Le secteur bancaire déstabilisé par SVB, une banque proche de la tech

© Getty

Les difficultés d’une banque américaine proche des milieux de la tech à l’avenir désormais incertain, SVB, ont traversé les frontières et bousculé l’ensemble du secteur bancaire sur les marchés mondiaux.

Reflet de l’inquiétude ambiante: la secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen, a assuré vendredi suivre “de très près” la situation du secteur bancaire. “Lorsque les banques subissent des pertes financières, cela est, et devrait être, un sujet de préoccupation”, a déclaré la ministre de l’Economie et des Finances de Joe Biden devant une commission parlementaire. Le mouvement de panique a débuté jeudi, après que Silicon Valley Bank (SVB) eut annoncé qu’elle cherchait à lever rapidement du capital pour faire face à des retraits massifs. La banque a, en effet, principalement comme clients des acteurs du secteur de la tech, qui font face à leurs propres difficultés. L’annonce a surpris les investisseurs et a ravivé les craintes sur la solidité de l’ensemble du secteur bancaire. Les quatre plus grandes banques américaines ont perdu 52 milliards de dollars en Bourse jeudi et dans leur sillage, les banques asiatiques puis européennes ont flanché.  A l’approche de la clôture, le titre de Société Générale perdait 5,50%, BNP Paribas 4,45% et Crédit Agricole 2,97%. Ailleurs en Europe, la banque allemande Deutsche Bank perdait 8,27%, la britannique Barclays 5,40%, l’italienne Intesa Sanpaolo 3,54% et la suisse UBS 5,33%.

A l’ouverture de Wall Street vendredi, les géants de Wall Street limitaient la casse: JPMorgan Chase prenait 1,9% tandis que Bank of America cédait 1,1%, Citigroup 0,7% et Wells Fargo 0,1%.  Des banques régionales étaient en revanche plus dans la tourmente: First Republic lâchant par exemple 15,7% et Signature Bank, 10,3%. L’action de SVB était en revanche suspendue dans l’attente d’une communication de l’établissement, après avoir plongé de 60% la veille.

“Pas beaucoup d’options”

Selon la chaîne d’informations CNBC, la banque n’est pas parvenue à lever du capital et est en négociations pour se vendre auprès d’un autre établissement. L’établissement n’avait pas, dans l’immédiat, répondu à une requête de l’AFP. “Ils n’ont probablement pas beaucoup d’autres options”, estime Alexander Yokum, qui suit la banque pour le cabinet CRFA.  “C’est fou qu’en deux jours une banque aussi solide puisse plonger aussi rapidement”, remarque-t-il. Si SVB est peu connue du grand public, elle est la 16e banque américaine par la taille des actifs. “Comme c’est souvent le cas dans la finance, le problème n’est pas venu de là où on l’attendait”, explique l’analyste. “Beaucoup d’observateurs se posaient des questions sur la dette qui s’accumule sur les cartes de crédit ou sur le marché de l’immobilier de bureau. On ne s’attendait pas à un +bank run+”, une réaction en chaîne qui débute par des retraits massifs de clients, dit-il à l’AFP.  Pris de court, les investisseurs ont réagi vivement.

Ils “ont aussi vu dans les difficultés de la banque l’impact de l’inversion de la courbe des taux (lorsque les taux à court terme sont plus élevés que ceux à long terme, NDLR)”, a souligné dans une note Christian Parisot, du courtier Aurel BGC. Les banques empruntent généralement à court terme pour effectuer des prêts à moyen et long terme. Sans compter que ces difficultés ont coïncidé avec l’annonce, mercredi soir, de la liquidation de Silvergate Bank, un établissement particulièrement présent dans les cryptomonnaies.

Garde-fous

Stephen Innes, analyste de SPI Asset Management, se veut rassurant, estimant “faible”, dans une note, le risque “d’un incident de capital ou de liquidités parmi les grandes banques”.

Depuis la crise financière de 2008/2009 et la faillite de la banque américaine Lehman Brothers, les banques doivent donner des gages renforcés de solidité à leurs régulateurs nationaux et européens. Elles doivent par exemple justifier d’un niveau minimal de capital plus important destiné à éponger les éventuelles pertes. Ce ratio de fonds propres durs, aussi appelé CET1, est l’œuvre des travaux du comité de Bâle, en Suisse. Pour les analystes de Morgan Stanley, “les pressions de financement auxquelles la SIVB est confrontée sont très particulières et ne doivent pas être considérées comme la norme pour les autres banques régionales”. “Nous ne pensons pas que le secteur bancaire soit confronté à une pénurie de liquidités”, insistent-ils dans une note.

Partner Content