Lutte contre la fraude fiscale: enterrer le secret bancaire, vraiment ?

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La commission d’enquête sur les Panama Papers envisage la suppression totale du secret bancaire. Du moins ce qu’il en reste, c’est-à-dire pas grand-chose…

Le fisc ira-t-il bientôt à tout moment fourrer son nez dans les comptes bancaires des Belges ? C’est en tout cas ce que préconise la commission parlementaire des Panama Papers présidée par le député socialiste Ahmed Laaouej. Mise sur pied au printemps 2016 suite au scandale mondial des sociétés écrans et du cabinet panaméen Mossack Fonseca, elle finalise actuellement ses conclusions. Dans ce cadre, les partis de la majorité fédérale préconisent notamment la levée totale du secret bancaire en Belgique.

La proposition vise à faciliter l’accès de l’administration fiscale au point de contact central (PCC), qui répertorie l’ensemble des comptes bancaires ouverts par les contribuables auprès d’institutions financières en Belgique. Logé à la Banque nationale, celui-ci ne peut être consulté par les agents du fisc que sous certaines conditions (soupçons de fraude, etc.). D’où l’idée de la commission de supprimer ces derniers obstacles, histoire de lutter encore plus efficacement contre la fraude.

Des trous plus grands que le gruyère

Cela étant, tous les spécialistes vous le diront : cela fait des années que le secret bancaire n’existe de facto plus en Belgique. Comme le rappelle François Parisis, responsable du département fiscal de la Banque Transatlantique Belgium, ” il a été levé depuis bien longtemps dans plusieurs domaines. Il ne joue plus en matière de TVA, ni en matière de successions ni en cas de recouvrement. Tout cela n’existe plus depuis des années “. Les trous sont depuis longtemps plus grands que le gruyère, en somme. Le seul paravent qui subsiste encore est donc celui qui empêche le fisc d’avoir en permanence un accès direct aux comptes bancaires des Belges. Du moins en théorie. Car dans les faits, poursuit François Parisis, ” il est devenu très facile pour l’administration d’obtenir la levée du secret bancaire en cas de contrôle fiscal “, et cela tout simplement parce que des soupçons de fraude pèsent aujourd’hui plus facilement sur le contribuable dès lors que l’administration dispose d’une manne inédite d’informations à exploiter, notamment en provenance de l’étranger (Luxembourg, etc.).

Par ailleurs, le contrôle de papa, c’est fini. Avant, l’administration était organisée en fonction des impôts (IPP, TVA, etc.). Mais depuis l’an dernier, ce sont des équipes mixtes qui traitent de tous les impôts en fonction des contribuables (particuliers, PME). Bref, les contrôles sont conjoints. Croiser les données et accéder aux comptes bancaires des Belges n’est vraiment plus très compliqué pour le fisc. Sachant qu’il n’y a donc plus beaucoup de secrets à lever, la majorité fédérale cherche-t-elle dès lors à se donner bonne conscience ? Effet de manche ou pas, une chose est sûre : ” Même si elle se concrétise, cette levée totale du secret bancaire aura plus des allures d’évolution que de révolution “, conclut François Parisis.

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