?

Cette question est arrivée à la fin du 19e siècle avec l’élection des premiers députés du Parti ouvrier belge (ancêtre du PS), des élus qui n’étaient pas issus de l’élite économique et qui devaient abandonner leur métier pour devenir parlementaire. La rémunération prend en compte le caractère éphémère des mandats mais aussi la responsabilité des élus en matière de sécurité ou le souci d’éviter les tentations de corruption.

La suspicion vient du fait qu’ils sont juges et parties. Les parlementaires fixent eux-mêmes les règles auxquelles ils sont soumis. Pourquoi, par exemple, n’intègrent-ils pas le régime général de pension ou de chômage (un député non réélu n’a pas droit au chômage, d’où des indemnités de sortie bien supérieures à un préavis, Ndlr) ? Ce sont des débats à mener.

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