“Préparer l’entrée dans une ère post-croissance choisie plutôt que subie”

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Une économie sans croissance est tout à fait possible et même souhaitable, c’est en tout cas le postulat avancé par certains experts universitaires jeudi en prélude au Congrès des économistes qui se tiendra le 26 novembre prochain.

Face à une croissance actuelle quasi nulle, reste désormais à “affiner les scénarios d’entrée dans une ère post-croissance choisie plutôt que subie”.

Si certains économistes et personnalités politiques considèrent la relance de la croissance comme le but ultime, une série de membres du monde académique, parmi lesquels l’économiste Isabelle Cassiers (UCL) et l’ancien rapporteur spécial de l’Onu pour le droit à l’alimentation et spécialiste des théories de la gouvernance, Olivier De Schutter (UCL), jugent celle-ci dépassée pour des raisons “tant économiques que sociales”.

Selon eux, l’ère post-croissance, caractérisée par une croissance faible à long terme et non une croissance négative à laquelle très peu semblent croire, est déjà là mais n’a pas encore été identifiée et nécessite, afin d’être choisie et non subie, que l’on se dote “des outils théoriques et politiques nécessaires pour gouverner une véritable transition écologique et sociale”.

Pour les adeptes de la théorie, repenser notre projet de société implique le respect de trois balises: les limites écologiques, l’équité dans la répartition notamment des richesse et la promotion de l’autonomie.

“Notre génération vit aux dépens des suivantes”

Quand bien même, mais cela leur semble peu probable, l’on renouerait avec la croissance, les méfaits de celle-ci l’emporteraient sur ses supposés bienfaits (réduction des inégalités et augmentation du bien-être en tête de liste), qui selon ces universitaires se sont estompés avec le temps.

Tout suggère aujourd’hui que nous nous trouvons dans un tournant historique majeur, marqué notamment par d’importants défis écologiques et géopolitiques. En effet, “notre génération vit aux dépens des suivantes et notre écosystème ne peut pas supporter le rythme actuel de l’activité humaine”. Pour une frange des économistes et du monde académique, une rupture de tendance doit être opérée de toute urgence. Et si l’une partie de la réponse à ces défis devra être cherchée dans les nouvelles technologies, une autre part importante doit l’être dans une modification radicale de nos modes de vies.

La population s’organise

Face “aux gouvernements et à une majorité des acteurs sociaux qui continuent de se comporter comme s’ils étaient programmés pour la poursuite continue de la croissance”, les chemins de la transition vers une post-croissance choisie sont cependant ouverts. La population s’organise, l’on voit notamment germer des groupes d’achat locaux et autres circuits courts qui rapprochent les consommateurs des producteurs, des monnaies complémentaires associant à un moyen de paiement local la défense de valeurs spécifiques ou le soutien d’une communauté particulière, des potagers urbains, le covoiturage, le couchsurfing (hébergement temporaire et gratuit de personne à personne)…

Ce nouveau paradigme coexiste avec celui qui, selon ces experts, est voué à disparaître. Reste aujourd’hui à soutenir ces initiatives pour aller vers une gouvernance moins dichotomique (public/privé, marchand/non marchand, …) mais plus polycentrique.

Loin d’être un secteur où domine la pensée unique, d’autres thèmes et visions de la croissance seront questionnés lors du 21e congrès des économistes qui se tiendra le 26 novembre à Liège. Il sera notamment question des leviers pour relancer la croissance, de sa relation avec l’environnement et de son histoire et sa nécessité dans l’absolu.

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