Lagarde : les 4 obstacles qui pourraient lui coûter le FMI

© Reuters

La ministre française de l’Economie est officiellement candidate à la direction du Fonds monétaire international. Même si elle part favorite, rien n’est gagné. Affaire Tapie, fronde des pays émergents : voici ce qui pourrait la faire trébucher dans la course à la succession de DSK.

Christine Lagarde l’a annoncé ce mercredi matin lors d’une conférence de presse impromptue : elle est officiellement candidate à la présidence du Fonds monétaire international. Même si elle part favorite, rien n’est gagné pour la ministre française de l’Economie et des Finances, qui ne démissionnera du gouvernement que si elle est effectivement nommée. Voici les obstacles qui se dressent encore sur sa route.

1. L’affaire Tapie

Une “épée de Damoclès” : c’est l’expression utilisée par le socialiste Manuel Valls pour évoquer le risque judiciaire qui pèse sur Christine Lagarde dans l’affaire Tapie. La ministre des Finances est accusée d’abus d’autorité. Elle aurait, selon un rapport de la Cour des comptes, pris des décisions contraires à l’avis des services de Bercy pour régler le cas Tapie par le biais d’un tribunal arbitral, et non par la justice ordinaire. Ce qui s’est terminé par un chèque de 285 millions d’euros pour l’homme d’affaires.

Elle est aujourd’hui menacée d’une enquête pour abus d’autorité, dont le procureur général près la Cour de cassation, Jean-Louis Nadal, a demandé le 10 mai l’ouverture à la Cour de justice de la République. Après l’affaire Strauss-Kahn, le FMI peut-il se permettre de nommer quelqu’un qui risque d’avoir des ennuis avec la justice ? L’entourage de Christine Lagarde minimise le risque.

2. Le calendrier

C’est le 10 juin que la commission des requêtes de la Cour de justice de la République (CJR) doit se réunir pour savoir si elle ouvre ou non une enquête sur Christine Lagarde. Hasard du calendrier, le 10 juin, c’est aussi la date-limite de dépôt des candidatures pour le FMI. Décalage horaire aidant, elle peut rendre son avis dans la foulée ; plus vraisemblablement, elle remettra sa décision à plus tard.

Selon une source à la CJR citée par Marianne2.fr, “dans les dossiers complexes, jamais la Commission n’a rendu sa décision lors d’un premier examen”. Christine Lagarde devra donc sans doute patienter plusieurs jours, voire plusieurs semaines de plus. Ce qui veut dire qu’elle devra entrer en campagne avec cette incertitude, voire une enquête sur le dos, puisqu’elle a annoncé que, dans cette hypothèse, elle maintiendrait tout de même sa candidature. La campagne sera une campagne éclair, le FMI voulant prendre sa décision avant le 30 juin.

3. La fronde des pays émergents

Selon une règle non écrite qui date de 1946, la présidence de la Banque mondiale va aux Etats-Unis, celle du FMI à l’Europe. Lors de sa nomination en 2007, Dominique Strauss-Kahn avait toutefois assuré que son successeur devrait venir d’un pays émergent, pour mieux refléter les nouveaux équilibres de la mondialisation.

Dans l’intervalle, la situation a changé. Accablée par une crise de la dette qui n’en finit pas de s’étendre, l’Europe a plus que jamais besoin du FMI. Et entend garder la main. Une bataille se prépare donc en coulisse avec les pays émergents, qui n’ont pas abdiqué. Le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud ont revendiqué cette nuit leur droit à obtenir ce poste… même s’ils ont bien du mal à se mettre d’accord sur un nom, comme en témoigne la longue liste des candidats, disponible ici en images.

Une chose est sûre, ils feront tout pour bloquer la nomination de Christine Lagarde. Pour donner quelques gages aux pays émergents, la ministre de l’Economie a laissé entendre qu’elle s’emploierait à accentuer la diversité des nationalités au sein de la direction du Fonds, qui compte déjà une Egyptienne.

4. Le processus de sélection

La nomination du directeur du FMI ne se fait pas par une élection mais par consensus au sein du conseil d’administration du Fonds. Ce dernier est composé des représentants de 24 pays et groupes de pays. S’il y a quatre candidats ou plus, il dressera une short-list de trois noms maximum, par consensus ou, à défaut de consensus, par un vote. Les derniers candidats en lice seront ensuite entendus.

Le conseil a promis que le choix se ferait “d’une manière ouverte, fondée sur le mérite, et transparente”, mais en réalité, le processus de sélection reste opaque et ouvre la voie à toutes sortes de tractations en coulisses, comme le fait remarquer ici Peter Chowla, chercheur au Bretton Woods Project.

Certes, pour le moment, l’Europe soutient de façon quasi unanime Christine Lagarde. Mais ils ne peuvent rien faire sans les Etats-Unis. Et si, d’ici le 30 juin, Washington sent que l’affaire Tapie représente une réelle menace juridique pour la ministre de l’Economie, un coup de théâtre n’est pas exclu. On en revient toujours à cette “épée de Damoclès”.

Thomas Bronnec, L’Expansion.com

Reynders : la Belgique soutiendra Lagarde si un consensus se dégage sur son nom

Didier Reynders, notre ministre des Finances, a indiqué mercredi, en marge de la réunion de l’OCDE à Paris, que la Belgique soutiendra la candidature de Christine Lagarde à la direction du FMI si un consensus se dégage autour de cette candidature. A ses yeux, la Française est une “excellente candidate” et son accession à la fonction serait importante pour la représentation de l’Europe. Elle Lagarde serait aussi la première femme à occuper une fonction de cette importance dans une instance internationale, a-t-il ajouté.

Belga

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