Le ministre fédéral de la Mobilité, Jean‑Luc Crucke (Les Engagés), a indiqué mercredi midi en commission Mobilité de la Chambre que le conseil d’administration de la SNCB se réunira le 23 juillet pour finaliser l’appel d’offres portant sur 600 nouvelles rames. Il a précisé que tout nouveau retard ferait peser des millions d’euros de coûts supplémentaires sur la société publique.
Jean‑Luc Crucke a été interpellé par plusieurs députés sur la procédure, visant à remplacer la moitié de la flotte de la SNCB d’ici 2032, avec un budget estimé entre 1,85 et 3,4 milliards d’euros.
En mars, l’entreprise ferroviaire avait sélectionné l’Espagnol CAF, écartant Alstom Benelux (environ 3 000 emplois en Belgique, dont 600 à Bruges) et Siemens, révélait Trends-Tendances. Cette décision avait ensuite été suspendue par le Conseil d’État, pour manque de transparence.
Faut-il relancer le marché public ?
Plusieurs députés, tels Annick Lambrecht (Vooruit), Dorien Cuylaerts (N‑VA) ou Franky Demon (CD&V), ont réclamé l’insertion d’un critère de préférence locale visant à préserver l’emploi chez Alstom à Bruges. Le ministre a réfuté l’idée, rappelant que le droit européen interdit tout avantage pour une entreprise locale et que la SNCB jouit d’une autonomie juridique et décisionnelle, pour éviter toute ingérence politique.
En outre, un avis juridique externe et une analyse technique, demandés par la SNCB, ont confirmé le classement initial, plaçant CAF en tête. Avec même un plus grand écart. Le CA d’Alstom était censé se positionner définitivement fin juin, mais a reporté sa décision après une réunion tendue. Ce sera le 23 juillet prochain, a promis le ministre de la Mobilité.
Beaucoup d’argent en jeu
Selon Jean‑Luc Crucke, quelques mois de retard coûteraient plusieurs millions pour garantir la sécurité et la disponibilité des rames, et un retard de deux ans entraînerait 170 à 200 millions d’euros supplémentaires, avec des pannes, des soucis de ponctualité, une perte de près de 14 000 places, un moindre confort et une accessibilité réduite. En cas de décision rapide, les premières rames seraient livrées dès 2029–2030.
En coulisses, certains observateurs proches du dossier avancent que relancer un marché public prendrait 4 ans de plus. D’autres pointent le manque de fiabilité d’Alstom dans de précédents contrats, notamment au niveau des retards de livraison, pour expliquer le choix de la SNCB.
Dans une interview accordée à Trends-Tendances, le ministre Crucke a regretté que son prédécesseur, Georges Gilkinet (Ecolo), n’ait pas poussé le CA de la SNCB à introduire un critère environnemental pour privilégier une entreprise locale. “Cela aurait faussé la mise en concurrence”, nous indique-t-on du côté écologiste. “Aucune autre entreprise qu’Alstom n’aurait soumis d’offre et le prix aurait sûrement décollé.”
Les députés ne lâchent pas
Les arguments du ministre n’ont pas convaincu les députés. Annick Lambrecht et Franky Demon estiment qu’Alstom pourrait livrer rapidement les 600 trains. « Les navetteurs belges veulent rouler dans des trains belges », s’est avancée la députée Vooruit.
Avec Hugues Bayet (PS), ils soulignent que d’autres pays européens favorisent pourtant l’économie locale. Frank Troosters (Vlaams Belang), président de la commission, a pour sa part déclaré : « La plus grande erreur a déjà été commise. Il est désormais important de sauver les emplois locaux ».
Fatah Jacquet (PTB) et Staf Aerts (Groen) ont exprimé leur colère suite au choix de CAF, évoquant le tram de Jérusalem-Ouest et accusant l’Espagnol CAF de soutenir « des occupations illégales d’Israël ». Jean‑Luc Crucke a répondu que tout soumissionnaire doit signer le code de conduite de la SNCB, qui inclut le respect du droit international.