Décryptage de la réforme sur l’union douanière, qualifiée de la plus “ambitieuse” depuis sa création

Image d'illustration © Getty images

Une refonte de l’union douanière qui fait appel à l’intelligence artificielle.

Cela fait 55 ans que l’union douanière existe. A sa création en 1968, ses objectifs étaient entre autres de faciliter le commerce pour les entreprises européennes, et d’harmoniser les droits de douane sur les marchandises extra-Union européenne. Un demi-siècle plus tard, forcé de constater que tout ne fonctionne pas comme prévu.

La Commission européenne elle-même identifie des “pressions” qui pèsent aujourd’hui sur le fonctionnement des douanes avec l’accroissement “considérable” du volume des échanges, en particulier dans le secteur du commerce en ligne. Est aussi pointé du doigt une multiplication rapide des normes européennes et la “situation géopolitique”. Veuillez ici comprendre les manquements constatés dans le respect des sanctions sur les produits russes… 

D’où la volonté de refonder le système douanier. Cette réforme, qualifiée de “la plus ambitieuse et la plus complète que nous ayons proposée depuis le début de l’union douanière” par Paolo Gentiloni, commissaire européen à l’Économie, doit remédier à ces défaillances. 

Un partenariat avec les entreprises qualifié d’une “première au niveau mondial” 

Le cœur de cette refonte est la création de l’Autorité douanière de l’Union européenne, qui sera chargée de superviser la plateforme des données douanières, “moteur” de nouveau système. L’objectif principal: réduire au minimum l’intervention des douaniers. Une proposition qui répond à l’objectif fixé par la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen de réduire les charges d’importation de 25%.

Ainsi, les entreprises qui souhaitent introduire des marchandises dans l’Union européenne pourront enregistrer toutes les informations sur leurs produits et leurs chaînes d’approvisionnement sur la nouvelle plateforme des données douanières. Elles n’auront à interagir qu’avec un seul portail et ne devront introduire leurs données qu’une seule fois pour des envois multiples. 

Dans certains cas, lorsque les processus opérationnels et les chaînes d’approvisionnement sont totalement transparents, les opérateurs économiques les plus fiables, autrement appelés “Trust and Check” (Confiance et Contrôle), pourront mettre leurs marchandises en circulation sans aucune intervention douanière active. La catégorie Trust and Check renforce le régime déjà existant pour les opérateurs économiques agréés (OEA).

L’intelligence artificielle sera utilisée pour analyser et contrôler les données et pour détecter les problèmes avant même que les marchandises n’aient commencé à être acheminées vers l’UE. Les autorités européennes souhaitent ainsi que les douaniers se concentrent uniquement sur le blocage de marchandises dangereuses ou illicites dans l’Union et sur le respect du nombre croissant de lois européennes concernant le changement climatique, la déforestation ou le travail forcé.

Arrêter les frais supplémentaires à l’arrivée d’un colis

Qui ne s’est jamais retrouvé à devoir payer d’importants frais de douane à l’arrivée de son colis en Belgique ? Une mauvaise surprise à laquelle la Commission veut mettre fin. Pour se faire, les plateformes de vente en ligne devront veiller à ce que les droits de douane et la TVA soient intégralement payés lors de l’achat. Ces plateformes en ligne devenant les importateurs officiels, les consommateurs européens auront l’assurance que tous les droits ont été acquittés et que leurs achats sont sûrs et conformes aux normes de l’UE.

Dans le même temps, la réforme met fin au seuil largement exploité par les fraudeurs, qui permet d’exonérer de droits de douane les marchandises d’une valeur inférieure à 150 €. En effet, jusqu’à 65% de ces colis entrant dans l’UE sont actuellement sous-évalués afin d’éviter les droits de douane à l’importation.

Cette réforme en profondeur réduira les formalités administratives et les coûts de conformité pour les entreprises, renforcera la transparence et la sécurité des achats en ligne pour les citoyens de l’UE et introduira des processus plus simples et innovants pour les autorités.

Paolo Gentiloni

La réforme simplifie également le calcul des droits de douane pour les marchandises de faible valeur les plus courantes achetées en dehors de l’UE, en réduisant à seulement quatre catégories les milliers de catégories de droits de douane existantes. Il sera ainsi beaucoup plus facile de calculer les droits de douane pour les petits colis, ce qui aidera les plateformes et les autorités douanières à mieux gérer chaque année le milliard d’achats entrant dans l’UE réalisés par le commerce en ligne. 

Ces mesures devraient générer des recettes douanières supplémentaires de l’ordre de 1 milliard d’euros par an selon la Commission, et permettra d’économiser jusqu’à 2 milliards d’euros annuels en coûts de fonctionnement. La nouvelle plateforme douanière ouvrira en 2028 aux envois réalisés dans le cadre du commerce en ligne, puis en 2032 sur une base volontaire aux autres importateurs, et deviendra enfin obligatoire en 2038.

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