Quelle porte de sortie pour la formation d’un gouvernement bruxellois ?
La formation du gouvernement bruxellois est au point mort. Certains estiment qu’il sera plus simple d’y voir clair après les élections communales, mais rien n’est moins sûr. Aucune piste de sortie ? Il est parfois bon de revenir à la simple arithmétique.
Le passage en force du report de la zone LEZ, à Bruxelles, a signé la fin de la mission de la formatrice Elke Van den Brandt. L’écologiste flamande a débranché la prise, samedi dernier, pointant la responsabilité des francophones et en particulier le MR. Il se dit toutefois que la cheffe de file de Groen, premier parti du côté flamand, avec 4 sièges, tournait en rond depuis plusieurs jours, voire plusieurs semaines. Impossible pour elle de rassembler une majorité de 9 sièges sur 17, dans le collège néerlandophone à Bruxelles.
Les résultats des élections, le 9 juin dernier, et la percée relative du Vlaams Belang et du PVDA, 1 siège chacun, ont compliqué les choses. Car pour la première fois, 4 partis étaient indispensables pour former une majorité du côté flamand. Or, les accords intra-bruxellois, qui découlent d’un fragile équilibre communautaire, prévoient deux postes de ministre et un poste de secrétaire d’État pour les Flamands de Bruxelles.
4 partis, 3 strapontins, vous avez compris le nœud du blocage et le motif de refus du cd&v, qui, avec son seul siège, ne veut pas devenir la quatrième roue du tricycle. On peut le comprendre : soutenir la majorité depuis le Parlement sans responsabilité politique est un exercice ingrat, d’autant qu’il viserait à soutenir la majorité sortante, composée de Groen, de l’Open Vld et de Vooruit, les deux derniers nommés rassemblant chacun 2 sièges.
Le trouble-fête
Le jeu des majorités est rendu encore plus compliqué par la présence de la surprise du scrutin de juin dernier : Fouad Ahidar et sa team, qui ont récolté 3 sièges, deuxième force bruxelloise. L’ancien socialiste flamand a même proposé ses services pour devenir formateur après le retrait d’Elke Van Den Brandt. Ce n’est pas illogique : la tradition veut que le parti ayant le plus de sièges mène la danse des consultations. La formation bruxelloise est beaucoup moins encadrée qu’au niveau fédéral. Ici, le roi ne joue par exemple aucun rôle pour nommer le formateur.
Fouad Ahidar n’a aucune chance d’aboutir. Bien que Groen ait longtemps laissé planer le doute et que Vooruit ne pose a priori aucun véto, alors qu’Ahidar a été chassé de ses rangs. Ce dernier a d’ailleurs proposé à ces deux formations de former une majorité : 4 + 3 + 2 = 9, le compte est bon. Mais le MR et Les Engagés, du côté francophone, ont adressé un véto à l’encontre de la Team Fouad Ahidar, jugeant ses positionnements de “communautaristes”.
La N-VA inéluctable ?
Si on exclut le VB, le PVDA et la Team Fouad Ahidar, et que le cd&v ne revient pas sur ses positions, ce qui est fort probable, la création d’une majorité bruxelloise du côté flamand ne repose plus que sur un seul parti : la N-VA et ses 2 sièges. Mais il faudrait pour cela que Groen revienne au centre du jeu. Les Verts flamands formeraient une majorité de 10 sièges, avec Vooruit, l’Open Vld et la N-VA.
Mais évidemment, ce n’est pas si facile. Pour la simple raison que Groen ne veut pas gouverner avec la N-VA, alors que cette dernière est prête à s’arrimer à la majorité sans responsabilité ministérielle. Il se dit même qu’un voire deux députés Groen seraient prêts à quitter le parti si cela devait être le cas, mettant de facto la majorité en difficulté.
Une ultime piste viserait à remplacer l’Open Vld par le cd&v, avec l’appui de la N-VA depuis le Parlement. Mais cette formule, à 9 sièges, serait encore plus fragile, en cas de défection d’un député Groen.
Le dangereux domino
Si cette majorité bancale du côté flamand venait à se former, il faudrait encore trouver un accord avec les francophones. Or les trois partis qui forment une majorité – MR/Engagés/PS – se sont justement entendus pour en finir avec le plan de mobilité Good Move. Un plan que Groen ne veut absolument pas voir disparaître.
Bref, une situation ubuesque à laquelle les francophones veulent mettre fin, à plus long terme, en réformant les institutions, par exemple en formant une circonscription commune, avec des listes communes, mais avec une représentation flamande garantie. Cela stopperait un stratagème électoral étrange à Bruxelles : des francophones qui votent pour une formation politique flamande pour donner plus de poids à leur voix. Groen et la Team Fouad Ahidar en ont d’ailleurs largement profité, en juin dernier.
Mais attention, jeu dangereux ! Car cela ouvrirait la boîte de Pandore institutionnelle, alimentant d’autres débats, au niveau fédéral par exemple. Un jeu dont les francophones ne connaitraient pas la fin.
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