Comment l’Irlande a rétabli ses finances publiques (et ce que la Belgique peut en apprendre)

Irlande économie
© Getty Images

Les nouvelles règles budgétaires européennes plus strictes sont une mauvaise nouvelle pour la Belgique et son important déficit budgétaire.

L’Irlande est l’un des quatre États membres de l’UE à ne pas enregistrer de déficit budgétaire et a l’un des ratios d’endettement les plus bas de la zone euro (43,7% du PIB). Il y a à peine douze ans, cette dette publique atteignait encore 120% et les Irlandais dépendaient de l’aide européenne. Comment le pays a-t-il réalisé cette résurrection ?

Du paradis à l’enfer et retour. Voilà une bonne description des trois dernières décennies pour l’Irlande. Dans la seconde moitié des années 1990, l’économie irlandaise connaissait une croissance annuelle de près de 10%, tandis que le taux de chômage et le nombre de personnes vivant dans la pauvreté sur l’île diminuaient de manière spectaculaire. Les Irlandais devaient ce boom économique à la création d’un climat très favorable aux entreprises. Un faible impôt sur les sociétés a ainsi fait de l’Irlande une destination prisée des multinationales.

Ce conte de fées du Tigre celtique s’est brusquement terminé en 2008. L’économie irlandaise va cette année-là être durement touchée par la crise financière. “Un élément important de sa forte croissance économique était une incroyable bulle immobilière”, explique l’économiste et député européen Johan Van Overtveldt (N-VA), qui connaît bien l’histoire irlandaise. “Or celle-ci éclate après la chute de la banque américaine Lehman Brothers et la crise bancaire qui a suivi. Cela va faire de l’Irlande le quatrième pays – après la Grèce, l’Espagne et le Portugal – à connaître une crise de la dette. Cela va avoir un impact énorme sur le secteur bancaire et faire grimper la dette publique de près de 200 milliards d’euros. En 2012, l’Irlande doit supporter une dette publique équivalente à 120% de son PIB.”

Johan Van Overtveldt (N-VA). © belgaimage

Douze ans plus tard, la situation est bien différente. Selon les dernières données de l’office statistique européen Eurostat, l’Irlande affiche un excédent budgétaire depuis deux ans (1,7% du PIB) et la dette publique est désormais tombée à 43,7% du PIB. Soit l’un des plus bas de la zone euro. Le gouvernement irlandais vient même d’annoncer qu’il prévoyait un excédent budgétaire de 8,6 milliards d’euros pour 2024. En comparaison, le déficit budgétaire belge est passé l’année dernière de -3,6% à -4,4%, et la dette publique de 104,3% à 105,2% du PIB. Ce qui fait de notre pays l’un des plus mauvais élèves de la classe européenne.

Comment l’Irlande a-t-elle réussi ce redressement ?

JOHAN VAN OVERTVELDT. “En mettant immédiatement la main à la pâte. L’ancien ministre des Finances Michael Noonan n’en avait, à l’époque, pas fait mystère. Pour lui il suffisait «d’équilibrer plus ou moins notre budget et stimuler la croissance économique». Aussi simple que ça. D’ailleurs, ils n’ont rien fait de spectaculaire, pas d’austérité draconienne ni de hausses d’impôts. Ils ont simplement équilibré leur budget avec des mesures d’austérité et des impôts appropriés. Le tout  combiné à une croissance économique supérieure à la moyenne de la zone euro.”

Cela semble plus facile à dire qu’à faire…

“C’est vrai. Mais ce qui est surtout remarquable, c’est qu’ils ont examiné de manière très précise et systématique les dépenses qui, pour, par exemple, des raisons démographiques, avaient tendance à augmenter fortement à l’avenir. Sur cette base, et avec une bonne compréhension des évolutions à long terme, ils ont rapidement pris des mesures. Celles-ci n’étaient que rarement draconiennes, mais elles ont permis de freiner certaines dynamiques.”

Est-ce là une leçon pour la Belgique ?

“Absolument. Les documents préparatoires existent, du Bureau fédéral du Plan au Comité de suivi en passant par la Banque nationale… Il est vraiment grand temps que la politique examine où, et avec une vision à long terme, nous devons vraiment intervenir pour remettre les choses en ordre. Une analyse précise de chaque poste de dépense, surtout en fonction de son évolution. Vous n’avez pas besoin de couper partout, certaines mesures peuvent être plus durables que d’autres. Là où vous rencontrez des problèmes, vous devez agir.”

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