Le maître du Talmud

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La foi est une quête. Dans le judaïsme, cette recherche se traduit dans le Talmud, qui compile depuis des siècles les discussions théologiques et exégétiques de rabbins illustres. Aux yeux des chrétiens du 13e siècle, cette remise en question perpétuelle de la parole divine révélée, la tâche des tossafistes (” les ajouteurs “), relevait du sacrilège ou du blasphème. L’entourage de Louis IX, futur saint Louis, y voyait un obstacle majeur à une homogénéisation catholique du royaume de France. C’est pourquoi les théologiens de la cour fomentèrent un complot : un infanticide dont une ” preuve ” matérielle – une référence aux textes talmudiques sur le linceul du cadavre – désignait comme coupable l’école rabbinique de Yéhiel, alias sire Vives de Meaux. Réel épisode historique, la ” Disputation de Paris ” ou encore le ” Procès du Talmud “, joute théologique qui s’est conclue en 1242 par la crémation de nombreux exemplaires du Talmud à Paris (” Ce n’était pas les hommes qu’ils étaient venus chercher. C’était les livres. “).

En hommage à son père spécialiste du Talmud, Eliette Abécassis revient sur cette histoire d’antisémitisme en dépassant le thriller historique, l’amplifiant d’une intense réflexion métaphysique – par la voix de son protagoniste, le jeune disciple Eliezer Cohen – sur l’interprétation des textes, leurs interdits et leur conception des relations homme-femme. Son style relève parfois de la psalmodie et pourrait freiner les aficionados de suspense médiéval plus tonitruants. Cependant, son érudition nous illumine sur les fondements démocratiques et critiques de la religion juive. Sa démarche s’avère particulièrement judicieuse alors que les intégrismes de tous bords jouissent d’une visibilité sans précédent.

Eliette Abécassis, ” Le maître du Talmud “, éditions Albin Michel, 368 pages, 22 euros.

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