Le travail cherche sa “vraie fête”, entre enjeu économique majeur et polarisation exacerbée

Paul Magnette, le 1er mai 2023 BELGA PHOTO VIRGINIE LEFOUR
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Augmenter le taux d’emploi et lutter contre les pénuries: voilà “la” priorité de la prochaine législature. Mais en ce 1er mai, les partis rivalisent de bons mots et se disputent la fête. A un peu plus d’un mois d’élections qui font frémir.

Quelle est la priorité numéro un pour la Wallonie au lendemain des élections? “L’emploi, l’emploi, l’emploi.” Voilà ce que Cécile Neven, CEO de l’Union wallonne des entreprises (devenue AKT for Wallonia), exprimait la semaine dernière, lors d’un débat consacré à l’avenir de la Région. Il y fut question d’activation des chômeurs, mais aussi de formations à clarifier ou d’esprit d’entreprise à insuffler. PS et N-VA ne s’entendait pas sur le sujet, mais le ton était constructif.

Ce 1er mai, la fête du travail s’ouvre avec des muguets à offrir mais, surtout, avec des boulets de canon à s’échanger verbalement, à un mois d’élections cruciales pour le pays. Les partis se disputent une nouvelle fois la paternité de ce rendez-vous, même s’il s’agit bien, historiquement, d’un rendez-vous créé par l’Internationale socialiste pour étaler ses “revendications ouvrières”. On ne doit aux libéraux du MR un rendez-vous similaire que depuis 2000, afin de célébrer le “libéralisme social” cher à Louis Michel.

Le combat PS – MR

Paul Magnette, président du PS, pique: “Chaque année, c’est la même chose, malheureusement, le MR, le Mouvement réformateur ou le Mouvement des riches, comme vous préférez, célèbre ou prétend célébrer la fête du travail. C’est quand même un comble quand on se souvient que c’est le MR qui a refusé d’indexer les salaires sous le gouvernement précédent – les travailleurs ont perdu des dizaines de milliers d’euros. C’est le MR qui a pratiqué l’austérité dans les services publics, les soins de santé, qui veut encore couper six milliards dans le budget des soins de santé aujourd’hui. C’est le MR qui a bloqué la réforme fiscale qui aurait permis de donner 300 euros nets en plus à des millions de travailleurs.”

C’est la campagne électorale, on s’aime et on échange des quolibets.

Georges-Louis Bouchez, lui, bat le pavé pour appeler à participer à “la seule vraie fête du travail, celle du vrai parti des travailleuses et des travailleurs”. Leitmotiv du président du MR: “Il faut remettre les Belges au boulot, le taux d’emploi est trop bas. Plus de Belges qui travaillent, cela permettait de ramener 20 milliards d’euros au budget de l’Etat.” Et de fustiger à l’envi le piètre bilan des socialistes en matière d’emploi dans le Hainaut.  Il s’agit de défendre “le travail moins taxé, plus récompensé”, défend le député Denis Ducarme.

Plus que jamais, socialistes et libéraux s’affrontent pour la première place en Wallonie et à Bruxelles, qui pourrait être décisive au soir du 9 juin. Le PS veut rassembler les progressistes, étroitement lié avec Ecolo, jouant le chaud et le froid avec le PTB, courtisant sans relâche les Engagés de Maxime Prévot. Le MR espère avoir cadenassé le scrutin en s’alliant avec le CD&V en Flandre, pour un bloc de centre-droit. Pro-travail, cela s’entend.

Cela cogne, même si, au vu de l’éclatement des voix et du centrisme des Engagés, les frères ennemis devront peut-être cohabiter, à nouveau.

Taxer les riches

La quête de la “vraie fête du travail” a un troisième prétendant, en la personne d’un PTB qui n’est jamais à l’abri de surenchères. “La taxation des super riches est redevenue un enjeu majeur de la campagne et c’est au PTB qu’on le doit”, rappelait son président, Raoul Hedebouw, fin avril. En dénonçant le traité d’austérité européen et en martelant son désir de ruptures.

Tiens donc, taxer les riches, voilà ce que porte Thierry Bodson, président de la FGTB, en ce 1er mai: “Taxer le patrimoine de plus de 1,250 million peut rapporter entre 8 et 10 milliards“, clamait-il au Soir, mardi. En dénonçant lui aussi l’austérité qui menace: “C’est intenable de réaliser cet effort (induit par les règles budgétaires européennes – Ndlr) uniquement en diminuant les dépenses. On ne pourra pas appliquer une râpe à fromage de 10 % d’économies sur tous les postes : les pensions, la sécurité sociale… Sinon, ce sera le bain de sang social avec les conséquences que cela peut avoir pour la démocratie.”

Voilà au moins de quoi peser l’enjeu crucial du 9 juin prochain, entre taxation des riches, création d’activités et bras de fer gauche-droite. Dans un bon mois, on devrait savoir à quelle sauce on sera mangé. Ou pas, tant on risque surtout d’assister… à une nouvelle paralysie.

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