Trump annonce un changement de cap radical
Donald Trump, au sommet de sa puissance politique, est devenu lundi président des Etats-Unis, pour la seconde fois. “L’âge d’or de l’Amérique commence”, a lancé le 47e président américain. Il promet aussi des droits de douane et des taxes aux pays étrangers.
“L’âge d’or de l’Amérique commence”: dans un discours nationaliste et vengeur, Donald Trump, tout juste investi, a annoncé des décisions fracassantes pour mettre fin au “déclin” du pays. “Dieu m’a sauvé pour que je rende sa grandeur à l’Amérique”, a déclaré le 45e (2017-2021) et désormais 47e président des Etats-Unis, en référence à une tentative d’assassinat contre lui cet été.
Son prédécesseur démocrate, qui conclut un demi-siècle de vie politique, a organisé une transition sans heurts du pouvoir à cet homme qui n’a eu de cesse de l’humilier.
Grâces
“Bienvenue à la maison”, avait dit Joe Biden un peu plus tôt en recevant Donald Trump, accompagné de son épouse Melania Trump, pour une ultime visite de courtoisie à la Maison Blanche. La normalité n’est que de façade, car le démocrate de 82 ans a aussi pris, à quelques minutes de céder le pouvoir, une décision absolument inédite. Il a en effet gracié, de manière préventive des élus, des fonctionnaires et cinq membres de sa famille pour leur épargner des enquêtes ou des poursuites “partisanes”. Joe Biden a frustré son successeur d’une possible revanche personnelle en graciant préventivement.
Parmi eux figurent l’ancien chef d’état-major des armées, le général Mark Milley, et l’ex-architecte de la stratégie de la Maison Blanche contre le Covid-19, le Dr Anthony Fauci. L’ancienne parlementaire républicaine Liz Cheney en bénéficiera également, comme tous les élus et fonctionnaires ayant participé à la commission d’enquête sur l’assaut du Capitole par des partisans de Donald Trump le 6 janvier 2021, ainsi que les policiers ayant témoigné devant cette commission. “Je crois en l’Etat de droit et je suis sûr que la solidité de notre système judiciaire finira par s’imposer face aux débats politiciens. Mais nous vivons dans des circonstances exceptionnelles et je ne peux pas, en bonne conscience, ne rien faire”, explique dans un communiqué le président démocrate sortant pour justifier une initiative exceptionnelle.
Mais contrairement au républicain, qui avait boudé son investiture, Biden a bien pris place dans la vaste salle pavée de marbre, cathédrale de la vie politique américaine. A ses côtés les anciens présidents américains Bill Clinton, George W. Bush et Barack Obama, mais aussi les multimilliardaires Mark Zuckerberg et Jeff Bezos, le désormais incontournable Elon Musk, ainsi que des dirigeants ou personnalités d’extrême droite invités à titre personnel.
La cérémonie d’investiture se déroule habituellement à l’extérieur, mais le protocole a été chamboulé à cause des températures glaciales.
Retour sans commotion
En levant la main droite, il a parachevé le plus extraordinaire “comeback” politique de l’histoire américaine récente. Celui d’un ancien président qui n’a jamais reconnu sa défaite en 2020, qui crie à la “vengeance” contre ses adversaires, qui a été condamné au pénal et qui a mené une campagne d’une violence rhétorique sidérante, émaillée de propos racistes et sexistes.
Le premier mandat de Donald Trump avait été une succession de crises politiques internes et d’affrontements diplomatiques. Rien ne dit que sa seconde présidence sera plus maîtrisée, mais son retour au pouvoir se fait sans la commotion provoquée par sa victoire en 2016. Donald Trump a, en quatre ans, verrouillé le parti républicain. Il peut s’appuyer sur une majorité, mince, au Congrès et sur une Cour suprême ancrée à droite. Il s’est entouré de fidèles au gouvernement, a reçu l’allégeance des plus grands patrons, et rares sont les dirigeants étrangers qui se risquent à le critiquer ouvertement. Pas non plus de manifestation monstre dans les rues de Washington, balayées par un vent glacial qui a conduit à déplacer la cérémonie d’investiture à l’intérieur. Pas de commotion internationale ni d’hostilité du monde des affaires, comme après son élection en 2016.
Une première salve de décrets
“Le déclin de l’Amérique est fini”, a directement assuré le républicain, qui à 78 ans est le plus vieux président américain jamais investi, promettant de s’attaquer à une “élite corrompue et radicale”. Devant une assemblée de partisans et de dignitaires, dont son prédécesseur Joe Biden, qui l’a écouté sans manifester la moindre émotion, il a fait l’article d’une bordée de décrets qu’il va signer dans la journée.
Dans son viseur: l’immigration clandestine, les politiques progressistes concernant le genre et la race, ainsi que la politique pro-environnementale du gouvernement sortant.
“Nous allons commencer le processus de renvoi de millions et de millions de criminels étrangers” a dit Trump durant son discours. Promise de longue date, la vaste offensive anti-immigration de Donald Trump prend donc forme. Le nouveau président américain a confirmé qu’il va décréter l’état d’urgence à la frontière avec le Mexique, utiliser l’armée américaine pour en assurer la surveillance, et s’attaquer au droit d’asile et au droit du sol.
Parmi les décrets signés au plus vite, Donald Trump compte également réinstituer la doctrine “Restez au Mexique”, mesure phare de son mandat précédent abolie sous son prédécesseur Joe Biden. Elle avait forcé des milliers de demandeurs d’asile originaires d’Amérique centrale à rester au sud de la frontière américaine, le temps que leur demande soit traitée par les tribunaux. Le 47e président des Etats-Unis compte également reprendre la construction du mur frontalier, selon Anna Kelly, la future porte-parole adjointe de la Maison Blanche. Des mesures risquent d’être contestées en justice par diverses organisations et Etats démocrates.
Les premiers effets du retour de M. Trump au pouvoir se font déjà concrètement sentir. Lundi, l’application CBP One, lancée par l’administration Biden pour permettre aux migrants de prendre un rendez-vous afin de déposer leur demande d’asile avant d’entrer aux Etats-Unis, a cessé de fonctionner. “Les rendez-vous existants ont été annulés”, indique le service sur son site internet.
Le président Trump a également dit que les Etats-Unis commenceraient à désigner le golfe du Mexique comme le “golfe d’Amérique”. “L’Amérique retrouvera sa place légitime en tant que nation la plus grande, la plus puissante et la plus respectée de la planète, inspirant la crainte et l’admiration du monde entier”, a conclu le président Trump.
Trump promet des droits de douane et des taxes aux pays étrangers
Le président des États-Unis Donald Trump a ouvert le front des guerres commerciales en promettant d’augmenter les droits de douane sur les produits entrant dans le pays. “J’entamerai immédiatement la révision de notre système commercial afin de protéger les familles et les travailleurs américains”, a-t-il déclaré. “Au lieu de taxer nos citoyens pour enrichir d’autres pays, nous imposerons des droits de douane et des taxes aux pays étrangers pour enrichir nos citoyens”, a-t-il poursuivi.
“Le président Trump annoncera une politique commerciale qui donne la priorité à l’Amérique”, a en parallèle rapporté la Maison Blanche dans un communiqué, ajoutant que le pays “ne serait plus tributaire d’organisations étrangères pour sa politique fiscale nationale, qui punit les entreprises américaines.”
Pendant sa campagne, Donald Trump avait affirmé qu’il instaurerait rapidement des droits de douane de 25% sur tous les produits en provenance du Mexique et du Canada. Les plus proches voisins des Etats-Unis sont pourtant théoriquement protégés par un accord de libre-échange signé durant son premier mandat, et qu’il avait alors présenté comme le “meilleur possible”. Donald Trump justifie ce projet comme une mesure de rétorsion à l’entrée aux États-Unis de drogues et de migrants clandestins. Le président élu a aussi menacé de relever significativement les droits de douane à l’égard de la Chine, n’écartant pas la possibilité qu’ils atteignent 60%, voire davantage. Lors de son premier discours en tant que président, Donald Trump n’a livré aucune information supplémentaire.
Selon le Wall Street Journal lundi, le président américain s’abstiendrait d’imposer de nouveaux droits de douane dès le premier jour de son second mandat, et pourrait privilégier le lancement d’enquêtes sur les relations commerciales avec la Chine, le Canada et le Mexique, comme préalables à des futures hausses. Ces trois pays étant des fournisseurs majeurs des États-Unis, des experts s’attendent à ce que, en cas d’application, le pays connaisse un rebond d’inflation, une perspective que Donald Trump et ses équipes écartent. Les entreprises américaines s’attendent par ailleurs à des représailles de la part des pays concernés sous la forme de droits de douane additionnels, qui pénaliseraient leurs propres exportations.
Invoquant le concept de “destinée manifeste”, selon lequel l’Amérique aurait un droit naturel à l’expansion territoriale, il a promis de “planter (le drapeau américain) sur la planète Mars”. Il a aussi juré de “reprendre” le canal de Panama, et de “taxer” les pays étrangers pour “enrichir les citoyens” américains. “J’entamerai immédiatement la révision de notre système commercial afin de protéger les familles et les travailleurs américains”, a-t-il déclaré juste après avoir prêté serment.
“Nous allons reprendre” le canal de Panama, affirme Trump
Dans son discours Donald Trump a promis de “reprendre” le contrôle du canal de Panama, soulignant que “l’objectif de notre accord et l’esprit de notre traité ont été totalement violés”. “Nous avons été très maltraités par ce cadeau insensé qui n’aurait jamais dû être fait. La promesse que nous avait faite le Panama n’a pas été tenue”, a déclaré le président Trump dans son discours inaugural, peu après sa prestation de serment. “L’objectif de notre accord et l’esprit de notre traité ont été totalement violés. Les navires américains sont gravement surtaxés et ne sont pas traités équitablement, de quelque manière que ce soit, y compris la marine américaine”, a-t-il dit. “Et surtout, la Chine exploite le canal de Panama, et nous ne l’avons pas donné à la Chine, nous l’avons donné au Panama. Et nous allons le reprendre”, a affirmé le président américain.
Son homologue panaméen José Raul Mulino a aussitôt répliqué que “le canal appartient et continuera d’appartenir au Panama”. “Nous exercerons le droit qui nous protège, la base juridique du traité, la dignité qui nous distingue et la force que nous donne le droit international”, a-t-il ajouté sur son compte X.
Un état d'”urgence énergétique” pour doper la production d’hydrocarbures
Donald Trump a annoncé qu’il décréterait un état d'”urgence énergétique” national visant à doper la production d’hydrocarbures des Etats-Unis, déjà premier producteur mondial, mettant ainsi en péril les efforts mondiaux pour freiner le réchauffement climatique. “Nous allons forer à tout-va”, a lancé le président américain, réitérant ainsi sa promesse de campagne et assurant qu’il reviendrait sur nombre de mesures climatiques prises par son prédécesseur Joe Biden pour favoriser la transition énergétique et baisser les émissions de gaz à effet de serre du pays, deuxième pollueur mondial après la Chine.
Mettre fin “au délire transgenre” et sortir de l’accord de Paris
Lui qui avait promis de mettre fin au “délire transgenre”, va aussi ordonner de “reconnaître” l’existence de seulement “deux sexes” par l’Etat fédéral. Autre promesse de campagne, le républicain veut décréter un état d'”urgence énergétique” pour doper la production américaine d’hydrocarbures. Son administration a annoncé que les Etats-Unis se retireraient une seconde fois de l’accord de Paris sur le climat, mettant ainsi en péril les efforts mondiaux visant à freiner le réchauffement climatique.