Olivier Mouton
Pourquoi attendre les communales?
L’urgence budgétaire fédérale? La nécessité de réformer le pays? Tout cela attendra bien… le succès des uns et des autres aux élections communales du 13 octobre. La mission de Bart De Wever, président de la N-VA et formateur fédéral, a été prolongée par le Roi jusqu’au 17 octobre… au moins. La parenthèse politique de la campagne empêche tout arbitrage sérieux. Du sang et des larmes, cela ne fait pas gagner une élection, dit-on. Certains, au sein de la future Arizona fédérale, évoquent même une fumée blanche pour… Noël.
“Nous avons une majorité fédérale qui refuse délibérément d‘aboutir à un accord de majorité avant les élections communales, pour ne pas avoir à assumer devant l‘électeur les mauvaises nouvelles, soupire François De Smet, député DéFI, dans l’opposition. C‘est lâche, particratique et désespérant.” Ce n’est pas nouveau: la Belgique est devenue une particratie avec des présidents à la baguette pour le meilleur ou pour le pire. Cette tendance s’est accentuée avec le délitement du pays: ces messieurs (le cercle est majoritairement masculin) sont les seuls à jongler avec tous les niveaux de pouvoir. Et le fédéral ne prime plus…
Après les tensions de fond sur la taxation des plus-values et les taxations au sens large, nous avons donc eu droit à la polémique sur la domiciliation de Julie Taton à Mons, la saga menant à la nomination d’Hadja Lahbib à un “petit” poste de commissaire européen à l’Aide humanitaire ou à un psychodrame politique bruxellois sur la zone de basses émissions, avec le communautarisme de la Team Fouad Ahidar en embuscade. Tout cela n’est certes pas démocratiquement inintéressant, mais les enjeux de fond semblent avalés par les convulsions de l’émocratie et des intérêts partisans. Il faut faire du bruit, tout le temps.
La Belgique est devenue une particratie avec des présidents à la baguette pour le meilleur ou pour le pire.
“Nous nous trompons de débats médiatiques, déplore l’économiste Bruno Colmant. La Belgique se nourrit de son tropisme médiatique, et la presse ramène trop souvent les sujets d’intérêt à des détails sans importance… et inversement.” Et il ajoute: “Nous ne regardons pas vers le haut, c’est-à-dire au niveau européen, peut-être parce que le lien entre nos votes et les décisions européennes relève d’une démocratie soupçonnée d’être dominée par une oligarchie technocratique. Mais c’est une grave erreur.” Les enjeux à embrasser doivent être pris à bras-le-corps à ce niveau, n’en déplaise aux replis sur soi qui s’expriment dans bien des pays européens.
Car que voit-on défiler en toile de fond? La planète est un brasier, géopolitique et climatique, avec de sourdes menaces sur notre avenir collectif. Le vieillissement de la population galope, avec son explosion de dépenses sociales. Le rapport Draghi, rédigé par l’ancien Premier ministre italien, pointe du doigt les menaces qui plaident sur notre compétitivité en avançant des réponses à l’échelle européenne. L’économie belge ralentit, la croissance reste atone et l’OCDE nous invite à réduire nos dépenses publiques “inefficaces”. Le redressement socio-économique est bien le cœur nucléaire de la future Arizona fédérale, mais qu’attend-on pour atterrir? Et, serait-on tenté d’ajouter, comment oser négliger notre impact sur la planète?
Les partis de la future Arizona restent populaires, si l’on en croit le dernier grand sondage publié le week-end dernier. Leur crédit ne doit pas seulement servir à “concrétiser l’essai” au niveau des communes, mais aussi à fixer un cap, défendre un projet mobilisateur et courageux pour l’ensemble des Belges. Dès à présent, au-delà des slogans. Notre avenir est ce prix, la confiance en la politique aussi.
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