Typhanie Afschrift
Pourquoi protéger les casseurs ?
Le vrai problème, c’est sans doute que certains veulent empêcher que l’on réprime les violences commises au cours des manifestations.
Pressé par le PTB, Paul Magnette, président du PS, a annoncé que son parti ne soutiendrait plus le projet de loi sur l’interdiction judiciaire de manifester pour les personnes coupables de certaines infractions au cours de manifestations. Le PS avait pourtant approuvé ce projet durant l’été. En l’espèce, le projet paraît pourtant assez raisonnable. Il prévoit que le juge peut (mais ne doit pas) condamner à une peine accessoire (l’interdiction de manifester pendant une certaine durée) les personnes qui sont déclarées coupables de certaines infractions au cours de manifestations.
Les garanties essentielles sont prévues : la sanction est judiciaire alors qu’elle est administrative dans d’autres domaines, et elle ne frappe que des personnes qui ont-elles-mêmes commis une infraction (et non tous les participants à une manifestation), le juge disposant d’un pouvoir d’appréciation.
Les opposants trouvent la disposition « liberticide ». Comme toute sanction pénale, elle porte effectivement atteinte à des libertés. Mais il faut tout de même reconnaître que les personnes qui sont poursuivies pour avoir commis des délits (entrave méchante à la circulation, dégradation de biens immobiliers, destruction d’objets mobiliers, etc.) risquent des peines de prison, c’est-à-dire une privation de liberté bien plus importante que la perte du droit de manifester pendant quelque temps. Il est clair que si le juge devait les envoyer en prison, elles ne pourraient de toute manière plus manifester. Et s’il faut sanctionner, ne vaut-il pas mieux une sanction plus spécifique et plus propre à réprimer un comportement précis plutôt qu’une peine de prison, qui est toujours un échec ?
On se plaint qu’il s’agirait d’une « double peine », ce qui est le cas chaque fois que la loi prévoit une « peine accessoire ». Mais l’on imagine difficilement un juge prononcer à la fois de la prison et cette interdiction de manifester. La réalité est que cette « peine accessoire » permet d’alléger le traitement du délinquant sans renoncer à poursuivre.
Outre les purs casseurs, de vrais manifestants peuvent aussi devenir violents.
Le vrai problème, c’est sans doute que certains veulent empêcher que l’on réprime les violences commises au cours des manifestations. Pourtant, celles-ci ont souvent dégénéré, ces derniers temps en quasi-émeutes. Outre les purs casseurs, de vrais manifestants peuvent aussi devenir violents. Le droit de manifester n’est pas celui de détruire des objets, de bloquer volontairement certaines voies publiques, de jeter de la peinture sur des façades, de briser des vitres, ni bien sûr de s’attaquer physiquement à des personnes, policiers ou non.
Aucune loi n’a jamais prévu que le droit de grève (ou la défense du climat) justifiait des délits. Certains se plaignent des ordonnances rendues dans l’affaire Delhaize, qui n’ont pourtant fait que contraindre des manifestants grévistes à respecter la loi, y compris le droit des autres travailleurs de travailler et celui des clients de faire leurs achats.
C’est sans doute là le plus important dans cette législation: il faut une fois pour toutes dire que le droit de grève ne justifie pas de commettre des infractions, et que les activités revendicatrices, sociales, économiques ou écologiques, doivent rester dans le cadre de la loi, et sous le contrôle des tribunaux.
La loi est la même pour les syndicalistes que pour tout le monde et il est assez surprenant que le président d’un grand parti démocratique ne puisse pas accepter cela.
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