Comment Windows Phone 7 espère convaincre les consommateurs

Lorsqu’il recherche un smartphone, le grand public n’achète pas un système d’exploitation mais un téléphone. Comment Microsoft va-t-il s’y prendre pour amener les clients vers son produit ? Sa façon de communiquer sera déterminante. Analyse de sa stratégie.

Windows Phone 7, le nouveau système d’exploitation de Microsoft pour smartphones, lancé officiellement le 21 octobre, a agréablement surpris et possède de nombreux atouts, dont celui de l’originalité. Mais il part avec des handicaps : son retard sur ses concurrents (WP7 arrive près de quatre ans après le premier iPhone, deux ans après le premier téléphone sous Android) surtout, mais aussi la difficulté qu’il peut avoir à communiquer sur un produit qui constitue le coeur des smartphones qu’il équipe mais qui n’est pas en soi un téléphone.

Apple et BlackBerry n’ont pas ce problème. Leur OS n’équipe que leurs terminaux, qu’ils fabriquent eux-mêmes. Leurs produits constituent une unité matérielle et logicielle. Google, lui, est dans la même situation que Microsoft, puisqu’à part le Nexus One, il n’a pas construit ses smartphones et travaille avec plusieurs constructeurs. La différence est qu’il délègue la communication à ces derniers. La position de Microsoft, et sa problématique marketing, sont uniques sur son marché.

Une partie de la réponse s’énonce en millions de dollars : Microsoft mettrait sur la table un budget de 400 millions de dollars pour la campagne marketing de Windows Phone 7, selon Jonathan Goldberg, analyste de Deutsche Bank cité par TechCrunch : “Pour eux, ça passe ou ça casse. Ils ont besoin de faire tout ce qu’il est nécessaire de faire pour rester dans le coup.” Pour Gartner, c’est sûr, ça casse. L’institut d’études estime que la part de marché mondiale de WP7 passera de 4,7 % en 2010 à 5,2 % en 2011, mais qu’elle redescendra à 3,9 % en 2014, derrière Symbian (30,2 %), Android (29,6 %).

En France, ce sera la campagne la plus vaste jamais mise en oeuvre par Microsoft pour un lancement. Une campagne de comm’ surpuissante peut-elle suffire à détourner les consommateurs des plateformes concurrentes, déjà bien installées ?

Comment les consommateurs choisissent-ils un smartphone ?

Une chose est sûre, seule la frange la plus technophile de la population sait aujourd’hui ce qu’est et à quoi sert un système d’exploitation, et tient ce critère comme essentiel dans le choix d’un smartphone. Dans les boutiques Orange, qui n’attirent pas les consommateurs les plus geeks, cela représenterait moins de 10 % des clients.

“Le rôle technique de l’OS n’est pas du tout connu, souligne Karine Dussert Sarthe, directrice des offres mobiles chez Orange. La plupart des clients cherchent un OS sans le savoir, quand ils veulent un iPhone ou un BlackBerry. Mais les critères d’achats sont d’abord le prix, puis la marque du téléphone, le design, et enfin la facilité d’utilisation et le bouche-à-oreille.”

Tout ceci est cependant en train de changer. “Nous avons de plus en plus de questions sur Android, révèle Karine Dussert Sarthe. Et les usages prennent de l’importance, comme les applications. C’est par ce biais que nous présentions les OS aux clients.”

Grégory Coillot, directeur marketing et achats chez The Phone House (dont les smartphones représentent 70 % des ventes), acquiesce : “Avant, le critère de décision n° 1, c’était le design. Aujourd’hui, c’est 50 % de la décision. Le reste, ce sont les usages : applis, mails, géolocalisation, simplicité… Le design jouera un rôle de moins en moins important : les smartphones se ressemblent tous. Ce sont de petites tablettes tactiles. La différence est à l’intérieur des téléphones.”

L’affinité à la marque pèse par ailleurs de moins en moins lourd, ou alors en négatif. “La fidélité au constructeur est de moins en moins visible, malgré la tendance naturelle à racheter la même marque, affirme Grégory Coillot. A contrario, un tiers de nos clients de smartphones savent qu’il veulent tout sauf un iPhone ou un Blackberry.”

“Autant l’OS n’est pas un critère de choix, autant, s’ils sont déçus par un OS, les clients vont tout faire pour éviter d’y revenir”, complète Karine Dussert Sarthe.

Là où le message de Microsoft va jouer

Vendre une “expérience”, pas un système d’exploitation. “On ne parle à aucun moment de système d’exploitation, pointe Grégory Olivier, directeur marketing et communication de Microsoft France. Windows Phone, c’est une marque, une expérience différente, caractérisée par sa fluidité. La campagne explique qu’un nouveau type de téléphone entre sur le marché. On ne peut pas se permettre de lister toutes les fonctionnalités.”

Grâce à son cahier des charges strict, cette “expérience” sera homogène quel que soit le modèle de smartphone, ce qui différenciera WP7 d’Android (toutes les applications Android ne fonctionnent pas sur tous les téléphones, et les fabricants peuvent rajouter des “surcouches” sur Android), tout en permettant à Microsoft de proposer une offre renouvelée plus fréquemment qu’Apple (un seul iPhone par an) grâce à la multiplicité des constructeurs.

S’appuyer sur la démonstration en magasin. Le coeur de cible de Microsoft, ce sont les clients pas encore équipés de smartphones. Il y a de quoi faire : seuls 16 % des propriétaires de mobiles ont un smartphone en France. Parmi eux, Microsoft devrait toucher en priorité les “indécis”, ceux qui ne savent pas quel OS ils veulent et qui se baseront sur les démonstrations en magasin pour faire leur choix. “La pub est très bien faite, estime Grégory Coillot. Elle devrait donner un coup de pouce pour amener les clients en boutique.”

Evoquer l’analogie avec Windows. “Pour faire comprendre aux clients ce qu’est WP7, nous pensons que l’analogie avec Windows sera assez naturelle, déclare Grégory Olivier. Des PC, il y en a des tas, de toutes marques. L’expérience Windows, c’est la même partout.”

Profiter de l’effet nouveauté. Microsoft espère que le taux de pénétration de l’iPhone se retournera contre lui. En faisant passer le message d’un téléphone différent, il compte ramener à lui les consommateurs qui veulent se démarquer. Aujourd’hui, l’iPhone n’est plus un marqueur social comme à son lancement.

S’appuyer sur la publicité des partenaires. Microsoft pourra profiter des investissements des constructeurs avec lesquels il travaille (LG, Samsung, HTC), comme le fait Google. Sauf que Microsoft contrôlera le message de ses partenaires. Cela fait partie du cahier des charges.

Les premiers retours de la campagne

La phase de teasing, commencée en télévision le 12 octobre avec deux spots montrant des foules les yeux rivés sur leur téléphone, hermétiques à ce qui se passe autour d’eux, avec le message : “Il est temps qu’un téléphone nous fasse décrocher du téléphone”, a suscité l’intérêt autant que l’incompréhension. “C’était l’objectif, osé, de faire que les gens en parlent”, indique Grégory Olivier.

Sur la page Facebook de WP7, qui compte déjà 12 000 fans, le débat s’est créé. “En gros, WP7 ne donne pas envie d’aller sur son portable ?”, lance un internaute. Sur Le Post, un blogueur visiblement piqué à vif prend les teasings pour une provocation. “Eh ben moi j’ai trouvé ce décalage bien fun !, répond un autre sur Facebook. Combien de fois je me suis dit qu’on avait l’air super cons avec notre face collée sur le portable ?”

Le spot diffusé à partir du 21 octobre précise le message : “Mon écran d’accueil, c’est pas la foire aux applis. J’y trouve ce qui est le plus important pour moi, mis à jour en temps réel.” Et, plus loin : “Moins dans le mobile, plus dans la vie.” En gros, les Windows Phone sont plus simples. Vous allez directement à l’essentiel. Geeks, passez votre chemin !

Le grand public est en tout cas attendu en masse chez The Phone House, qui a modifié ses plans marketing après avoir testé le produit et le lancera “en grande pompe”. Seul hic : l’enseigne regrette des quantités “très limitées” et craint les ruptures de stock pour Noël. Ce qui n’est en tout cas pas une stratégie marketing, assure Microsoft, contrairement à ce que peut pratiquer Apple : “Nous n’avons aucune intention de créer de la rareté”, affirme Grégory Olivier.

Reste que, sur Facebook, les consommateurs se plaignaient de ne trouver que le modèle LG en rayons jeudi, apparemment le seul modèle disponible le jour de la sortie.

Voir un des deux teasers pour Windows Phone 7 :

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Voir la pub pour Windows Phone 7 :

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Raphaële Karayan, L’Expansion.com

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