Eddy Caekelberghs

Conférence de Munich: l’espoir fait (sur)vivre!

Eddy Caekelberghs Journaliste à La Première (RTBF)

C’est à Munich qu’en septembre 1938, l’Europe avait cru qu’il n’y aurait pas la guerre. Peut-on exorciser cela aujourd’hui ?

Des experts, des politologues et 40 chefs d’Etat se sont retrouvés à Munich pour une conférence sur la sécurité. Russes et Iraniens en ont été exclus d’office. On n’y a pas discuté de la paix mais bien de la situation. Et le constat est flagrant: le monde se divise. Comme pendant la guerre froide!

On est loin d’un isolement mondial de la Russie, constate le politologue Linas Kojala sur le portail lituanien Delfi: “Le monde se divise de plus en plus entre le monde démocratique, qui considère les enjeux géopolitiques sous un angle particulier, et les autres qui ont une opinion inverse. Cela ne facilite pas les efforts de l’Occident pour isoler la Russie et imposer pleinement les sanctions économiques”.

Davantage à l’écoute

Nous devrions donc admettre que nous ne sommes pas (ou plus) les maîtres dominants de la planète et nous rendre à l’évidence: la démocratie (si fragile, ici aussi! ) n’a pas la cote. De nos choix et partenariats autour de la table de Munich dépendent nos grilles de lecture des faits, comme le rappelle le quotidien allemand Handelsblatt: “Les représentants du gouvernement russe n’ont pas été invités, un choix délibéré. Oppresseur des aspirations de liberté de son peuple, le régime des mollahs n’aura pas non plus voix au chapitre, ont décidé les organisateurs de la conférence. Le gouvernement chinois sera en revanche représenté par ses cadors pour promouvoir son modèle d’économie de marché communiste. Au ‘Sud global’ de décider de quel côté du nouvel ordre mondial se ranger”.

Il faut tenir compte des revendications des pays dans d’autres parties du monde. “

Cela nous met-il en ordre de bataille pour promouvoir la démocratie autrement que comme un alibi de notre quête de profits? La Chine (pourtant dénoncée par l’Union européenne comme “adversaire systémique”) est présente parce que l’on compte sur elle pour vassaliser Moscou et les ramener à l’ordre international. Et parce que les Européens rêvent encore du grand marché chinois

En Espagne,La Vanguardia nous espère davantage à l’écoute des pays non occidentaux: “Il faut trouver un compromis pour favoriser un point de vue moins européen et moins occidental. Et tenir compte des revendications des pays dans d’autres parties du monde. Parce qu’on observe aujourd’hui un vaste mécontentement à l’encontre d’un ordre international qui n’est pas à la hauteur de leurs exigences.”

Les avertissements de Poutine

C’est à Munich que Poutine avait dénoncé l’avancée intolérable de l’Otan vers les frontières russes. C’était en 2007. On n’a pas alors trop prêté attention à son discours brutal et tranchant. Cela faisait déjà sept ans qu’il avait succédé à Boris Elstine, il avait mené la guerre en Tchétchénie et stabilisé la situation en Russie après la descente aux enfers des années 1990. “C’est le monde d’un unique maître, d’un unique souverain”, avait-il dénoncé en visant les élargissements de l’Otan vers l’Est. “Nous sommes légitimement en droit de demander ouvertement contre qui cet élargissement est opéré”, avait-il ajouté. L’avons-nous compris? L’année suivante éclatait la guerre en Géorgie.

C’est pour Munich que le quotidien slovène Delo publie un appel signé par des politiques et des enseignants: “La paix ne pourra être obtenue qu’à la table des négociations. (…) Nous appelons donc les citoyens, les pays de l’Union européenne, l’Otan, les Etats-Unis et la Russie à créer un monde tourné vers l’avenir, la paix, la sécurité et la lutte contre le changement climatique où la peur n’a pas droit de cité et qui garantit l’existence de l’humanité”.

C’est à Munich qu’en septembre 1938, l’Europe avait cru qu’il n’y aurait pas la guerre. Peut-on exorciser cela aujourd’hui? A Munich? Qui sait…?

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