Fukushima, an 2 : où en est l’économie japonaise ?

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Les experts tablent sur une croissance de 2 % en 2012 de l’économie nippone, après un recul de 0,7 % en 2011. Mais ce rebond est en grande partie artificiel. Explications.

L’économie japonaise a vécu une année 2011 cauchemardesque. Au printemps, elle a été frappée par un séisme dévastateur, le quatrième tremblement de terre le plus violent jamais enregistré dans le monde. Celui-ci a fait 16 000 victimes, entraînant la destruction des infrastructures et la dislocation des chaines d’approvisionnement du pays. Le tsunami qui a suivi n’a fait qu’alourdir le bilan, ajoutant aux multiples dégâts le risque de contagion nucléaire et les coupures d’électricité. Les grandes entreprises japonaises ont également été perturbées dans leur approvisionnement par les inondations en Thaïlande. Elles ont subi la hausse du yen et, de manière indirecte, la crise de la dette en Europe. Sans parler des attaques contre le réseau Playstation de Sony et du maquillage des comptes d’Olympus qui jette le doute sur les pratiques comptables du pays du Soleil levant.

Sans surprise, les grands noms de l’industrie japonaise (Sony, Panasonic ou Sharp) ont tous annoncé des pertes record. Cependant, l’économie dans son ensemble a plutôt bien résisté. Le Japon n’a vu son PIB reculer que de 0,7% l’an dernier. Après avoir été entravé durant de longs mois, la production industrielle a quasiment retrouvé son niveau de fin 2010. Il faut dire que les autorités ont dépensé sans compter pour maintenir l’activité à flot. L’Etat a approuvé 4 rallonges budgétaires de reconstruction pour l’année fiscale d’avril 2011 à mars 2012, pour un montant dépassant 20 500 milliards de yens (soit plus de 200 milliards d’euros). De son côté, la Banque centrale a injecté des liquidités. Tous ces efforts devraient permettre à l’économie japonaise d’afficher une croissance de 2% en 2012. Mais ce chiffre est artificiel.

Un déficit commercial record

Un an après la catastrophe nucléaire, l’économie nippone a toujours autant besoin de son assistance respiratoire. Le moteur essentiel de la croissance, à savoir le commerce extérieur, porte toujours les stigmates de la catastrophe. Au dernier trimestre 2011, les exportations ont plongé de 11,9%. En janvier, les comptes courants du pays ont affiché un solde négatif inédit de 437,3 milliards de yens (environ 4,3 milliards d’euros). Un record. Avec seulement 3 réacteurs nucléaires du pays qui fonctionnent, le gouvernement est obligé de recourir à l’achat de gaz naturel étranger pour compenser l’effondrement de sa production d’électricité, explique Raymond Van Der Putten, économiste chez BNP Paribas. Or cette importation massive d’énergie plombe la balance commerciale. Pour la première fois en 31 ans, celle-ci est devenue négative en 2011. La crise de la dette, la cherté du yen pèsent aussi sur les débouchés des entreprises japonaises.

La consommation des ménages, qui est à l’origine de plus de la moitié de la production de richesse nationale, porte elle aussi les stigmates de la catastrophe. Le séisme, le tsunami, et l’accident nucléaire ont renforcé les craintes pour l’avenir. Ils ont aussi modifié durablement la structure des embauches. Avant le séisme, l’augmentation des coûts de l’énergie, la solidité persistante du yen et la hausse des prélèvements fiscaux avaient donné lieu à des délocalisations de la production à l’étranger. Dans le sillage de la catastrophe, cette tendance s’est accentuée. ” Nous pensons que le nombre d’emplois industriels devrait diminuer au Japon. Toyota, Honda et Nissan devraient produire plus de 70 % de leurs voitures à l’étranger d’ici deux ans “, estime un expert de Schroders.

Au final, c’est l’argent public qui va tirer la croissance nippone dans les prochaines années. Le gouvernement japonais estime les coûts de reconstruction, à l’exclusion de ceux liés à la catastrophe nucléaire, à 19 000 milliards de yens (environ 200 milliards d’euros) sur les cinq prochaines années. Cet argent va doper l’emploi dans le secteur du BTP, et stimuler la consommation. Problème: la dette publique du Japon excède déjà 200% du PIB!

Trends.be, avec L’Expansion.com

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