Faire travailler les Belges plus longtemps : on n’en prend pas du tout le chemin

Baptiste Lambert

Les Belges sont de plus en plus nombreux à prendre leur pension avant l’âge de 65 ans. C’est ce qu’il ressort de l’étude annuelle d’Acerta. Dans le même temps, le nombre de personnes sujettes à burnout explose. Pour freiner le coût du vieillissement, le bonus pension, qui s’appliquera dès le 1er juillet, parait bien maigre.

La volonté politique et puis la réalité. La pension légale a été fixée à 65 ans, il y a plusieurs années. Le gouvernement précédent de Charles Michel (MR) a ensuite relevé cette limite à 66 ans, à partir de 2025, et à 67 ans à partir de 2030.

La question de savoir si les Belges suivront cet objectif reste entière. Les chiffres d’Acerta, dans son enquête annuelle, montrent que les Belges s’en éloignent. En 2019, 32,9% des Belges partaient à la pension avant l’âge de 65 ans. En 2023, ils étaient 41,6%. Dans le cas des secteurs de la construction, la logistique et le transport, on frôle les 60%, mais on y commence généralement sa carrière plus tôt. Du côté des indépendants, c’est encore plus important : l’année dernière, 2 indépendants sur 3 ont pris leur retraite avant l’âge de 65 ans.

La relation au travail semble se dégrader. Si on leur laissait le choix, 8 Belges sur 10 prendraient leur retraite avant 65 ans. Ces chiffres sont à mettre en parallèle avec l’explosion des maladies de longue durée. Environ 1 travailleur sur 6 présentait un risque élevé de burnout en 2023. En 2014, ils n’étaient que 1 sur 10, a révélé, lundi, une étude du Service pour la prévention et la protection au travail, Idewe. Le pourcentage de personnes souffrant “d’un épuisement émotionnel important” est passé de 22% à 30% dans le même laps de temps. Un travailleur sur cinq est sujet à “une distanciation élevée” par rapport à son travail – il n’en voit pas l’utilité.

Bonus pension

On savait déjà que la réforme des pensions était totalement insuffisante pour régler le coût du vieillissement. La Commission européenne ne devrait d’ailleurs pas donner sa bénédiction à la réforme de Karine Lalieux (PS), car elle n’est pas assez soutenable financièrement, ce qui aura sans doute un impact sur l’argent du plan de relance que l’Europe accorde à chaque État membre.

Il est permis de douter que le seul bonus pension améliore significativement la situation. Alors qu’il entrera en application ce 1er juillet, il accordera, à la première date possible de départ à la pension, 3.927 euros la première année de travail supplémentaire, 7.855 euros la deuxième, et 11.782 euros la troisième. Au total, le bonus pension pourra donc s’élever à 23.565 euros.

Qui voudra travailler trois années de plus, alors que 4 Belges sur 10 ne vont déjà pas jusqu’au bout ? D’autant que, dans le même temps, la pension minimum a sérieusement augmenté depuis 2020 : de 327 euros nets pour un isolé et de 558 euros nets pour un ménage. Le travailleur doit pour cela justifier une carrière de 20 ans.

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