La (courte) revanche de l’Europe sur les États-Unis
Les bonnes perspectives économiques de l’Europe se confirment. Les indices PMI reprennent clairement des couleurs et l’inflation se tasse, ce qui renforce la probable baisse des taux du mois de juin. À l’inverse, la perspective d’un “hard landing” se dessine aux États-Unis, englué dans l’inflation.
Trajectoire opposée, entre les deux blocs économiques occidentaux. En tout cas à court et moyen terme. Car cela ne remet bien sûr pas en cause les avantages concurrentiels à long terme des États-Unis sur l’Europe (énergie, démographie et croissance). Mais le ciel s’éclaircit clairement sur l’économie de la zone euro.
Pour preuve, la dernière publication des indices PMI de HCOB/S&P Global pour le mois de mai. L’indice composite poursuit sa progression depuis le début de l’année, à 52,3, en expansion donc, au plus haut depuis un an. L’indice PMI des services est à 53,3, tandis que l’indice PMI manufacturier se reprend de 45,7 à 47,4, au plus haut depuis 15 mois.
“Les données PMI du mois de mai suggèrent une consolidation de la reprise économique de la zone euro”, écrit Cyrus de la Rubia, chef économiste à la Hamburg Commercial Bank. En termes de croissance, le deuxième trimestre devrait se solder par une nouvelle croissance de 0,3%, ce qui pourrait porter la croissance annuelle à “1% (voire au-delà)” en 2024. Ce n’est pas extraordinaire, mais c’est mieux qu’anticipé.
Le rapport note “un regain d’optimisme en Allemagne”. Elle tire cette fois l’économie de la zone euro vers le haut, au contraire de la France qui se contracte légèrement. C’est grâce au secteur allemand des services, le secteur manufacturier continuant à mieux se comporter dans l’Hexagone.
La baisse des taux en juin se confirme
Une économie qui reprend de la vigueur donc, mais qu’en est-il au niveau de l’inflation ? Là encore, la zone euro semble aller dans la bonne direction. “Les prix moyens facturés pour les biens et services ont augmenté au rythme le plus lent depuis six mois”, note le rapport, qui confirme donc la tendance vers un retour à l’objectif d’inflation de 2% de la Banque centrale. Rappelons qu’en avril, le taux d’inflation s’élevait à 2,4%.
Clairement, la voie s’ouvre vers une baisse des taux en juin : “Contrairement aux mois précédents, les données sur les prix sont porteuses de bonnes nouvelles pour la BCE : l’inflation des prix payés et celle des prix facturés ont toutes deux ralenti par rapport à avril, ce qui devrait conforter l’institution dans son apparente décision de baisser son taux directeur lors de sa prochaine réunion du 6 juin”, précise de la Rubia, qui reste toutefois prudente sur les prochaines baisses de taux : “Cette modération de l’inflation n’est probablement pas suffisamment marquée pour amener la BCE à annoncer de nouvelles réductions des taux après celle du mois de juin.” Il faudra voir comment se comporte l’inflation dans un contexte de rebond économique.
Aux États-Unis, le retour du spectre du hard landing
Aux États-Unis, la croissance est retombée à 1,6% au premier trimestre 2024, contre 3,4% au quatrième trimestre 2023. C’est toujours beaucoup mieux qu’en Europe, mais la chute est brutale. Le problème est que dans le même temps, l’inflation stagne, à 3,4% en avril. Les taux à long terme remontent autour de 5% et Wall Street boit davantage la tasse que les places boursières européennes.
Nos voisins atlantiques ont sans doute crié victoire trop vite, et c’est maintenant une certitude, la BCE baissera ses taux avant la Fed, alors que la Réserve fédérale américaine avait été la première à dégainer. Certains gouverneurs songent même à de nouvelles hausses des taux, apprend-on dans les minutes de la dernière réunion de la Fed.
Du côté de Jamie Dimon, on aime souvent jouer à se faire peur. Mais le CEO de JP Morgan n’est pas le dernier des informés sur les affaires économiques. Interrogé par CNBC, Dimon remet sur la table la perspective d’un “hard landing”. Selon lui, le pire serait de connaître la stagflation, une croissance molle et un taux d’inflation qui reste important. Il craint devoir passer par une récession pour briser l’inflation.
“Je pense que l’inflation est plus tenace qu’on ne le pense. Je pense que les chances sont plus élevées que d’autres ne le pensent, principalement parce que l’énorme quantité de mesures de relance budgétaire et monétaire est toujours dans le système, et qu’elle continue peut-être à générer une partie de cette liquidité. Le monde est-il préparé à une inflation plus élevée ? Pas vraiment“, a-t-il prévenu.
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