Jeholet: “Donner de l’autonomie à la Flandre en échange d’argent, ce serait une faute”
Le ministre-président de la Fédération Wallonie-Bruxelles souligne à quel point la situation budgétaire des entités francophones est grave. Et appelle à un projet francophone « ambitieux, moderne et réaliste ».
Pierre-Yves Jeholet (MR), ministre-président de la Fédération Wallonie-Bruxelles, est l’invité de notre Trends Talk pour conclure une semaine marquée par la fête du 27 septembre et par la confirmation des difficultés budgétaires des entités francophones. Une négociation secrète aurait été menée entre présidents pour diminuer le nombre de ministres et transférer des compétences vers les Régions, en vue de la prochaine législature.
« Mon message durant cette semaine a été de dire que l’on ne doit être fier d’être francophone, souligne Pierre-Yves Jeholet. En Flandre, ils sont beaucoup plus fiers de ce qu’ils sont et de ce qu’ils ont. Pour autant, est-ce que tout va bien du côté francophone? On ne va pas dire ça parce que nous avons des défis à relever face à une situation financière qui est terriblement difficile. »
« Ne répétons pas leurs erreurs du passé »
Dans plusieurs médias, le ministre-président a lancé un véritable signal d’alarme cette semaine. « Je l’ai fait parce que nous allons entrer en campagne électorale et j’ai peur que des partis fassent des promesses qu’ils ne pourront pas tenir, dit-il. Si les citoyens s’éloignent du monde politique, c’est aussi en raison de cela. Aujourd’hui, il faut oser regarder cette situation budgétaire en face. »
Le libéral est fier que les différents gouvernements du pays soient venus en aide aux citoyens et aux entreprises face aux différentes crises vécues ces dernières années : pandémie de Covid, inondations en Wallonie, Ukraine, énergie et inflation… « On a bien fait de le faire, mais on a endetté notre pays et nos entités fédérées. La situation est très grave. Je prends l’exemple de Bruxelles où elle est la plus grave : l’endettement correspond aujourd’hui à 194% des recettes produites sur une année à Bruxelles, on va passer en 2028 à près de 300%. C’est intenable. » En Fédération Wallonie-Bruxelles, 75% du budget est dédié à l’enseignement, dont 85% pour les salaires. « Une seule indexation, c’est 130 millions d’euros. »
Pierre-Yves Jeholet met en garde : « Certains parlementaires socialistes se disent prêt à discuter avec la Flandre pour donner plus d’autonomie, ce que réclament les nationalistes flamands, en échange d’un peu d’argent. Il ne faut pas, ce serait une faute parce que ce serait répéter les erreurs du passé. On l’a fait pour l’enseignement : depuis des dizaines d’années, on a reçu beaucoup d’argent, on a investi et ce n’est pas pour cela que l’enseignement a augmenté sa qualité. Ce n’est pas qu’une question d’argent. C’est pour cela que j’ai lancé l’appel cette semaine : osons un projet francophone ambitieux, moderne, réaliste. »
C’est-à-dire ? « Il faut travailler sans tabous et en cassant les codes avec les Régions. » Un pré-accord aurait été signé entre les présidents des trois partis de la majorité pour transférer des compétences, hors enseignement et culture, aux Régions ainsi que pour diminuer le nombre de ministres ? « Oui à une réorganisation de l’espace francophone, mais j’attire vraiment l’attention sur ceci : n’ayons pas un débat institutionnel. Si on régionalise une compétence sans rien changer, je ne vois pas la plus-value pour le citoyen. Il faut travailleur sur le nouveau modèle à mettre en place. » Pierre-Yves Jeholet l’illustre en évoquant l’accueil de la petite enfance ou la formation en alternance. Cela doit être décidé, dit-il, avant la mise en place des gouvernements.
Présidence du MR : pas d’élections internes
Le numéro un libéral francophone souligne aussi qu’il ne souhaite pas d’élection présidentielle interne au MR, alors que le mandat de Georges-Louis Bouchez arrive à son terme fin novembre. « Je le dis très clairement : je ne suis pas favorable à des élections internes. Nous sommes à quelques mois d’échéances très importantes pour notre pays, on n’a pas intérêt à perdre du temps pour une élection interne, voire avoir des divisions. »
Pourquoi cela traîne-t-il ? « Parce qu’il y a peut-être des gens qui pensent différemment que moi. » On a cité son nom ? « Je suis cohérent : je ne vais pas être candidat à une élection que je ne souhaite pas. Cela dit, qu’il l’ait voulu ou pas, Georges-Louis incarne peut-être trop à lui seul le parti. Or, le MR a un personnel exceptionnel : des ministres, des chefs de groupe, des parlementaires, mas aussi au niveau local : ce dont on a besoin, c’est se déployer, utiliser les forces des uns et des autres. »
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