Amid Faljaoui
Industrie pharmaceutique: les diabétiques victimes des personnes obèses ?
L’obésité est devenue l’eldorado de l’industrie pharmaceutique. Le monde entier, et en particulier les Américains dont 40% de la population est considérée comme obèse, se rue depuis plusieurs mois sur l’Ozempic, l’antidiabétique du laboratoire danois Novo Nordisk. La raison ? Les médecins qui les prescrivent ont constaté qu’il donnait d’excellents résultats pour les personnes en surpoids.
Il faut croire que notre ministre de la Santé Frank Vandenbroucke a eu vent de cette information puisqu’il a constaté que les stocks de ce médicament miracle étaient quasiment vides en Belgique. Ni une ni deux, il a décidé avec ses équipes de rédiger un arrêté royal pour réserver ce médicament miracle aux diabétiques (et aux patients souffrant d’obésité sévère) en attendant que ces problèmes des stocks soient résolus. Mes confrères de L’Echo rappellent qu’entre janvier et août 2023, il s’est écoulé en moyenne 39.000 boîtes de ce médicament par mois, contre 29.000 l’an dernier pour la même époque !
L’engouement pour l’Ozempic chez les personnes en surpoids détourne une bonne partie du volume de ce médicament destinés aux diabétiques. La preuve ? Novo Nordisk annonce une rupture de stock jusqu’au début de l’année 2024. C’est une complication dont se seraient bien passés les diabétiques. En résumé, l’arrêté royal, s’il voit le jour, obligera les médecins à ne prescrire ce médicament qu’aux seuls patients atteints de diabète de type 2 et d’obésité sévère.
En creux, lisez qu’il y a bel et bien des prescriptions de complaisance en ce domaine. Pourtant, n’importe quel médecin vous le dira: pour combattre le surpoids, la seule arme efficace, c’est de se bouger et de manger moins et mieux. La remarque de bon sens est d’autant plus forte que l’efficacité de ces médicaments destinés au départ aux diabétiques disparaît lorsque vous cessez de les prendre. Pire encore, leur arrêt se traduit par une reprise de poids.
Bien entendu, au travers de ce cas particulier se pose aussi la question plus globale des prescriptions médicales. Est-il normal qu’en Belgique, nous ayons plus de malades longue durée que de chômeurs ? Avec en filigrane, la question taboue des prescriptions de complaisance qui minent l’équilibre de notre sécurité sociale. Le problème n’est hélas pas neuf et les politiques n’osent plus l’aborder sachant qu’il n’est pas porteur électoralement. Je risque moi-même de recevoir une flopée d’e-mails injurieux émanant du corps médical disant que je suis contre la liberté de prescription.
En attendant, l’industrie pharmaceutique a, elle, flairé le bon filon. Pas plus tard que le 24 octobre dernier, le laboratoire pharmaceutique Lilly a annoncé qu’il allait produire en France un autre médicament du même style contre le diabète et de l’obésité. Son nom ? Le Mounjaro. A l’évidence, ce sera une future star car il assurera une plus grande perte de poids. D’autant que son administration se révèle moins contraignante: le médicament est injecté de manière hebdomadaire et non quotidienne. La Bourse a salué ces progrès : Lilly et Novo Nordisk sont devenus les deux premières valeurs boursières, l’une bondissant de 60% depuis le début de l’année, et l’autre de 42%. Quand je vous parlais d’eldorado de l’obésité, je n’exagérais pas.
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