Amid Faljaoui

Le discours sur le retour de l’industrie supplante enfin l’hypnose des politiques pour les start-up. Alléluia !

S’il fallait retenir une information économique importante de la semaine écoulée, c’est la moindre attractivité de la Wallonie pour les investisseurs étrangers.

C’est du moins ce qui découle du dernier baromètre de la société de consultance EY. La Wallonie signe pour 2022 son plus mauvais score d’attractivité depuis 10 ans.  Le chiffre fait d’autant plus mal que la Flandre, une fois de plus, suit le chemin inverse. Bien entendu, on peut discuter la méthodologie de la société EY et y apporter des bémols. Mais manque de bol, l’étude de EY est sortie quasi en même temps que la décision prise par la société Futerro, société wallonne spécialisée dans les plastiques biosourcés, d’investir 500 millions d’euros dans la construction d’une nouvelle usine, non pas en Wallonie, mais en France. Le camouflet ! Bref, la semaine dernière, c’était la double claque.

Fort heureusement, John Cockerill, l’une de nos plus belles entreprises a aussi annoncé qu’elle allait s’allier avec le Français Technip Energies pour donner naissance au premier champion européen de l’hydrogène vert. Ne boudons pas notre plaisir, c’est sur le sol belge que la nouvelle entité sera localisée. Merci Bernard Serin, l’actionnaire (français) et à son nouveau CEO, François Michel. Tout n’est donc pas perdu en termes de réindustrialisation. Mais comme le faisait remarquer l’éditorialiste de mes confrères de l’Echo, encore faut-il se poser la question de savoir si cette belle saga de John Cockerill n’est pas plutôt un contre-exemple. En clair, un simple cas isolé, alors que notre pays a besoin d’industrie comme de pain.

Au même moment, en France, Emmanuel Macron a compris le danger. Alors qu’il était le chantre de la start up nation, qu’il ne jurait que par des jeunes en tee-shirt prêts à résoudre les problèmes de notre monde au départ de PC ou de leur Mac, Emmanuel Macron a changé de logiciel. Sans renier son coup de cœur pour la French Tech, il a aussi compris que l’avenir, c’est moins les start up et davantage l’industrie. D’ailleurs, les start-up n’ont plus la cote auprès des investisseurs. Tout comme le marché de l’immobilier et de l’emploi est passé aux mains des candidats acheteurs et des jeunes diplômés, aujourd’hui, les levées de fonds pour les start up sont plus rares, avec des montants moins élevés et avec une voix plus prépondérante pour les investisseurs. Virage normal, la hausse des taux d’intérêt est passée par là. Au passage, on découvre ou feint de redécouvrir que ces start-up n’ont pas toujours un business modèle solide, qu’elles sont rarement rentables. Bref, que pour quelques Licornes (start up valorisées à un milliard de dollars), il y a beaucoup de « daubes TECH », beaucoup de coups de bluff. L’heure est donc venue de redécouvrir l’industrie comme l’a demandé Emmanuel Macron la semaine dernière. Non seulement l’industrie est rentable. Non seulement elle crée des emplois mieux rémunérés, mais en plus, elle n’est plus l’usine répugnante décriée par Emile Zola ou Karl Marx. Or, ça c’est le boulot des enseignants du secondaire en sciences économiques, ils doivent arrêter de publier des manuels d’économie avec des photos ou dessins d’usines du 19e siècle avec des cheminées polluantes. Ça, c’est l’usine de grand-papa. Aujourd’hui, les usines sont modernes, infiniment moins polluantes.

De leur côté, les politiques doivent aussi libérer le foncier et oser aller à l’encontre des avis des citoyens. Comme le disait Winston Churchill, il suffit de discuter 5 minutes avec le citoyen pour être contre la démocratie. Au-delà de la boutade, c’est clair, le citoyen est par définition schizophrène. Il veut des usines pour ne plus être dépendant de la Chine, il veut des emplois bien payés, mais il ne veut pas que l’usine soit située sur sa commune. Qu’elle soit située sur la commune voisine, va encore, mais pas chez lui. Résultat : ce brave citoyen vote contre son implantation. Et adieu les relocalisations. Bref, il n’en a pas conscience, mais ce citoyen vote en faveur du chômage et du déclassement de son pays. Pire encore, il ferme la porte d’un job bien payé pour ses enfants. Mais en bon optimiste indécrottable, je continue à espérer un sursaut national, car comme disait ma grand-mère « si Dieu ne nous pardonnait pas, son paradis resterait vide ».

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