Cachez-moi ce Vinci que le fisc ne saurait voir…

Pour éviter de payer des taxes, les riches vident leur compte suisse et investissent en oeuvres d’art. Ce mouvement donne naissance à une nouvelle tendance : le stockage d’oeuvres d’art dans des entrepôts libres de taxes et d’impôts.

Imaginez : des trésors artistiques, parmi les plus précieux au monde, sont entreposés dans un endroit sordide, un immeuble en béton de six étages qui porte le doux nom de “Ports francs et entrepôts de Genève” (Geneva Free Ports & Warehouses). En lieu et place de fenêtres, des panneaux gris mettent à l’abri des convoitises les immenses richesses contenues dans ce coffre-fort géant.

Pour pouvoir espérer pénétrer dans l’un des coffres de ce paradis fiscal peu habituel, il faut surmonter un nombre considérable d’obstacles. A la première porte, un employé doit encoder sur un petit écran la combinaison correcte de chiffres. L’étape suivante est une grande barrière d’acier qu’il faut faire pivoter dans le sens inverse des aiguilles d’une montre pour la mettre correctement en place. Vient ensuite une lourde porte d’acier, semblable au sas d’un sous-marin, suivie d’un couloir neutre flanqué de portes des deux côtés. Seuls les locataires possèdent les clés de ces portes. L’employé de Geneva Free Ports & Warehouses, lui, reste discrètement en arrière lorsque les locataires y vont compter leurs lingots d’or ou examiner leur collection d’art.

On prétend que la dynastie de marchands d’art Nahmad a stocké dans ces locaux inhospitaliers près de 300 Picasso, ainsi que d’innombrables Degas, Monet et Rothko. La valeur estimée des oeuvres se chiffrerait en milliards. Bien peu de musées peuvent se targuer de posséder de telles collections.

Les usagers de cet entrepôt sont extrêmement riches. A en croire le rapport World Wealth de Capgemini, il y avait l’an dernier 12 millions de millionnaires dans le monde. Ils représentaient des avoirs cumulés de 35 trillions d’euros, soit 10 % de plus que l’année précédente. Mais même si ces riches deviennent de plus en plus riches, beaucoup d’entre eux se font du souci : la crise financière n’est pas encore terminée et les paradis fiscaux du monde entier sont mis sous pression afin qu’ils communiquent les identités des personnes qui y sont détentrices d’un compte bancaire.

Récemment, même les banquiers suisses s’y sont mis : ils ont envoyé à leurs clients une lettre leur demandant de collaborer avec les autorités fiscales et d’examiner l’opportunité de se faire connaître. Cela ne fait qu’accroître la crainte à l’égard des autorités fiscales. “Nous pensons que des centaines de milliards de francs suisses vont quitter le pays”, déclarait fin 2012 le directeur de la division de gestion des avoirs d’UBS, une des plus grandes banques suisses.

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