Epargne: une surenchère de taux pour contrer un nouveau bon d’État ?
Derrière les récentes hausses de taux annoncées par plusieurs grandes banques sur leur livret se cache pour elles la crainte d’un nouveau choc de liquidités alors que l’émission d’un nouveau bon d’Etat se précise, et que les livrets d’épargne ont fondu de près de 30 milliards.
Cela bouge sur le marché de l’épargne. Depuis quelques jours, les clients de la banque ING qui sont titulaires d’un compte Tempo (limité à un montant fixe de de 500 euros maximum par mois) bénéficie d’un taux de 3 %, prime de fidélité comprise de 1,85 %.
Depuis le 2 novembre, le nouveau compte Essential Épargne de la banque en ligne MeDirect propose pour sa part un taux de base de 2 % accompagné d’une prime de fidélité de 0,8 %, soit un taux global sur un an de 2,80 %. Et une rémunération qui est quasiment égale à celle du dernier bon d’État (2,81 % net), lancé par le ministre des Finances Vincent Van Peteghem (CD&V) fin août. Bon d’Etat dont l’objectif était de stimuler la concurrence entre banques sur ce segment de l’épargne et les inciter à relever leurs conditions.
Hausses en série
Ces dernières semaines plusieurs autres enseignes ont également annoncé des hausses de taux sur leur livret dans la foulée de l’émission publique. Ainsi, les clients de BNP Paribas Fortis (Fintro et Hello Bank!) bénéficieront d’un taux de base ou d’une prime de fidélité plus élevés sur les comptes d’épargne réglementés dès le 1er décembre. Dès le premier décembre également, KBC et CBC augmenteront les taux des comptes où les dépôts mensuels sont limités à 500 euros (Start2Save et Start2Save4) pour les relever de 0,40 % à 0,75 %, tandis que leur prime de fidélité sera également revue à la hausse pour passer de 1,10 % à 1,80 %. Début octobre, Belfius a pour sa part été la première des quatre premières banques du pays à revoir les intérêts qu’elle verse sur ses comptes d’épargne depuis l’émission du bon d’Etat Van Peteghem. Lancé il y a quelques mois, son nouveau compte Fidelity affiche désormais 2 % tout rond.
Pas un hasard
Bienvenues pour les épargnants, agacés par le peu de rendement de leurs économies, ces hausses de taux en série ne sont pas anodines. Elles sont en effet le résultat de la pression du ministre des Finances Vincent Van Peteghem et du bon d’Etat, qui a aspiré 22 milliards d’euros, soit environ 7 % de l’épargne des Belges. Jamais un bon d’Etat n’avait récolté un tel succès jusqu’ici et bousculé autant nos banques, qui pour certaines se retrouvent à présent en manque de liquidités.
Mais ces taux plus élevés offerts sur le livret des gros acteurs du marché ne sont pas vraiment un geste envers les épargnants. Non, ils ont tout simplement pour objectif de contrer une nouvelle offensive de notre grand argentier sur le marché de l’épargne, comme le supposent d’ailleurs certains en coulisses depuis plusieurs semaines. En clair, il s’agit pour les BNP Paribas Fortis et les autres ING de ligoter les épargnants (d’en récupérer après le succès retentissant du bon d’Etat) alors qu’une nouvelle émission serait bel et bien au programme de l’Agence de la dette, d’ici la fin de l’année.
Début décembre
Selon Sudinfo, “la décision sera annoncée ce vendredi mais nous avons déjà appris qu’il y aura bien un nouveau bon d’État, ou même peut-être plus d’un, début décembre”, indique le quotidien francophone sur son site. Quel sera le taux ? La durée (3, 5 ou 8 ans) ? Le montant qu’il sera possible de souscrire ? Le précompte mobilier sera-t-il “normal” ? Une communication officielle du ministre et de l’Agence de la dette serait attendue d’ici la fin de la semaine pour préciser les détails de l’opération. Opération dont l’envergure serait plus “niche” afin de ne pas trop concurrencer les livrets d’épargne. En attendant, coïncidence ou pas, ING a également annoncé ces derniers jours le lancement d’un nouveau compte à terme à 6 mois offrant un taux d’intérêt de 4 % brut sur base annuelle, ce qui donne un rendement (après précompte) de 2,8 % sur douze mois. Soit 1,4 % net sur six mois. Une pub agressive visant à attirer des cleints et à faire rentrer de l’argent frais avant un éventuel nouveau bon d’Etat, mais néanmoins jugée “trompeuse” par la FSMA, qui a enjoint ING à revoir sa copie. En cause : le taux d’intérêt affiché de 4 % brut qui est un taux annualisé, alors que le rendement réel est inférieur de moitié compte tenu de la durée de six mois de ce nouveau compte à terme.
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