1.200 km d’autonomie et chargée en 10 minutes: la nouvelle Toyota bientôt disponible en Belgique?
Une batterie deux fois plus légère et surtout deux fois moins chère que celles des véhicules électriques actuels. Le deuxième constructeur automobile mondial affirme être sur le point de mettre sur le marché les batteries à semi-conducteurs. De quoi s’agit-il et surtout quand pourrons-nous les utiliser ?
“Les batteries utilisées aujourd’hui dans les véhicules électriques, les batteries lithium-ion, fonctionnent sur la base d’un électrolyte liquide”, explique le spécialiste des batteries Philippe Vereecken (imec/Energyville/KU Leuven). “L’électrolyte, une solution saline liquide, assure la réaction chimique qui permet à l’électricité de circuler (en fait, il déplace les ions entre l’anode et la cathode, le pôle positif et le pôle négatif, nvdr). Dans les batteries à l’état solide, il n’y a pas de liquide, mais un électrolyte solide, qui est un très bon conducteur pour les ions”.
Toyota entend ainsi vendre 1,5 million de voitures 100% électriques en 2026. Le groupe annonce surtout des avancées dans le domaine des batteries. Il est question de batteries liquides low cost (coût inférieur de 40%! ) pour une autonomie de 1.100 km (temps de recharge de 30 minutes) en 2026 et surtout d’une percée technologique dans le domaine des batteries solides (1.200 km en une charge de 10 minutes! ). Le constructeur annonce une production de masse et en interne pour 2027-2028.
Plus d’énergie, moins inflammable
Les batteries à semi-conducteurs ont une “densité énergétique plus élevée”, affirme M. Vereecken. “Cela leur permet de fournir plus d’énergie avec moins d’espace et de poids”, confirme l’économiste politique Ron Stoop, qui suit de près la révolution de l’électrification du secteur automobile. « Elles sont donc avantageuses pour les voitures et les lieux compacts ».
“La batterie standard a une capacité de 250 wattheures par kilogramme au niveau des cellules”, a déclaré Maarten Steinbuch, professeur de génie mécanique à l’Université technique d’Eindhoven, à RTL Nieuws. “La plus récente a même une capacité de 500 wattheures par kilogramme. Avec les batteries à semi-conducteurs, nous espérons atteindre un niveau encore plus élevé”.
En outre, le développement de la batterie à l’état solide nécessiterait moins de matières premières rares. “On peut même les construire sans cobalt”, note Mark Pecqueur, professeur de technologie automobile à l’Université des sciences appliquées Thomas More. Cette batterie a aussi un autre avantage : les risques de surchauffe seraient réduits. “Il arrive qu’une batterie prenne feu”, note M. Vereecken. “Toutefois, si l’on remplace l’électrolyte liquide par un équivalent solide, la batterie dans son ensemble devient moins inflammable.”
Le Saint-Graal
Les batteries à l’état solide sont depuis longtemps considérées comme le “Saint-Graal de la technologie des batteries”. Dans quelle mesure l’objectif de Toyota de les mettre en production d’ici 2027 est-il réaliste ?
PHILIPPE VEREECKEN. Le terme de “Saint-Graal” est un peu exagéré. Je le vois plutôt comme une nouvelle étape dans l’évolution des batteries, mais c’est effectivement une étape difficile.”
TONY VERHELLE (journaliste automobile). “Quand Toyota dit cela, elle semble réaliste. Cette date correspond à peu près à ce qu’ils ont toujours visé et espéré. Mais l’état solide est de toute façon l’avenir pour les batteries. La question est de savoir dans quelle mesure cet avenir est proche.”
RON STOOP. “Toyota s’était au départ fixé pour objectif de produire des voitures à hydrogène. Ce projet ne semble plus à l’ordre du jour, bien que nous ignorons tout de leur popote interne. On sait aussi qu’ils sont également un peu en retard sur les objectifs d’électrification par rapport aux voitures américaines et chinoises. Peut-être essaient-ils ainsi de redorer un peu leur blason avec cette nouvelle batterie ? Quoi qu’il en soit tout cela est très prometteur.
MARK PECQUEUR. “Quand je vois que certains prototypes roulent déjà, 2027 est même loin. C’est dans quatre ans. Le timing ne devrait donc pas être le principal problème”.
Où se situe alors le problème ?
PECQUEUR. “Aujourd’hui, le problème n’est pas une question de véhicule, mais d’infrastructure. Car si vous disposez demain d’une telle batterie et que vous voulez la charger en 10 minutes – dans ce cas, 200 à 300 kilowattheures – vous avez besoin d’au moins 1,5 mégawatt d’énergie pour le faire. Or, pour vous donner une idée, 1,5 mégawatt cela correspond à la consommation d’environ 500 familles. Ces 500 ménages doivent donc être coupés du réseau pendant 10 minutes pour charger cette batterie. Pas une évidence”.
Notre réseau de stations de recharge n’est pas encore à la hauteur.
PECQUEUR. “le réseau actuel a été conçu pour les batteries d’aujourd’hui. Nous n’aurons besoin de ces 1,5 mégawatts que pour charger les camions. De quoi leur permettre de recharger leur batterie en une heure environ. Mais de toute façon cette infrastructure n’existe pas encore. Il n’y a pas encore une seule station de recharge rapide pour les camions en Belgique”.
YVES WOUTERS (Autofans.be). “L’énergie doit effectivement venir de quelque part. Mais je ne partage pas complètement le pessimisme. Car la recharge rapide ne sera jamais la solution à tous les problèmes. La recharge rapide ne sera jamais la norme. Tous les modes de recharge vont évoluer : les gens vont de plus en plus recharger leur véhicule à la maison. La demande de stations de recharge plus lente est plus forte que celle de stations de recharge rapide. Tous ceux qui roulent à l’électricité pendant quelques années se rendront compte que les stations de recharge rapide ne seront utilisées que pour les longues distances. Quoi qu’il en soit, le fait que cette technologie à semi-conducteurs sera bientôt disponible dans le commerce constitue un progrès considérable.”
PECQUEUR. “Si vous voulez charger une telle batterie à la maison, même avec un chargeur de 11 kilowatts, il vous faudra 24 heures. Mais il suffira de le faire une seule fois pour parcourir plus de 1 000 kilomètres.”
Problèmes techniques
Si Toyota ne donne aucun détail technique sur cette avancée, elle indique tout de même que la batterie a une autonomie de 1 200 kilomètres et peut être rechargée en moins de 10 minutes.
VEREECKEN. “À l’imec, nous avons également mis au point un électrolyte solide. Seulement il faut ensuite l’inclure dans une batterie, et c’est là que tous les petits et grands problèmes apparaissent. C’est probablement la raison pour laquelle cette technologie est restée en veilleuse pendant un certain temps. Je suppose que c’est aussi là que se situe leur percée. Ils ont trouvé une solution à l’un des plus gros problèmes, à savoir l’introduction de l’électrolyte dans une batterie. Et qu’ils ne voient plus d’impasse pour en faire un produit”.
VERHELLE. “Il y a peut-être encore quelques problèmes techniques, mais les Japonais pensent avoir franchi un obstacle majeur. Le problème, c’est que les voitures électriques sont beaucoup trop lourdes et beaucoup trop grosses, et qu’elles ont donc besoin de batteries beaucoup trop importantes. J’espère que la batterie solide pourra changer un peu la donne. D’ailleurs, Toyota n’est pas le seul à travailler sur cette technologie ; BMW y travaille également. Une telle concurrence appelle à des résultats”.
VEREECKEN. “Je fais parfois la comparaison avec les puces et la technologie CMOS : les chercheurs sont bloqués jusqu’à ce qu’il y ait une percée qui permette de résoudre un problème fondamental lié à une technologie. Je pense qu’on assiste a quelque chose de similaire ici. En résumé, il convient de faire preuve d’un optimisme prudent.
Voitures électriques
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